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Moyen-Orient - ÉCLAIRAGE

Les différents scénarios possibles pour l’avenir de Gaza

L’objectif de l’État hébreu est clair : « anéantir le Hamas ». Mais les options envisagées pour le futur du réduit palestinien restent floues.

Les différents scénarios possibles pour l’avenir de Gaza

Des chars et des véhicules de l’armée israélienne se déployant le long de la frontière avec la bande de Gaza, dans le sud d’Israël, le 13 octobre 2023. Jack Guez/AFP

Une bande de Gaza réduite à néant, et après ? L’imminente offensive terrestre israélienne sur l’enclave palestinienne n’a pas débuté que, déjà, des régions entières ont été dévastées. Plus de 5 000 habitants, dont 2 000 enfants, ont été tués au cours des 18 derniers jours sous les bombardements israéliens, selon le ministère de la Santé du Hamas. Depuis le 7 octobre, l’État hébreu a clairement formulé son objectif : « anéantir » le mouvement islamiste au pouvoir. La tâche s’avère compliquée. Qu’il y parvienne ou non, une question se pose d’ores et déjà : qu’adviendra-t-il du réduit palestinien ?

Jusqu’à présent, très peu d’éléments ont filtré à ce sujet du côté des officiels israéliens. Les rares prises de parole semblent toutefois écarter deux scénarios : le retour à une occupation prolongée de la bande de Gaza tel que cela s’est produit de 1967 à 2005, ainsi que le retour au statu quo. Vendredi, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a déclaré à la Knesset que le but ultime était « la fin des responsabilités d’Israël sur le sort de la bande de Gaza et la mise en place d’une nouvelle réalité sécuritaire pour les citoyens d’Israël » et « pour la région ». Après le retrait de ses forces armées et colons de l’enclave palestinienne, l’État hébreu a maintenu le contrôle de l’espace aérien, du littoral et de la circulation des personnes et des marchandises à Gaza, imposant dès 2007 un blocus sévère transformé au cours de cette guerre en siège total. Citée par l’AFP, une source au ministère israélien des Affaires étrangères a révélé sous couvert d’anonymat que le pays souhaitait aujourd’hui « remettre les clés » de la bande de Gaza à une tierce partie, dans une allusion probable à l’Égypte.

Méfiance égyptienne

« Il s’agit là d’un objectif et d’un fantasme israélien depuis de nombreuses décennies, commente Hussein Ibish, chercheur à l’Arab Gulf States Institute. Mais Le Caire ne se laissera en aucun cas entraîner dans une implication directe à l’intérieur de Gaza. » Une préférence israélienne notamment liée au fait que l’Égypte a administré l’enclave palestinienne de 1948 à 1967, est signataire d’un traité de paix avec l’État hébreu et est capable de contrôler la sécurité du territoire. Mais de son côté, Le Caire perçoit avec méfiance la bande de terre bordant la péninsule du Sinaï et reliée à cette dernière par le poste-frontière de Rafah. Surtout depuis la prise de pouvoir en 2007 du Hamas, issu du mouvement des Frères musulmans, bête noire du régime Sissi qui a fait la chasse aux membres de la confrérie dans son pays. « Israël est obsédé par l’idée qu’un acteur doit gouverner et contrôler les Palestiniens d’une main de fer, et il espère qu’en persuadant l’Égypte ou quelqu’un d’autre de le faire, il pourra se laver les mains de toute responsabilité ou des conséquences de l’étouffement des Palestiniens et du refus de leur liberté », avance Omar Baddar, analyste politique palestinien.

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Désirant rester à l’écart de la guerre sur le territoire très densément peuplé de 362 km2, où vivent près de 2,4 millions d’habitants, Le Caire cherche aujourd’hui à éviter à tout prix l’afflux en masse de réfugiés vers le pays. Un exode qui présente à ses yeux un double risque : qu’il donne lieu à une présence permanente de réfugiés sur son territoire et que les mouvements armés palestiniens s’en servent comme une base arrière pour planifier des attaques contre Israël, menaçant d’entraîner l’Égypte dans une confrontation avec l’État hébreu. Décrié par une partie de la population égyptienne pour ses politiques économiques et sa dérive autoritaire, le président Abdel Fattah el-Sissi a construit depuis 2013 son capital politique sur le rétablissement de l’ordre dans la région du Sinaï, confrontée à une menace jihadiste. Endosser un rôle direct à Gaza mettrait ces acquis en péril. D’autant que même si l’Égypte le souhaitait, le justifier auprès de la communauté internationale s’avérerait compliqué. « Contrairement à la période durant laquelle le pays contrôlait la bande de Gaza, il existe aujourd’hui, au moins au niveau international, des organes représentatifs des Palestiniens : l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et l’Autorité palestinienne (AP), indique Hamada Jaber, consultant au Palestinian Center for Policy and Survey Research, basé à Ramallah. Cela rend difficile le contrôle de l’enclave par Le Caire. »

Absence de stratégie politique

Un autre scénario serait le retour de l’AP à Gaza, qui gouverne certaines régions de Cisjordanie en coordination avec Israël. Mais cette option présente de nombreuses limites aux yeux de l’État hébreu. Discrédité par sa population, le leadership palestinien – éprouvé depuis des années par la corruption, l’autoritarisme, l’inaction et les accusations de collaboration avec l’occupant israélien – ne parvient même pas à assurer le contrôle de certains régions placées sous son autorité. Au cours des derniers mois, Jénine ou Naplouse ont vu croître le nombre de combattants palestiniens affirmant être indépendants des principaux groupes militants, dans un contexte d’abandon du maintien de l’ordre de l’AP. Ce climat d’hostilité serait décuplé à Gaza, où les autorités de Ramallah subiraient de plein fouet les attaques des cellules restantes du Hamas ou du Jihad islamique, ravivant le spectre de la guerre sanglante de 2007. Grand perdant du scrutin législatif de 2006, le Fateh – principal parti au sein de l’OLP – n’avait pas digéré son issue consacrant la victoire du Hamas. À la fin des combats, la rupture politique était actée. Tandis que le Hamas prenait le contrôle de la bande de Gaza, l’AP asseyait son pouvoir en Cisjordanie.

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Il resterait alors la possibilité qu’un groupe composé de puissances telles que Washington, l’Union européenne, les Nations unies, les États arabes et l’AP travaillent conjointement en vue de transférer le contrôle de l’enclave palestinienne à l’ONU dans l’attente d’une solution durable. Une option qui supposerait un rôle actif des pays de la région, qui se montreraient probablement réticents à s’aventurer dans cette voie sans engagement qu’elle permette à l’AP de réinstaurer progressivement son contrôle sur Gaza. Aux yeux de plusieurs analystes, toutes ces options paraissent peu convaincantes. « Je ne crois pas qu’une quelconque partie – les forces de maintien de la paix de l’ONU, un corps expéditionnaire arabe, l’AP ou qui que ce soit d’autre – soit disposée à prendre le relais après qu’Israël a réduit Gaza en miettes et à faire le sale boulot d’anéantir les tentatives du Hamas ou d’autres organisations extrêmes de revenir et de commencer à affirmer leur autorité », suggère Hussein Ibish. Pour ce dernier, Israël est confronté à un choix impossible : « Instituer une occupation prolongée de l’intérieur de Gaza afin de supprimer tous ces groupes à long terme – ce qui signifie lutter contre une insurrection palestinienne qui éliminera petit à petit les conscrits israéliens et rendra la vie absolument misérable à Tel-Aviv – ou réduire Gaza en miettes, partir et regarder le Hamas ramper hors des décombres et déclarer sa victoire. »

Des scénarios incertains et peu crédibles qui illustrent l’absence, sur le plan politique, de projet israélien à long terme pour Gaza. Car si la stratégie militaire de l’État hébreu est claire, rien n’assure que l’idéologie et les luttes dont se réclame le Hamas disparaîtront. « C’est précisément la raison pour laquelle Israël se livre à des bombardements massifs, sans but et sans discernement, pendant qu’il tente de formuler une stratégie sensée, estime Omar Baddar. Mais qu’il tente de nettoyer ethniquement les Palestiniens de Gaza ou qu’il les confine simplement dans une zone encore plus petite dans la moitié sud de la bande, le problème fondamental demeure, à savoir que des millions de personnes assiégées sans moyen pacifique de s’en sortir trouveront une manière de réagir violemment contre leur brutalisation et leur confinement. »

Une bande de Gaza réduite à néant, et après ? L’imminente offensive terrestre israélienne sur l’enclave palestinienne n’a pas débuté que, déjà, des régions entières ont été dévastées. Plus de 5 000 habitants, dont 2 000 enfants, ont été tués au cours des 18 derniers jours sous les bombardements israéliens, selon le ministère de la Santé du Hamas. Depuis le 7...

commentaires (7)

Libérez Marwan Barghouti!

Hacker Marilyn

22 h 47, le 29 octobre 2023

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Commentaires (7)

  • Libérez Marwan Barghouti!

    Hacker Marilyn

    22 h 47, le 29 octobre 2023

  • A l’Union européenne de jouer le jeu d’une reconnaissance mutuelle avec l’accord des USA et du Canada et qui seront garants d’une paix éternelle.

    Mohamed Melhem

    20 h 48, le 29 octobre 2023

  • Même si un jour un Etat palestinien est créé,ISRAEL ne sera jamais en paix car il y aura toujours un groupuscule extrémiste pour l attaquer. C est bien ce qui se passe au LIBAN depuis l an 2000 date á laquelle s est retiré ISRAEL.

    HABIBI FRANCAIS

    13 h 38, le 25 octobre 2023

  • La seule vraie solution à la paix est d'obliger Israél à sortir des territoires occupés de prendre les colons chez lui. et de redonner aux Palestiniens lesterritoires qui leur reviennent pour avoir enfin une Palestine libre et en sécurité, reconnue internationalement, puisque ses territoires sont en fait reconnus internationalement comme appartenant aux Palestiniens! Les occidentaux qui ont mis ce problème chez nous, ont le devoir de le régler avec justice!!:Pas de paix aux Israéliens sans justice aux Palestiniens, et permettre enfin aux Palestiniens qui sont au Liban de revenir en Palestine!!

    Hélène SOMMA

    21 h 35, le 24 octobre 2023

  • Pas de demi mesure il faut atomiser le Hamas comme Isis et remettre le territoire à lAP avec le soutien politique et financier de pays arabes modérés. Et une ouverture sur l'Égypte cela est la seule solution REALISTE et bénéfique à tous sauf à l'Iran.Plus les Palestiniens choisisent la violence et plus leur territoire et leurs conditions de négociation se détériorent

    Liban Libre

    21 h 04, le 24 octobre 2023

  • Si Gaza est éliminé , aucune ville dans le monde sur toute la planète ne pourrait se sentir en sécurité , la vie sera terrible partout . On ne peut pas demander á tout un peuple usurpé de se taire partout et toujours jusqu'á la fin des temps, c'est horrible !

    Chucri Abboud

    19 h 16, le 24 octobre 2023

  • Mais%20bon%20sang%20pourquoi%20compliquer%20ce%20qui%20est%20simple.%20Il%20existe%20une%20solution%20reconnue%20de%20tous%20%3A%20cr%C3%A9er%20%20un%20%C3%A9tat%20palestinien%20qui%20engloberait%20Gaza.%20C%E2%80%99%C3%A9tait%20pr%C3%A9vu%20par%20les%20accords%20d%E2%80%99Oslo.%20%20%20Que%20ceux%20qui%20sont%20capables%20d%E2%80%99exiger%20des%20palestiniens%20des%20sacrifices%20demandent%20%C3%A0%20Isra%C3%ABl%20d%E2%80%99accepter%20l%E2%80%99application%20des%20accords%20d%E2%80%99Oslo.%20Si%20non%2C%20et%20quelque%20soit%20le%20sc%C3%A9nario%2C%20les%20palestiniens%20%20et%20quelque%20soit%20le%20nom%20qu%E2%80%99on%20leur%20donnera%20(%20Hamas%2C%20Jihad%2C%20terroriste%20ou%20autre%E2%80%A6)%20reprendront%20le%20flambeau%20de%20la%20lib%C3%A9ration%20.%20Les%20m%C3%A9dias%20fran%C3%A7ais%20peuvent%20toujours%20les%20traiter%20de%20tous%20les%20noms%20%2C%20ce%20sont%20des%20palestiniens%20qui%20se%20batteront%20%20pour%20la%20reconnaissance%20de%20leurs%20droits%20.

    HIJAZI ABDULRAHIM

    17 h 10, le 24 octobre 2023

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