« Une forte croissance, un taux de chômage à son plus bas niveau, une maîtrise de l’inflation, de solides amortisseurs externes et budgétaires et une réduction de la dépendance au pétrole. » Telles sont les conclusions publiées mercredi par le Fonds monétaire international (FMI) sur la situation économique dans le royaume saoudien. L’institution financière, à laquelle Riyad contribue à 2,10 % de son capital, a ainsi salué la transformation du pays du Golfe, soutenue par les réformes mises en place dans le cadre du plan de développement Vision 2030 lancé en 2016 par le prince héritier Mohammad ben Salmane (dit MBS). L’objectif étant de préparer le pays dépendant à l’or noir à l’ère postpétrole en diversifiant son économie, ce qui nécessite également d’attirer des investissements et travailleurs étrangers qualifiés.
Avec une croissance à 8,7 % en 2022, l’Arabie saoudite a été l’année dernière l’économie qui a crû le plus rapidement au sein du G20. Un chiffre porté par le secteur des hydrocarbures, qui a connu une flambée des prix après l’invasion russe de l’Ukraine, mais également par une croissance de 4,8 % du secteur non pétrolier, poussé par la consommation et les investissements privés, rapporte l’institution de Bretton Woods. Les revenus non pétroliers de Riyad ont en effet doublé depuis 2017. De quoi arriver en force au sommet des premières puissances économiques mondiales qui se tient dès samedi à New Delhi, en l’absence notable des présidents russe Vladimir Poutine et chinois Xi Jinping. Si le fort ralentissement économique que connaît actuellement Pékin, premier importateur d’hydrocarbures saoudiens, fait craindre des répercussions à l’échelle internationale, MBS semble avoir sécurisé sa manne pétrolière en réduisant volontairement son quota de production au sein de l’OPEP+ dès juillet, et ce jusqu’à la fin de l’année.
Bons points pour Riyad
Autre indicateur positif mis en avant par l’institution financière : le taux de chômage, qui a atteint son plus bas niveau historique, à 4,8 % à la fin de 2022, alors qu’il était de 9 % durant la pandémie de coronavirus. Le nombre de jeunes sans activité a notamment été divisé par deux au cours des deux dernières années pour s’établir à 16,8 %. Deux facteurs principaux ont participé à cette évolution : l’augmentation du taux de participation de travailleurs saoudiens dans le secteur privé, notamment des femmes, qui ont dépassé avec de l’avance l’objectif de Vision 2030 de constituer 30 % de la force salariale ; et l’augmentation du nombre d’expatriés, principalement dans les secteurs de la construction et de l’agriculture. Depuis la fin des restrictions sanitaires, les activités ont notamment repris autour des mégaprojets tels que la cité futuriste NEOM, qui pèse plus de 500 milliards de dollars. Ces plans ambitieux et extravagants sont au cœur de la stratégie de diversification de l’Arabie saoudite, sur laquelle elle compte notamment pour attirer 100 millions de visiteurs d’ici à 2030, un chiffre qu’elle se targue déjà d’avoir frôlé l’année dernière.
En dépit du boom de l’activité économique, l’inflation a par ailleurs été contenue en 2022, au moment où la hausse des prix, boostée par la guerre en Ukraine, occupait alors la plupart des dirigeants, particulièrement occidentaux. Alors qu’il avait crû pour atteindre près de 7 % aux États-Unis ou encore en France, l’indice des prix à la consommation a augmenté sur un an de 2,5 % en Arabie saoudite pour 2022. Une hausse contrôlée notamment par des subventions nationales voire des plafonnements des prix et un dollar américain qui est resté fort, le budget de Riyad étant indexé sur le billet vert. Après un léger pic à 3,4 % au début de 2023, l’inflation semble désormais en recul.
Risques équilibrés pour l’avenir
Le royaume wahhabite a de surcroît renforcé sa position fiscale en 2022. Riyad a en effet présenté un excédent budgétaire de 2,5 % de son PIB. Son premier surplus depuis 2013, et qui aurait pu être plus élevé sans des dépenses non planifiées de près de 2,5 % du PIB pour des achats ponctuels de biens et de services. Les réserves officielles de l’Arabie saoudite sont en outre suffisantes pour couvrir près de 20 mois d’importations si besoin, bien que Riyad n’ait pas augmenté ces dernières proportionnellement aux retombées exceptionnelles des exportations pétrolières en 2022 – la compagnie nationale Aramco affichant des revenus à plus de 161 milliards de dollars pour l’année. Avec un niveau de dette publique à 23 % du PIB, le FMI se veut par ailleurs rassurant sur la marge de manœuvre budgétaire pour faire face aux revers possibles.
Afin de ne pas subir la volatilité des prix du pétrole, le FMI recommande néanmoins de renforcer la politique fiscale du royaume, notamment à travers la TVA, dans le but de maintenir des amortisseurs budgétaires et de répondre aux besoins intergénérationnels de la population. Si la plupart des membres du conseil d’administration de l’institution financière ont plaidé pour une augmentation rapide des prix de l’énergie pour réduire les subventions, certains ont privilégié l’approche de Riyad telle que présentée dans le plan Vision 2030. Tous s’accordent en revanche sur la nécessité de lier toute réforme du système de subventions à un déploiement de programmes sociaux bien ciblés visant à limiter l’impact sur les plus vulnérables.