« On ne peut pas attendre Gaza. » Ce constat formulé à L’Orient-Le Jour par un diplomate occidental résume l’état d’esprit des cinq pays impliqués dans le dossier libanais (États-Unis, France, Arabie Saoudite, Égypte, Qatar). Le quintette, qui souhaite voir le Liban doté d’un nouveau président de la République dans les plus brefs délais, ne veut donc pas lier cette échéance à la fin de la guerre opposant Israël au Hamas (soutenu par le Hezbollah à partir du Liban-Sud) depuis le 7 octobre. Et si tout le monde est conscient qu’aucune percée significative n’est à attendre avant la réunion du groupe, prévue en principe en février, les ambassadeurs de ces pays ne comptent pas rester les bras croisés. Ils entendent mettre ce temps à profit pour relancer une dynamique politique sur la scène locale, afin de faciliter l’élection d’un président. Mais pas n’importe lequel. Le quintette prône en effet l’élection d’une figure de troisième voie qui réponde aux critères fixés lors de sa réunion en juillet dernier (non corrompue et ne faisant pas partie de la classe politique actuelle), et d’enclencher le processus de réforme exigé par la communauté internationale.
C’est dans ce cadre qu’il conviendrait d’inscrire la réunion que les ambassadeurs de ces cinq pays accrédités à Beyrouth devraient tenir en cours de semaine dans la perspective du rendez-vous de février. Cette réunion devrait être suivie d’une tournée auprès des chefs de file religieux et politiques, à commencer par le président de la Chambre, Nabih Berry. Ce dernier était censé se réunir avec les cinq ambassadeurs mardi. « Mais la rencontre a été reportée pour des raisons strictement logistiques », indique à L’OLJ la source diplomatique occidentale citée plus haut. « Logiquement, les ambassadeurs devraient se réunir pour définir les grandes lignes de leur action avant d’entamer leur tournée qui devrait paver la voie à la réunion de février », ajoute la source, qui croit savoir que l’émissaire français pour Liban, Jean-Yves Le Drian, devrait prendre part à la réunion du quintette aux côtés du ministre qatari, Mohammad ben Abdel Aziz al-Khoulaïfi, de Nizar Alaoula, chargé du dossier libanais au sein de la cour royale saoudienne, et de l’ambassadeur d’Égypte à Beyrouth Alaa Moussa. Côté américain, il est possible que ce soit l’émissaire présidentiel Amos Hochstein qui représente son pays au sein du quintette, selon des informations obtenues par notre journal. Ces diplomates se seraient, toujours selon nos informations, réunis à distance il y a quelques jours, pour défricher le terrain à la tournée qui devrait débuter d’ici à une dizaine de jours, alors que M. Hochstein se trouvait à Paris la semaine dernière. Jean-Yves Le Drian s'est pour rendu au Qatar et en Egypte.
En attendant, c’est l’ambassadeur d’Arabie saoudite, Walid Boukhari, qui se veut le moteur de la nouvelle dynamique internationale. C’est d’ailleurs lui, selon la source diplomatique occidentale, qui aurait demandé le rendez-vous des ambassadeurs du quintette à Aïn el-Tiné. « Mais après le report, il se réunira seul avec M. Berry mardi », indique un proche du chef du législatif. Parallèlement, le diplomate saoudien poursuit son activité avec ses homologues concernés par le dossier libanais afin de faciliter la tenue de l’échéance. De source informée, on apprend qu’au lendemain de l’entretien jeudi entre M. Boukhari et l’ambassadeur de France, Hervé Magro, ce dernier s’est réuni avec la nouvelle chargée d’affaires US, Lisa Johnson. « L’idée derrière toute cette dynamique, c’est d’accélérer la tenue de la présidentielle. Mais il ne faut pas oublier que l’élection n’est qu’une étape dans le cadre d’un long processus de réformes. D’où l’importance de faire élire une figure de troisième voie », commente le diplomate occidental précité.
La Modération nationale s’active aussi
Ce dernier point, Jean-Yves Le Drian est parvenu à le consacrer lors de ses quatre visites à Beyrouth. En attendant son retour, les députés de la Modération nationale (majoritairement sunnites ex-haririens) ont jeté un pavé dans la mare. « Nous avons une initiative qui consiste à ce que chaque groupe parlementaire propose les noms de deux ou trois présidentiables, ce qui pourrait nous permettre d’arriver à un dénominateur commun », explique Walid Baarini, membre du groupe. Il souligne que Nabih Berry s’est montré favorable à la démarche. « Il a même dit être prêt à convoquer le Parlement à une séance électorale, même à 2 heures du matin s’il le faut, une fois l’entente conclue », ajoute-t-il. Cette nouvelle initiative n’est donc qu’une version amendée de celle présentée en août dernier par le président de la Chambre, mais rapidement rejetée par l’opposition qui refuse tout dialogue avec l’autre camp. Il s’agit donc de remplacer le dialogue élargi par des concertations bilatérales. Cette démarche portera-t-elle ses fruits ? Le mois de février apportera probablement la réponse…
commentaires (6)
Insanity is doing the same things over and over and expecting different results ... A BON ENTENDEUR...
Emile G
15 h 58, le 23 janvier 2024