La Banque du Liban a publié une nouvelle circulaire (intermédiaire portant le n° 693) interdisant aux institutions financières de distribuer en 2024 des dividendes aux titulaires des actions ordinaires « au titre des exercices annuels précédents ». Le texte modifie la circulaire principale n° 2 du 22 octobre 1998, en lui ajoutant un article 12 bis.
Selon le département des affaires juridiques de la BDL que nous avons contacté, cette mesure ne concerne ni les banques – à qui la BDL avait déjà interdit une première fois en 2020 de verser des dividendes pour les exercices couvrant 2019 et 2020, interdiction renouvelée depuis – ni les agents de change, et encore moins les sociétés de transfert d’argent. Selon la loi libanaise, et plus particulièrement l’article 178 du Code de la Monnaie et du Crédit, le terme d’institutions financières a une définition très restrictive qui englobe principalement les organismes de crédit et de microcrédit.
La BDL n’a pas officiellement expliqué pourquoi elle avait pris cette décision maintenant, alors que le pays traverse une crise multidimensionnelle depuis plus de 4 ans. Selon une source à la banque centrale, il s'agit principalement d'empêcher toutes les entités qui peuvent être impliquées dans le remboursement des dépôts bancaires bloqués par les restrictions illégales, en place depuis le début de la crise en 2019, de les faire sortir des circuits financiers sous la forme de profits. Selon la liste disponible sur le site de la BDL, qui répertorie les 37 institutions financières agréées dans le pays, plusieurs appartiennent en effet à des groupes bancaires.
De manière incidente, dans cette liste figure également Optimum Invest SAL, une société épinglée dans le rapport d’audit préliminaire réalisé par le cabinet Alvarez & Marsal remis l’été dernier aux autorités libanaises qui l’avaient commandé, et dont ressort une des affaires impliquant l’ancien gouverneur de la BDL, Riad Salamé. Ce dernier était parti fin juillet avec plusieurs procédures judiciaires sur le dos, notamment en Europe, pour des faits qu’il rejette catégoriquement.
Selon A&M, la BDL a mené en 2015 et 2016 au moins deux opérations qui consistaient à vendre à Optimum Invest SAL des bons du Trésor en livres libanaises. puis à racheter immédiatement ces mêmes bons, pour une prime totale de 36 millions de dollars. Rien ne permet de conclure pour l’instant que la dernière circulaire de la Banque du Liban a un quelconque lien avec ce dossier. Selon la source contactée, l'institution a arrêté de travailler avec Optimum Invest SAL depuis 2020 et a déjà transmis à la justice tous les documents relatifs aux opérations litigieuses identifiées par A&M.
commentaires (2)
Les bénéfices des banques devront servir au remboursement des dépôts volés. C'est d'ailleurs la seule raison pourlaquelle ces banques ont évité la liquidation judiciaire. Il est anormal qu'il en soit autrement.
Le borgne
16 h 12, le 02 mars 2024