En dépit d’une montée perceptible de la tension au Sud, et des rumeurs sur une probable extension du conflit au début de l’année 2024, surtout à cause de la multiplication des menaces israéliennes à l’égard du Liban, des parties proches du Hezbollah sont convaincues que la situation restera inchangée. Certes, nul ne se risquerait à l’affirmer clairement, car dans cette situation complexe il y a toujours une part d’imprévu, d’autant qu’un incident non calculé pourrait rapidement dégénérer. Mais malgré cela, les parties proches du Hezbollah estiment que la possibilité d’extension du conflit est limitée parce que des acteurs importants n’en veulent pas.
Tout en reconnaissant que les Israéliens augmentent ces derniers jours le niveau de leurs provocations pour pousser le parti chiite à réagir violemment et lui faire ainsi assumer la responsabilité de l’extension du conflit, ces mêmes parties estiment que les Israéliens souhaitent un tel scénario, tout en craignant ses conséquences et en cherchant à ne pas en être les déclencheurs. Par contre, les Américains et le Hezbollah lui-même, ainsi que le Liban en général, ne le veulent pas.
Au sujet de la position américaine, ces mêmes parties rappellent que l’ambassadrice des États-Unis Dorothy Shea, qui a achevé son mandat hier, n’avait qu’une phrase à la bouche lors de sa tournée d’adieu aux différents responsables et figures politico-militaires : Il faut tout faire pour éviter une extension du conflit. Cette même phrase, Mme Shea l’avait déjà prononcée lors de ses rencontres avec les différents protagonistes libanais, juste après le déclenchement du Déluge d’al-Aqsa. Elle leur avait alors demandé de déployer tous les efforts possibles pour éviter un tel scénario qui, avait-elle dit, serait terrible pour le Liban. Que ses interlocuteurs aient suivi ou non le conseil, la situation au sud du Liban est restée relativement sous contrôle et le Hezbollah est en train de respecter autant que possible ce qu’on appelle « les règles d’engagement » établies au fil des années à la suite de l’adoption de la résolution 1701 en août 2006. Lors de ses derniers entretiens avec les personnalités libanaises, Dorothy Shea est d’ailleurs revenue sur ce sujet, insistant sur la nécessité de continuer à respecter ces règles. Pour les parties proches du Hezbollah, Mme Shea ne lance pas ces recommandations par souci du bien-être des Libanais, mais bien parce qu’une éventuelle extension du conflit constituerait une menace pour les intérêts américains. En effet, l’ambassade qui est en construction à Naccache a déjà coûté près d’un milliard et demi de dollars, et elle est destinée à être un véritable centre de l’action américaine dans la région. Surtout au moment où la présence américaine est remise en cause en Irak, en raison notamment des attaques répétées contre les bases militaires américaines dans ce pays et après la prise du pouvoir par les parties chiites pro-iraniennes qui ne cachent pas leur volonté de ne plus garder en Irak une présence militaire américaine. De même en Syrie, la situation reste confuse et la présence américaine dans le nord et l’est du pays reste sujette à des attaques. Pour ces raisons, l’ambassade au Liban est donc appelée à devenir un centre régional, et ce rôle serait remis en question en cas d’extension du conflit au sud du pays.
Concernant le Hezbollah, il a lui aussi ses raisons pour ne pas vouloir d’une guerre généralisée. D’abord, et cela le secrétaire général du parti l’a clairement déclaré, le Hezbollah ne considère pas que cette bataille est la sienne, ni dans son timing ni dans ses objectifs. Elle est celle du Hamas, et des Palestiniens en général. Le Hezbollah ne joue dans ce contexte que le rôle de soutien, dans le but de faire baisser la pression israélienne sur les Palestiniens. Or toute extension du conflit au Liban serait de nature à détourner l’attention générale de la situation à Gaza, et les Israéliens pourraient alors y poursuivre en toute tranquillité leurs bombardements violents. Hassan Nasrallah l’avait d’ailleurs déclaré dans les deux discours qu’il a prononcés depuis le 7 octobre : le Hezbollah n’interviendrait de façon plus large que si le Hamas est sur le point d’être éliminé ou si le projet de transfert des Palestiniens vers le Sinaï ou ailleurs est en cours, ou encore si les Israéliens mènent une attaque terrible contre le Liban. Jusqu’à présent, rien de tout cela n’a eu lieu et le Hezbollah préfère donc que la situation reste telle quelle. Selon les parties précitées, cela ne signifie pas qu’il n’est pas prêt pour une confrontation à une plus grande échelle, mais il estime simplement que dans le contexte actuel, elle n’est pas nécessaire et ses conséquences sur le plan interne pourraient lui nuire. Le Hezbollah est en effet conscient du fait que la vague de sympathie libanaise à l’égard des Palestiniens face aux violences dont ils sont victimes pourrait changer si la guerre totale devait se transposer au Liban. Jusqu’à présent, il a réussi à assurer une sorte de consensus minimal sur la situation en général, et les voix discordantes restent limitées. Mais tout cela pourrait changer au moindre faux pas. À ce stade, une intervention plus musclée du Hezbollah n’est donc pas nécessaire, le Hamas restant en mesure de répondre, même dans les régions que les Israéliens affirment avoir pacifiées, comme le nord de Gaza. De plus, si le Hezbollah lance une attaque, il ne pourra pas bénéficier du facteur de surprise comme cela a été le cas pour le Hamas le 7 octobre. Enfin, toujours selon les parties proches du parti, le Hezbollah est convaincu que les menaces israéliennes s’inscrivent dans le cadre de la guerre psychologique, bien plus que dans un plan d’action concret. Cela ne signifie certes pas que les risques sont inexistants, mais ils restent limités.
Le Hezbollah n'a pas et n'a jamais eu les moyens de sa politique. Le matamorisme est sa spécialité et reste du calibre de la grenouille qui veut devenir un bœuf. Il sait très bien que Gaza est presque terminé et que s'il fait l'erreur de broncher se sera sa fin non seulement milicienne mais et surtout politique et sociale. A mon humble avis son tour viendra le moment venu et ce seront les Libanais qui lui feront payer la factures de tous leurs malheurs y compris ce qu'il qualifie de son environnement naturel. Il l'a détruit lui même et il n'en reste pas grand chose autre que des chimères.
16 h 59, le 02 janvier 2024