L’information a été confirmée à L’Orient-Le Jour : le ministre sortant de la Défense, Maurice Slim, n’accepte toujours pas de s’entretenir avec le chef de l’armée, Joseph Aoun. Il s'est ainsi abstenu jusqu'ici de fixer une date pour une visite protocolaire que le général Aoun souhaite lui rendre pour le remercier d'être venu lui présenter ses condoléances après le décès de sa mère, début janvier. De toute évidence, la décision de M. Slim est politique. Elle est un nouveau reflet de la profonde crise qui oppose le Courant patriotique libre (dont M. Slim est proche) à sa véritable bête noire, le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, le sérieux présidentiable non déclaré et maintenu à son poste depuis le 15 décembre contre la volonté des aounistes.
Si ce bras de fer entrave, comme on le sait déjà, les nominations au sein du conseil militaire (organe décisionnel de l’armée), il s'étend aussi à la cour de cassation militaire. Maurice Slim refuse en effet d’avaliser certaines nominations relatives à cette instance en arguant du fait que « les candidats proposés (par le chef de l’armée) ne sont pas détenteurs d’une licence en droit, comme le stipulent les lois en vigueur », comme on peut lire dans un communiqué publié mercredi par le bureau de presse du ministre. Le texte fait notamment référence à l’article 7 de la loi régissant l’activité de la justice militaire. Celui-ci prévoit que « des officiers ayant obtenu une licence en droit (soient) en charge de la justice militaire ». Il fait valoir toutefois que si cela s’avère impossible, des non-détenteurs de licence peuvent être nommés à des postes au sein de ce tribunal.
C’est sur ce dernier point que des cercles proches de Yarzé se fondent pour justifier la démarche de Joseph Aoun. Ils indiquent qu’il suffit que les candidats au tribunal aient suivi des sessions de formation au poste d’enquêteur judiciaire pour accéder à la justice militaire. Dans ces cercles, on rappelle aussi que le ministre de la Défense n’a pas le droit de s’opposer à une décision prise par le conseil militaire qui, tout en étant amputé (trois postes y sont vacants depuis plus d’un an), exerce des prérogatives exceptionnelles à la faveur d’une décision gouvernementale. De source proche du dossier, on souligne dans ce cadre que Maurice Slim a dérogé aux lois en n’avalisant que les nominations relatives au tribunal militaire permanent, alors qu’il n’a que le choix d’avaliser la totalité de la décision du conseil militaire. Il devait donc approuver également les nominations se rapportant à la cour militaire de cassation. À ce sujet, le bureau de presse de M. Slim indique, dans son communiqué, que le ministre a donné son feu vert à la démarche. Mais que « les officiers concernés ont été empêchés de remplir leurs tâches judiciaires (…) ». Une pique indirectement lancée contre Joseph Aoun. Mais dans les milieux proches de ce dernier, on estime que la position de M. Slim entrave le bon fonctionnement de la Cour de cassation militaire.Le chef d’état-major
Sur un autre plan, les efforts visant à défricher le terrain devant la nomination d’un nouveau chef d’état-major (de confession druze) semblent être sur le point de porter leurs fruits. C’est ce qui aurait poussé Walid Joumblatt à faire état, dans son entretien accordé mercredi au quotidien pro-Hezbollah al-Akhbar, d’une « atmosphère positive » autour de ce dossier. Mais pourquoi le leader druze est-il aussi optimiste ? « Pas de commentaire », lance laconiquement Waël Bou Faour, député joumblattiste chargé de ce dossier. De source informée, on apprend toutefois que des « échos positifs » quant à une éventuelle nomination du numéro deux de l’armée sont récemment parvenus à Moukhtara. Le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, a donné cette impression dans un entretien en début de semaine avec le quotidien Nidaa el-Watan. M. Mikati avait alors laissé entendre que la question pourrait être examinée lors du prochain Conseil des ministres. Faut-il en déduire que l’obstacle du veto des Marada à une telle démarche en pleine vacance présidentielle a été levé ? La question se pose une dizaine de jours après le dîner à Clemenceau entre M. Joumblatt et Sleiman Frangié, candidat du tandem chiite à la présidence de la République. Mais aussi bien dans les milieux de Bnechaai que ceux de Moukhtara affirment que le sujet n’a pas été longuement évoqué lors de la réunion. « Les Marada s’en tiennent à leur position de principe, mais pourraient faire des exceptions pour préserver l’intérêt de l’institution militaire », dit un proche de cette formation sous couvert d’anonymat.
« Si Zaaïter était ministre de la Défense »
Mais cela ne suffit pas. Car le ministre sortant de la Défense persiste et signe : non à toute nomination de la part d’un gouvernement sortant en période de vide à la tête de l’État. D’ailleurs, et contrairement aux attentes, Maurice Slim n’a pas proposé de noms aux postes vacants de l’armée, passant le délai du 15 janvier, date sur laquelle il s’était entendu avec le Premier ministre sortant, pour remplir cette tâche. « Rien n’a changé, pas de nominations sans un président », justifie une source proche du ministre. Le problème entre Nagib Mikati et le CPL (dont les ministres boudent les séances gouvernementales depuis décembre 2022) reste donc entier. En témoigne l’allocution du chef du parti, Gebran Bassil, au Parlement mercredi dernier en plein débat autour du budget 2024. « Le gouvernement sortant commet des infractions en série, dont la nomination aux postes de première catégorie, sans le contreseing du ministre concerné », a-t-il tonné. Quelques minutes plus tôt, M. Mikati se trouvait sous le feu des critiques du vice-président de la Chambre, Élias Bou Saab, ancien ministre de la Défense. « Si Ghazi Zaaïter (député berryste) était ministre de la Défense, l’auriez-vous traité de la même façon ? », s’est-il interrogé, s’adressant au chef du gouvernement. Une critique évidente à la volonté de M. Mikati d’outrepasser Maurice Slim dans ce dossier. Le Premier ministre, qui vient de susciter la colère des chrétiens qui lui reprochent de gérer le pays comme si de rien n’était, prendrait-il le risque de remuer, encore une fois, le couteau dans la plaie chrétienne ?
Depuis 2005, tout ce que le CPL a accompli c’est bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, bloquer, et encore bloquer. Pardon si j’en ai oublié un ou deux, mais on ne compte plus. ÇA SUFFIT!
08 h 38, le 27 janvier 2024