Critiques littéraires Coup de cœur

Antoine Boustany en guerre contre la « blanche »

Antoine Boustany en guerre contre la « blanche »

D.R.

La drogue a été, pendant la guerre du Liban, un véritable fléau qui a ravagé les rangs des miliciens comme ceux des civils. Qui, mieux que le professeur Antoine L. Boustany, aurait pu traiter ce sujet sensible ? Psychiatre et addictologue, ancien président de l’Ordre des médecins du Liban, il est l’auteur d’ouvrages traitant du phénomène de la toxicomanie dans nos sociétés modernes, dont la très remarquée Histoire des paradis artificiels, drogues de paix, drogues de guerre, parue dans la collection Pluriel chez Hachette. Il aurait pu analyser ce phénomène à travers un nouvel essai, mais en publiant Blanche, pour le malheur et le bonheur aux éditions Complicités, il a préféré la voie romanesque qui permet de mieux sensibiliser le public non averti en mettant en scène des personnages réels et fictifs qui, tout en dialoguant entre eux, s’adressent aussi au lecteur. Pour l’auteur, la trame est déjà prête : ce qu’il raconte, il l’a lui-même vécu en tant que médecin pendant la guerre du Liban de 1975 à 1990. Ses protagonistes ne font que revivre sa propre expérience.

L’héroïne du récit, Leila, issue d’une famille aux relations tendues, travaille comme aide socio-médicale auprès des miliciens. Peu à peu, elle découvre que les héros qu’elle côtoie sont des êtres vulnérables qui utilisent la cocaïne pour surmonter la peur, se donner du courage ou tuer l’ennui : « Si un jour vous vous trouvez au bord d’un précipice (...), la ‘‘blanche’’ sera comme un don auquel on s’accroche mordicus, naviguant à vau-l’eau vers cet enfer blanc, lui dit-on. Je ne suis pas tombé dans la drogue par hasard et ce n’est pas au hasard d’une cure que je me relèverai… » Désireuse d’éradiquer ce fléau, elle incite son fiancé Pierre, haut cadre dans la milice, à la rejoindre au sein de l’équipe formée par Anthony, un psychiatre spécialisé en la matière, l’alter ego de l’auteur. Mais les mafias locales ne sont pas prêtes à se laisser faire : pour elles, tous les coups sont permis, pourvu que leurs trafics continuent à prospérer.

En refermant ce roman, on mesure le double talent de son auteur : l’art du conteur qui fait qu’on suit l’histoire avec intérêt de la première à la dernière page  ; et sa capacité à analyser, en bon psychiatre, la psychologie de ses personnages et les contradictions de la société libanaise – de sorte que ce roman apparaît comme un témoignage indispensable pour comprendre les affres de la guerre du Liban dont on n’a pas fini de subir les conséquences.

Blanche, pour le malheur et le bonheur d’Antoine L. Boustany, éditions Complicités, 2023, 345 p.

La drogue a été, pendant la guerre du Liban, un véritable fléau qui a ravagé les rangs des miliciens comme ceux des civils. Qui, mieux que le professeur Antoine L. Boustany, aurait pu traiter ce sujet sensible ? Psychiatre et addictologue, ancien président de l’Ordre des médecins du Liban, il est l’auteur d’ouvrages traitant du phénomène de la toxicomanie dans nos sociétés...

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