Le point de vue de...

Endiguer la montée aux extrêmes

Endiguer la montée aux extrêmes

D.R.

La nouvelle guerre de Gaza a réveillé tous les vieux démons identitaires latents depuis le début de la Question de Palestine et la fin de la Seconde guerre mondiale, jusqu’aux attentats du 11 septembre 2001 à New York, et ceux du Bataclan en novembre 2014 à Paris.

À la violence disproportionnée contre les civils fait écho, dans une synchronie troublante, un tsunami de « haine culturelle » : antisémitisme et islamophobie se livrent progressivement, comme Israël et l’Iran par le truchement de la cause arabe et palestinienne, à une montée aux extrêmes vaste et dangereuse qui menace désormais la planète entière.

La majorité des Occidentaux estime ainsi que la guerre a éclaté le 7 octobre suite à un acte « terroriste », effectué par une organisation islamiste de la même famille que Daech.

La majorité des Arabes croit fermement de son côté que la guerre a débuté le 15 mai 1948 et que l’opération menée par le Hamas le 7 octobre n’est qu’une étape de plus sur le chemin de l’indépendance.

Ils croient aussi que Hamas n’est que le résultat des erreurs commises par des dirigeants comme Benjamin Netanyahu et tant d’autres qui, en Israël comme en Occident, ont nié le droit du peuple palestinien à la vie et à un État libre, indépendant et reconnu dans ses frontières.

La plupart des pays occidentaux soutient Israël et considère que son effondrement face au Hamas ouvrirait la voie à une sorte de « déluge islamiste » qui pourrait ravager par la suite les capitales européennes.

Les Arabes soutiennent, à l’unanimité, la cause palestinienne, mais sont divisés sur la nature du Hamas – et le soutien de Téhéran à ce dernier n’est pas sans provoquer une sorte de confusion en soi au sein du « monde sunnite », compte tenu de deux décennies de violence menées par les milices pro-iraniennes contre les populations civiles dans les provinces arabes « annexées » par le néo-Empire perse.

Du reste, une chronologie rapide du conflit israélo-arabe montre clairement un passage de la lutte contre Israël via les armées régulières arabes, puis par l’intermédiaire de l’OLP et son positionnement à gauche sur l’échiquier politique pendant la Guerre froide, sur un terrain islamiste qui ne cesse de croître, surtout depuis 2005-2006.

Or cette « islamisation » de la cause palestinienne est une arme à double tranchant.

D’une part, elle assure un environnement « islamique » qui dépasse le cadre de la Palestine et même celui du monde arabe, pour toucher l’islam planétaire – même au cœur de l’Occident, à Rome, Londres, Paris, Milan, Berlin…

D’autre part, elle permet à Israël de bénéficier d’un large soutien « judéo-chrétien » dans le monde entier.

La grande victoire des artisans du 7 octobre et des protagonistes de la guerre de Gaza est dans cette montée aux extrêmes inouïe qu’ils ont réussi à provoquer, avec une polarisation sans précédent qui joue sur les « inconscients collectifs » des sociétés et exploite les traumas hérités de l’Histoire.

Il existe pourtant une troisième voie pour briser le cycle de la haine et de la violence.

Les musulmans vivant en Occident auraient dû – et doivent – dénoncer la cruauté du Hamas contre les civils israéliens victimes du 7 octobre – avant même de manifester leur soutien à la Palestine. Les Occidentaux auraient dû – et doivent – se solidariser avec le peuple palestinien victime, depuis le 7 octobre, d’une extermination en bonne et due forme, et dont nul ne devrait nier le droit à l’existence, à l’autodétermination et à un État indépendant, tant en Orient qu’en Occident.

La priorité n’est pas aux traumas collectifs du passé réanimés à desseins par des visées politiques régionales étriquées, mais à la finalité et à la dignité de la personne humaine.

Il est impératif de rechercher une voie de dialogue qui dépasse la politique et répondre à une seule question qui se pose aujourd’hui à Jérusalem, mais aussi partout ailleurs dans le monde : comment vivre en paix en étant différents ?

La réponse, il revient à ceux qui continuent encore de refuser que le monde soit pris en otage par les extrêmes – les « gens de bien », notamment le pape François, le cheikh d’al-Azhar, Ahmad el-Tayyeb, ou l’ayatollah Sistani, parmi d’autres, politiques ou religieux – de passer à l’action, pour mettre en application leur narratif avant que le camp de la paix, de la modération et du vivre-ensemble ne soit complètement éradiqué, et que la planète entière ne bascule irrémédiablement en enfer.

La nouvelle guerre de Gaza a réveillé tous les vieux démons identitaires latents depuis le début de la Question de Palestine et la fin de la Seconde guerre mondiale, jusqu’aux attentats du 11 septembre 2001 à New York, et ceux du Bataclan en novembre 2014 à Paris.À la violence disproportionnée contre les civils fait écho, dans une synchronie troublante, un tsunami de « haine...

commentaires (3)

Très nuancé et porteur d’espoir malgré et contre tout. Merci Farès!

De Chadarévian Simone

23 h 47, le 05 avril 2024

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Très nuancé et porteur d’espoir malgré et contre tout. Merci Farès!

    De Chadarévian Simone

    23 h 47, le 05 avril 2024

  • Absolument vrai, il faut agir pour avoir la chance de réussir. Même si ce n'ai que pour ramené les masses à la raison, la modération, la moralité. Voire tous les points communs des différentes communautés réligieuses. En même temp il faut joindre le pouvoir à la raison, si non ce n'ai que des paroles et des communautés solidaires mais incapables de réinstitué l'ordre ni à remettre la constitution en voie d'application.

    Sarkis Dina

    10 h 01, le 11 février 2024

  • RIEN N'Y FAIT, RIEN N'Y FERA !

    Chucri Abboud

    00 h 32, le 17 décembre 2023

Retour en haut