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L'Inde montre les muscles en mer d'Arabie

Le déploiement naval de l'Inde fait partie de ce « désir de jouer un rôle plus vaste et plus proactif de partenaire responsable pour la sécurité et le développement », estime Don McLain Gill, de l'université De La Salle.

L'Inde montre les muscles en mer d'Arabie

Cette photo prise le 5 janvier 2024 et diffusée par la marine indienne le 6 janvier 2024 montre un hélicoptère de la marine indienne (à gauche) s'approchant du MV Lila Norfolk, un vraquier battant pavillon libérien, lors d'une opération en réponse à un appel de détresse de détournement lancé par le navire en mer d'Arabie. Photo AFP/INDIAN NAVY

La récente opération de la marine indienne pour empêcher le détournement d'un vraquier au début du mois en mer d'Arabie illustre le renforcement "significatif" de la présence de l'Inde dans ces eaux qui baignent ses côtes occidentales et reflète aussi ses ambitions mondiales, selon des analystes.

Cette intervention, dont des images spectaculaires tournées par des drones ont circulé, a suivi de près l'annonce par l'Inde d'un déploiement de forces navales en mer d'Arabie pour protéger les navires marchands, de plus en plus souvent attaqués depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

Dès la première alerte, un destroyer indien a fait route vers le MV Lila Norfolk en détresse, propriété d'une compagnie de Dubaï et victime d'une intrusion armée, permettant l'évacuation des 21 membres d'équipage dont 15 Indiens, selon la marine indienne. "C'est significatif étant donné le contexte géopolitique", estime Uday Bhaskar, directeur du groupe de réflexion Society for Policy Studies, à New Delhi.

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Depuis 2013, la Chine a négocié une série d'accords d'investissement dans le cadre de son programme dit des "Nouvelles routes de la soie" avec plusieurs pays bordant l'océan Indien, le Sri Lanka, les Maldives, le Bangladesh et Djibouti où Pékin a installé en 2017 sa première base militaire à l'étranger. Une source d'inquiétudes pour l'Inde, désormais cinquième économie mondiale et première puissance démographique devant la Chine depuis l'an dernier.

Au pouvoir depuis 2014 et donné vainqueur des prochaines élections au printemps, le Premier ministre indien Narendra Modi ne cache pas sa volonté de ne pas céder de terrain à la Chine dans ce que New Delhi considère comme sa zone d'influence, et d'augmenter le poids de l'Inde sur la scène internationale.

"A mesure que l'Inde s'élève dans la hiérarchie des grandes puissances, elle se projette comme une puissance responsable de premier plan", observe Don McLain Gill, de l'université De La Salle, aux Philippines. Son déploiement naval fait partie de ce "désir de jouer un rôle plus vaste et plus proactif de partenaire responsable pour la sécurité et le développement", estime-t-il.

Retombées économiques

La présence de l'Inde en mer d'Arabie n'est pas nouvelle. Depuis 2008, la marine indienne croise au large de la Somalie où elle a à son actif de nombreuses opérations anti-piraterie. Le déploiement en mer d'Arabie en décembre de trois navires de guerre et d'un avion de reconnaissance dans le but affiché de "maintenir une présence de dissuasion" marque cependant un changement d'échelle. Pour New Delhi, l'enjeu est stratégique mais aussi économique.

Soutenus par l'Iran, les rebelles houthis du Yémen ont multiplié les attaques de drones et de missiles contre le trafic maritime international en mer Rouge depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, en "solidarité" avec les Palestiniens de Gaza. La situation a incité les grandes compagnies maritimes à réorienter leurs navires vers la pointe Sud de l'Afrique. 


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Or, selon un rapport du Research and Information System for Developing Countries, à New Delhi, les exportations indiennes pourraient être impactées cette année à hauteur de 30 milliards de dollars si davantage de navires sont réorientés vers l'Afrique du Sud.

Partenaire commercial de l'Iran, l'Inde n'a pas rejoint la coalition formée en décembre par les Etats-Unis avec une vingtaine de pays pour défendre le trafic maritime en mer Rouge et dans le golfe d'Aden. Mais elle s'est montrée "très proactive" pour s'assurer que les pirates "ne s'aventurent pas dans l'océan Indien", estime l'amiral Hari Kumar, chef de la marine indienne. 

De son côté, la Chine a fait preuve de plus de prudence, "soucieuse de ne pas compromettre ses relations récemment développées avec le monde arabe", analyse le chercheur Don McLain Gill.

L'ancien porte-parole de la marine indienne, DK Sharma, estime pour sa part que le déploiement des forces navales indiennes vise seulement "les mécréants qui profitent de la guerre entre Israël et le Hamas". "Nous n'avons pas l'ambition de dire que l'océan Indien est l'océan de l'Inde", insiste-t-il. Il se dit toutefois convaincu que Pékin a "pris note" de la réaction rapide de l'Inde début janvier, qui a forcé les pirates à "s'enfuir comme des rats".

La récente opération de la marine indienne pour empêcher le détournement d'un vraquier au début du mois en mer d'Arabie illustre le renforcement "significatif" de la présence de l'Inde dans ces eaux qui baignent ses côtes occidentales et reflète aussi ses ambitions mondiales, selon des analystes.

Cette intervention, dont des images spectaculaires...