Le 7 octobre 2023 est pour l’État d’Israël ce que le 11 septembre 2001 est pour les États-Unis d’Amérique : la mise en évidence qu’aucun « État » est invulnérable nonobstant sa toute puissance militaire. Mais si l’attaque des tours jumelles du World Trade Center revendiquée par el-Qaëda était aussi imprévisible, l’attaque du Hamas contre l’État d’Israël est surtout inédite par son ampleur tragique.
Si ce nouveau conflit interpelle les valeurs du droit dans les thématiques du « Droit à la guerre » et du « Droit de la guerre », l’instabilité régionale qui en résulte ainsi que la menace pour l’ordre international constituent néanmoins une opportunité pour régler sérieusement le problème de la cause palestinienne après la création de l’État d’Israël.
La Palestine n’est pas l’Antarctique
Dans les pas de la marche de l’histoire, l’État d’Israël présente singulièrement comme un « ADN » constitutionnel commun sinon institutionnel similaire avec les États-Unis d’Amérique devenu son allié inconditionnel. Dans l’ombre du droit des gens il faut noter que ces deux puissances souveraines se sont, dans la construction de leur État-nation, affirmées en confrontation avec une autre nation sans État : à savoir les Amérindiens pour les USA et les Palestiniens pour l’État d’Israël. L’affirmation de ces deux entités étatiques en tant que puissance souveraine s’est donc fait au détriment et au préjudice de peuples déjà présents à l’intérieur des frontières étatiques nouvellement créées. D’ailleurs « la Nakba » du peuple palestinien contraint au déplacement forcé après la proclamation de l’État d’Israël le 14 mai 1948 n’est pas sans rappeler l’exode des Amérindiens avec « la tragédie de la piste des larmes » de 1831 à 1838, illustrant une fois de plus cette difficulté politique et juridique de faire coexister sur un même et seul territoire des peuples ayant des aspirations culturelles et cultuelles différends sans vision ou volonté réelle d’une destinée commune. Mais au-delà de ces parallèles de l’histoire des sociétés humaines et du fait politique, il faut tout de même bien admettre qu’à ce jour les réserves des Indiens d’Amérique de l’Oncle Sam sont sans commune mesure aux conditions de vie de la population civile de la bande de Gaza. Au demeurant le sort des Gazaouis donne tristement raison à cette vieille maxime selon laquelle les innocents payent (encore et toujours) pour les coupables. Coupables parmi lesquels il ne faut surtout pas manquer de citer les acteurs de la communauté internationale au premier rang desquels figure l’Organisation des Nations unies (ONU) et dont toutes les résolutions de son « Conseil de sécurité » en faveur d’un État palestinien sont restées comme « lettres mortes » abandonnées au fleuve de Jourdain. Sans oublier évidemment les protagonistes directs de cette situation de crise politico-militaire et humanitaire que sont les dirigeants autoproclamés du Hamas et le gouvernement israélien. La communauté internationale et les chancelleries occidentales ont plus que jamais un devoir de médiation dans ce conflit israélo-palestinien, sauf à considérer que le silence des uns et l’inertie des autres constituent un consensus implicite. La Palestine n’est pas l’Antarctique à l’époque de la création de l’État Israël, la modification progressive qui s’ensuit de la composition démographique de cet ancien territoire de l’Empire ottoman (placé sous mandat britannique de 1920 à 1948), avec les déplacements forcés des Palestiniens et l’éclatement de leurs territoires, constitue l’une des raisons ou marqueurs principaux de cette volonté criminelle spécifique qu’est le terrorisme du Hamas contre l’État d’Israël, avec cette intention assumée à ne pas vouloir reconnaître à ce dernier le droit à la paix et à la sécurité, au contraire de l’Autorité palestinienne partisane « d’une solution pacifique à deux États ». Mais la souveraineté d’un État en guerre ne doit pas de facto abroger le droit humanitaire en dépit de l’urgence sécuritaire.
L’ennemi est un combattant humain
Quant à la question de savoir si les combattants palestiniens sont des terroristes, il y aurait nécessité et de surcroît même urgence d’ajouter à celle-ci une autre question tout aussi essentielle qui est celle de savoir « pourquoi ou comment devient-on terroriste » ? Car dans la ou les réponses à la seconde question se trouve indubitablement la réponse à la première question. [Oui], Le Hamas est assurément coupable de terrorisme quand les victimes de ses actions armées, portées au territoire de son adversaire ou ennemi politique, sont des civils de la population israélienne. Mais [non], l’État d’Israël n’est pas étranger à cette radicalisation d’une violence ignoble quand son gouvernement condamne à l’isolement dans la bande de Gaza, cette prison à ciel ouvert pour paraphraser l’Organisation internationale non gouvernementale (ONGI) Human Right Watch (HRW), des générations entières d’une population civile palestinienne avec pour seul horizon la haine sinon le désespoir (empreint de frustration et d’humiliation). Et au-delà des motivations politiques propres à chaque clan et/ou des prises de position partisane spécifique à la nature humaine, puisque l’homme est la mesure de toute chose, l’un comme l’autre des protagonistes de ce conflit armé se projettent dans la sphère pénale des crimes de guerre prohibés par des traités ou instruments internationaux en cas de violation des lois ou des coutumes de la guerre. La guerre ne justifie pas l’ignominie d’un camp contre l’autre et l’ennemi au demeurant est un combattant humain. Si aux circonstances actuelles de cette dernière guerre israélo-palestinienne, avec ce conflit Israël-Hamas, commencée depuis le 7 octobre 2023, les tueries de chaque camp pourraient rivaliser mécaniquement dans une logique d’escalade inhérente à tout conflit armé, rien toutefois n’est plus impertinent que toute tentative d’approche comparative, car il n’y a pas ou plus de degré possible dans l’horreur à niveau certain d’asservissement de l’homme à la barbarie allant jusqu’à annihiler cette humanité indissociable du genre humain. Les derniers pogroms, commis à l’intérieur des frontières de l’État d’Israël et imputables aux incursions du Hamas, sont des agressions qui offensent notre humanité commune, laquelle l’humanité est dans son passé pas si lointain déjà plus que blessée par la mise en accusation des divers crimes de guerre reprochés à l’armée de Tsahal, consécutifs au rapport « Goldstone » officiellement adopté par l’Assemblée générale des Nations unies (5 novembre 2009 et 26 février 2010). Bien évidemment l’État d’Israël est en droit de se défendre contre toute agression ou ennemi agresseur. Une légitime défense en droit de la guerre qui, au-delà d’un désir de vengeance propre à toute offense, doit néanmoins se faire dans le respect du droit international humanitaire : les droits de l’homme ne sont pas des substrats juridiques à géométrie variable selon le contexte international de la répression. Certes que d’une manière générale la force du droit international est limitée à la dynamique géopolitique interne à chaque espace régional en jeu, mais le droit humanitaire présente cet enjeu particulier de ne pas donner une valeur moindre au peuple ou nation sans État.
Plus de 75 ans durant où la promesse de deux États s’est toujours soldée par la détresse et l’oppression d’un peuple palestinien en attente d’un État, avec la colonisation continue via la Cisjordanie par l’État d’Israël. Les accords d’Oslo de 1993 ont échoué dans cette ultime tentative d’une paix entre deux peuples qui ne seraient pas si étrangers l’un de l’autre à en croire les Saintes Écritures. Espérons toutefois pour les générations actuelles et futures, dans la continuité des résolutions 181 (du 29 novembre 1947, elle adopte le plan de partage de la Palestine la divisant en deux États indépendants, l’un arabe, l’autre juif, et Jérusalem étant placée sous administration des Nations unies) et 242 (du 22 novembre 1967, elle condamne « l’acquisition de territoire par la guerre », demande le « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés » et affirme « l’inviolabilité territoriale et l’indépendance politique » de chaque État de la région) de l’Assemblée générale des Nations unies, la perspective d’une paix durable égale pour tous en dignité humaine qu’ils soient juifs ou arabes. D’ici là gardons à l’esprit que le terrorisme relève plus du fatalisme que de la fatalité.
Maître en droit
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On dirait l’Afrique du. Sud mais en plus cruel de la part des sionistes
21 h 53, le 08 novembre 2023