Alors même que l'armée israélienne pénètre dans le plus grand hôpital de Gaza, al-Chifa, au 40e jour de sa guerre avec le Hamas, il convient de rappeler que le droit international humanitaire (DIH), dont la source principale est la quatrième convention de Genève, protège les établissements sanitaires, notamment les hôpitaux, des attaques qui peuvent les cibler, ainsi que les blessés, les malades et le personnel de santé ou responsable des transports sanitaires (ambulanciers…). Existe-t-il toutefois des exceptions à cette règle ? Dans un récapitulatif publié sur son site, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) expose les détails de cette protection ainsi que les exceptions qui restent très rares dans ce cas-là.
En quoi consiste la protection accordée aux blessés et aux malades en période de conflit armé selon le DIH ?
– Toute personne, quel que soit son statut, qui a besoin de soins médicaux, et qui ne participe pas ou plus aux hostilités, doit être respectée (ni attaquée ni soumise à de mauvais traitements), protégée, recherchée et recueillie, et soignée sans aucune distinction.
– Les parties belligérantes doivent fournir dans les meilleurs délais possibles des soins aux blessés et ne pas refuser arbitrairement aux organisations l’autorisation de faire leur travail.
– Le DIH octroie une protection spécifique au personnel médical, aux établissements de santé et aux transports sanitaires. Les parties à un conflit doivent, selon le point effectué par le CICR, « les traiter avec respect lorsqu'ils s'acquittent de leur mission exclusivement médicale, et ne doivent pas indûment entraver leurs activités afin qu'ils puissent soigner les blessés et les malades ».
Dans quelles circonstances les hôpitaux peuvent-ils perdre la protection accordée par le DIH ?
– Les hôpitaux ne peuvent perdre la protection que leur accorde le DIH que s’ils sont utilisés par une partie à un conflit dans le but de commettre des « actes nuisibles à l’ennemi ». Selon le site du CICR, il n’existe pas de définition à ces actes dans le DIH, qui mentionne toutefois ce qui n’est pas considéré comme « nuisible à l’ennemi » : porter ou utiliser une arme légère pour se défendre ou défendre les malades et les blessés, faire garder l’entrée d’une structure médicale par des individus armés ou encore la présence de combattants blessés qui ne participent plus aux hostilités.
– En l’absence d’une définition universellement acceptée sur les actes qui pourraient faire perdre leur immunité aux hôpitaux, la raison de la perte de cette protection reste cependant « claire », selon le CICR : quand ces établissements « sont utilisés pour interférer directement ou indirectement dans les opérations militaires ». Par exemple, quand l’hôpital « est utilisé comme base de lancement d’une attaque, poste d’observation servant à transmettre des informations d’intérêt militaire, dépôt d’armes, centre de liaison avec des troupes armées, ou encore pour abriter des combattants valides », poursuit le texte.
– Et s’il y a le moindre doute, le DIH est formel : il convient de présumer que les établissements de santé ne sont pas utilisés pour commettre des actes de guerre.
À quelles conditions juridiques est soumis le lancement d’une attaque contre un hôpital présumément utilisé pour commettre des actes nuisibles envers un ennemi ?
– Il convient, avant de mener une attaque contre un hôpital, de lancer un avertissement, dont l’objectif est de donner le temps aux belligérants de mettre un terme à leur comportement, ou alors d’évacuer les blessés et les malades. Cette attaque ne peut être « autorisée » que si l’avertissement reste « sans effet », selon le DIH.
– En cas d’attaques, la sécurité des blessés et des malades doit être préservée par toutes les mesures possibles, et des précautions doivent être prises par l’attaquant en vue de réduire au maximum les pertes et dommages.
– La partie attaquante doit en outre respecter le principe de « proportionnalité », c’est-à-dire prendre en compte les conséquences humanitaires de ses actions.
Comment toutes les dispositions citées plus haut s’appliquent-elles à l’attaque menée actuellement par l’armée israélienne contre l’hôpital al-Chifa à Gaza, au prétexte qu’il sert de base pour les opérations du Hamas ? Voici la réponse de Paul Morcos, spécialiste en droit international et directeur du cabinet Justicia.
– Il faut savoir tout d’abord qu’Israël s’est retiré de la quatrième convention de Genève, qu’il avait pourtant ratifiée en 1950. Cela ne l’exonère pas du respect des dispositions du DIH, étant donné que celui-ci est considéré comme un critère contraignant pour toute l’humanité. Israël est donc tenu de respecter les conditions requises pour justifier une attaque contre un hôpital, d’épargner les civils et de protéger les blessés et les malades en cas d’attaque.
– À la question de savoir qui doit être chargé de surveiller la véracité des prétextes invoqués par Israël pour attaquer l’hôpital al-Chifa et d’autres établissements de santé à Gaza, et qui doit lui demander des comptes le cas échéant, l’expert estime que c’est là que le bât blesse : le conseil de sécurité de l’ONU est incapable aujourd’hui de prendre une décision en vue de créer une commission d’enquête, ou du moins une commission d’établissement des faits, dans une affaire comme celle-là.
– Et s’il est établi que des crimes de guerre ont été commis dans les hôpitaux à Gaza ? Ces crimes ne sont pas soumis à prescription, ils peuvent à tout moment, quand les conditions politiques seront réunies, être déférés devant la Cour internationale de justice à La Haye.
..."dont la source principale est la quatrième convention de Genève"... Commen disait un sulfureux humoriste, souvent interdit de spectacle, les Conventions de Genève ne concernent que le canton de Genève... Ailleurs, c'est la raison du plus fort...
18 h 43, le 15 novembre 2023