Deux peuples pour un pays : le syndrome est devenu planétaire. Il y avait la droite et la gauche, il y a maintenant le peuple et le peuple. Dire « que veut le peuple ? » n’a plus de sens. Dire « que veulent les peuples ? » c’est dire qu’il n’y a plus de pays. Il vaut donc mieux se dire que les peuples ne veulent rien. Sans compter que c’est plus pratique pour les gouvernants. Au lieu d’être choisis par lui, ils le choisissent. Brecht l’écrivait déjà en 1953 à propos des manifestations des ouvriers de Berlin : « Ne serait-il pas plus simple pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d’en élire un autre ? »
Dans les pays du Golfe, il y a le peuple du pays et il y a celui qui le peuple. En Israël, l’équation a changé : un peuple occupait deux pays, à présent ils sont deux à se disputer le même. En Palestine, c’est plus simple : il n’y a plus de pays, il n’y a donc plus qu’un peuple. Et encore, pour peu qu’on le gratte, il s’effrite. En Turquie, le président élu par un peu plus de la moitié de la population a trouvé la meilleure solution : il a gommé une moitié et nommé la sienne nation. Il n’a plus besoin de dire « mon pays », il peut dire « moi ». Tout le monde comprend. Au Liban, c’est nettement plus compliqué. Le chaab est un échantillon de la population mondiale. À l’endroit, il est sur le pied de guerre, à l’envers, il est en haillons ou en maillot. D’un côté comme de l’autre, il ne tient pas en place. Il n’y a pas moyen de le prendre en photo.
Li Liban a bien un peuple que les zaïms bafouent et volent et que l’armée ignore.
22 h 00, le 04 septembre 2023