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Sport - Portrait

Aziza Sbaity, l’athlète libanaise qui a tapé dans l’œil de la BBC

La « femme la plus rapide du Liban » figure sur la liste des 100 femmes les plus influentes et inspirantes au monde publiée par la chaîne britannique.

Aziza Sbaity, l’athlète libanaise qui a tapé dans l’œil de la BBC

Aziza Sbaity hissant un drapeau libanais. Photo ANI

« Au début, j’ai cru que c’était une erreur… ». En parcourant du regard sa boîte email, Aziza Sbaity a eu besoin d’un peu de temps pour digérer la nouvelle qu’elle venait de recevoir de la part de la BBC (British Broadcasting Corporation) : elle fait partie des « 100 femmes les plus influentes et inspirantes au monde de 2023 », rien que ça. « Je pensais qu’il s’agissait juste d’une “shortlist” et qu’à la fin, je ne serais pas sélectionnée, raconte la sprinteuse à L’OLJ. Puis lorsque j’ai vu la liste finale… je n’arrivais pas à y croire. »

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« C’est un immense honneur d’être reconnue autrement que pour mes performances d’athlète, avoue-t-elle. C’est fou de se dire que la dimension sociale de ce que je fais à côté de la piste peut avoir un écho aussi large. », ajoute-t-elle. Cette sélection a pour but de mettre en lumière une centaine de personnalités ayant « accompli quelque chose d'important ou influencé leur société d'une manière qui ne ferait pas nécessairement la une des journaux », détaille le site de la chaîne de télévision publique britannique. Il y figure des noms mondialement connus, comme ceux de Michelle Obama et de Amal Alamuddin Clooney, l’avocate libano-britannique spécialisée dans la défense des droits humains, mais aussi ceux de nombreuses autrices et militantes engagées sur les questions féministes et climatiques ainsi que plusieurs sportives de premier plan telles qu’Aitana Bonmatí, la footballeuse espagnole championne du monde et lauréate du dernier Ballon d’or.

Une vie faite de combats…

Née à Monrovia en 1991 d’une mère libérienne et d’un père libanais, Aziza Sbaity s’installe au Liban à l’âge de 10 ans. Un exode contraint par la recrudescence de la guerre civile ayant ravagé le Liberia entre les années 1990 et 2000. De quoi la placer dans une catégorie assez particulière, à cette époque en tout cas : celle des gens ayant dû fuir « vers » le Liban et non pas dans le sens inverse.

Mais c’est rapidement contre une autre forme de violence que la jeune femme doit se défendre : celle du racisme. « L’école a été un cauchemar pour moi. Étant la seule jeune fille noire de ma classe, je me faisais harceler chaque jour, je rentrais à la maison en pleurs, à tel point que je demandais à mon père de me ramener au Libéria avec lui », poursuit-elle.


Capture d'écran du profil d'Aziza Sbaity sur le site de la BBC.

Grâce au soutien de ses parents, mais aussi de sa belle-mère, avec qui elle grandit à Kafra, dans le caza de Bint Jbeil, la jeune Aziza se réfugie dans le sport pour s’affirmer sur le plan personnel et mieux faire face aux discriminations dont elle fait parfois toujours l’objet. Comme cette fois, en 2021, où un douanier de l’aéroport de Beyrouth remettait en cause sa libanité du fait de son apparence physique. « Le Liban a encore beaucoup de progrès à faire sur cette question, confie-t-elle. C’est un combat de tous les jours que j’espère pouvoir faire avancer à ma manière : en représentant le Liban de la meilleure façon possible sur la scène internationale. »

… et de records

Après avoir gagné le respect de ses camarades en remportant toutes les courses organisées au sein de son école, y compris contre les garçons, l’adolescente prend conscience de ses capacités physiques hors norme et se dédie corps et âme à l’athlétisme une fois entrée à l’université de Sabis à Choueifat à l’âge de 16 ans. Puis, à force d’efforts et de courses disputées à travers le globe, elle finit par devenir « la femme le plus rapide au Liban » en faisant tomber pour la première fois le record national du 100m de Gretta Taslakian le 9 juillet 2018, à Amman, en Jordanie, lors des championnats d’Asie de l’Ouest, en l’abaissant à 11 secondes et 73 centièmes. « C’est un moment qui restera à jamais gravé dans ma mémoire. Même si j’ai battu ce record à cinq reprises, dont la dernière fois en avril dernier lors d’une course en Allemagne que j’ai gagnée en 11'54, je pense que je n’ai jamais ressenti d’émotions aussi fortes », confie-t-elle.

Aziza Sbaity durant la course du 200 m lors de championnats arabes de Marrakech, dimanche 26 novembre. Crédit photo Simo Hamdi (fournie par Aziza Sbaity)

En plus de sa collection d’autres records nationaux (60m, 300m et relais 4x100m), l’athlète de 32 ans a haussé le drapeau frappé du cèdre à maintes reprises sur les premières marches des podiums les plus prestigieux. En particulier cette saison, « l’une des meilleures de (sa) carrière », lors des championnats ouest-asiatiques et des Jeux arabes dont elle est repartie parée de la médaille d’or. Il ne lui reste désormais qu’un rêve à accomplir : celui de représenter le Liban aux Jeux olympiques.

Devoir d’exemplarité

Après avoir raté le coche pour ceux de Tokyo en 2021, Aziza Sbaity affirme qu’elle donnera « tout ce qu’elle a » pour décrocher le seul ticket offert à la Fédération libanaise d’athlétisme pour les Jeux de Paris l’été prochain, hommes et femmes confondus. Habituée à puiser sa force dans l’adversité, la sprinteuse a déjà entamé sa préparation aux côtés de son fidèle entraîneur, Georges Assaf. Un long chemin dont elle a repris le cours il y a trois semaines après une longue coupure passée, entre autres, aux États-Unis, où elle s’est tenue aux côtés de sa mère qui lutte actuellement contre un cancer. « C’est ici que je retrouve toute mon énergie et ma motivation », glisse-t-elle.

Pour mémoire

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Une sérénité toutefois entamée par les combats qui ont fait rage plus d’un mois et demi dans son Liban-Sud, et la nécrologie qui s’allonge un peu plus chaque jour dans les territoires palestiniens. Son village, Kafra, a, lui aussi, été ciblé il y a deux semaines par un tir de drone israélien : « C’est très dur de ne pas savoir ce qu’il va advenir de sa maison, de sentir la douleur des gens restés dans le Sud, abonde-t-elle. Mais c’est notre devoir, à nous sportifs, de passer au-dessus de ces émotions négatives et de donner le meilleur de nous-mêmes pour nous qualifier pour les Jeux olympiques. Car c’est dans ce genre de situations qu’il est encore plus important de faire parler du Liban d’une façon plus positive. »

« Au début, j’ai cru que c’était une erreur… ». En parcourant du regard sa boîte email, Aziza Sbaity a eu besoin d’un peu de temps pour digérer la nouvelle qu’elle venait de recevoir de la part de la BBC (British Broadcasting Corporation) : elle fait partie des « 100 femmes les plus influentes et inspirantes au monde de 2023 », rien que ça. « Je pensais qu’il...

commentaires (5)

Bravo Aziza Tu apportes tellement de lumière positives à notre Liban Il en a vraiment besoin Nous sommes tous derrière toi

Awtel Samia

22 h 26, le 29 novembre 2023

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Bravo Aziza Tu apportes tellement de lumière positives à notre Liban Il en a vraiment besoin Nous sommes tous derrière toi

    Awtel Samia

    22 h 26, le 29 novembre 2023

  • Aziza, je te souhaite à nouveau une pluie de records. A consommer sans modération! Le Liban est fier de toi!

    fattal etienne

    17 h 25, le 29 novembre 2023

  • Bravo Aziza Et bonne chance pour Paris

    Tawil aelta

    14 h 26, le 29 novembre 2023

  • Quel bel example, bravo de tout mon cœur! Nous avons un très long chemin à parcourir de point de vue discrimination, c’est honteux nous devons figurer parmi les pires pays dans se domaine.. on se prend pour qui??

    ted amyuni

    14 h 01, le 29 novembre 2023

  • BELLE HISTOIRE ET BELLE LEÇON POUR SES CAMARDES ET TOUS CEUX QU,ILS L'ONT REJETÉ. MERCI LA CHAMPIONNE

    Gebran Eid

    12 h 33, le 29 novembre 2023

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