« Nature’s Last Dance », le dernier projet jeunesse psycho-social de Cirquenciel

C’est au théâtre Beryte que Cirquenciel, le cirque social d’Arcenciel, a dressé ses tentes deux jours durant, vendredi et samedi derniers, pour présenter l’œuvre Nature’s Last Dance, fruit d’une bourse qui a été octroyée par l’Unesco dans le cadre du projet Beryte-CCI à la suite de la tragédie du 4 août 2020. L’objectif étant de voler au secours de gens touchés par l’explosion et de créer des emplois temporaires pour aider les jeunes. Cirquenciel, qui a vu le jour en 2001, est une entité sociale d’Arcenciel, un projet de jeunesse dont la mission est de servir le développement durable au Liban, tant par l’inclusion sociale des personnes handicapées que par l’innovation agricole, les services médicaux aux personnes marginalisées et d’autres services. L’idée de départ était de créer un noyau circassien avec le Cirque du Monde dont l’objectif était « l’autonomisation des jeunes pour les encourager à développer un métier et répandre la culture du cirque qui peut être thérapeutique », explique Rose Abou Élias, chef du programme jeunesse.

Quatorze artistes et un directeur artistique ont donné à voir ce deuxième spectacle de la troupe depuis la crise du Covid en partenariat avec l’Unesco et Live Love Lebanon.

Quatorze artistes et un directeur artistique ont donné à voir ce deuxième spectacle de la troupe depuis la crise du Covid, en partenariat avec l’Unesco et Live Love Lebanon. Photo Mahdi Khazaal

Ce projet, qui est une véritable école de cirque établie à la corniche du Fleuve et une troupe de spectacles, regroupe également des éducateurs non formels et fournit un soutien psychosocial. Pour Rose Abou Élias, « le cirque, discipline artistique et en même temps sportive, peut favoriser la créativité tout comme la confiance en soi et constituer un outil de changement global ». La concentration et la coordination qu’il suppose encouragent à se retrouver face à soi-même, et par là même, une introspection qui contribue à la progression. L’école, qui forme à de nombreuses disciplines circassiennes, dont le jonglage, les disciplines aériennes et d’équilibre, la gymnastique, l’acrobatie et la danse, fonctionne comme une entité d’Arcenciel. Elle intègre aussi des jeunes en situation de handicap intellectuel et physique, en coordination avec Sesobel et Udiversity.

Trame écologique

Cirquenciel s’inscrit dans une philosophie d’une économie durable et s’autofinance à travers l’école elle-même, les spectacles qu’elle organise et les projets en collaboration avec d’autres ONG et donateurs axés sur l’action psychosociale visant une population vulnérable. « Nous sommes fiers de dire que notre modèle économique se porte plutôt bien, relativement à la situation qui prévaut, ce qui ne nous empêche pas de constamment mettre en place de nouvelles stratégies financières pour améliorer nos pratiques et devenir plus rentables, car nous avons besoin de tendre vers une autonomie totale », souligne Rose Abou Élias.

Le cirque social, qui a l’habitude d’assurer de 40 à 50 prestations annuelles, s’est retrouvé malmené par la crise, laquelle occupe de nombreux jeunes à assurer un revenu comme ils le peuvent, d’où l’importance de ce projet qui les réunit autour de ce spectacle de manière assidue. Nature’s Last Dance, comme son titre l’entend, est un cri environnemental, une mise en scène d’art du cirque contemporain avec une trame écologique. Suspense et comédie sont à l’ordre du jour du programme, qui ne manque pas de mettre en avant la responsabilité de l’homme dans le changement climatique dont nous sommes témoins aujourd’hui, histoire de lui rappeler que s’il n’agit pas tout de suite, il sera trop tard. Au Liban, où d’autres feuilles de route sont légion, la question environnementale reste au cœur de la mission d’Arcenciel, d’où cet appel pressant à l’action qu’ambitionne Cirquenciel avec Nature’s Last Dance.

L'acrobatie aérienne alliant force, souplesse et grâce. Photo Mahdi Khazaal

L’homme et la planète se confrontent sur scène pour illustrer l’empreinte humaine sur dame nature de manière visuelle simple, ludique, silencieuse et accessible à tous, notamment les jeunes et les enfants. Un spectacle haut en couleur où se succèdent tableaux de jonglage, acrobatie, danse, magie et on en passe, exécutés par une myriade de jeunes mus par un enthousiasme contagieux qui n’a d’égal qu’un talent qui mérite d’être repéré et emmené encore plus loin. Plus le spectacle avance, plus on voit la nature, mère nourricière dont on épuise inexorablement les ressources, se contorsionner de douleur. Suivront les déchets pollueurs, qui même lorsqu’ils sont collectés, restent envahissants, lançant un avertissement direct au public, jeune et moins jeune, quant au mode de consommation actuel. Les costumes et le décor sont entièrement créés par Arcenciel à partir de matériaux recyclés.

Les jeunes qui adhèrent à l’école de Cirquenciel sont formés à l’art circassien et finissent souvent par collaborer avec des entreprises internationales et avoir des échanges culturels de cirque social. Ils ont notamment participé au festival « Cirque au sommet » à Crans-Montana en Suisse en 2022. « Mon devoir en tant que chef de projet est de concrétiser le rêve de nos jeunes de se produire sur des scènes internationales et j’y travaille ardemment », confie la chef du programme jeunesse qui les porte à bout de bras.

Deux autres dates sont prévues les 15 et 16 mars au théâtre de l’église Saint -Sauveur à Bourj Hammoud, avec la communauté qui a été impactée par l’explosion du 4 août, ainsi que des ateliers qui se dérouleront avant le spectacle afin de mettre en place un outil d’expression thérapeutique et fournir un accès gratuit à un événement culturel divertissant. Rose Abou Élias précise que le spectacle sera peut-être repris ailleurs ultérieurement.

Les informations relatives aux dates à venir se trouvent sur la page Instagram de Cirquenciel.