La contrebande de produits agricoles à destination du marché libanais a été remise sur le tapis durant le week-end. Ainsi, le président du syndicat des cultivateurs et planteurs de tabac de la Békaa Ibrahim Tarchichi a lancé un appel à geler les importations de fruits et de légumes pendant trois mois, afin de freiner cette tendance qui porte atteinte aux producteurs libanais.
Le Liban se plaint depuis le début de la crise économique en 2019 d'un mouvement de contrebande de toutes sortes de marchandises, dont des produits agricoles, de la farine, du carburant, ou des médicaments, notamment de et vers la Syrie. Si au début de la crise financière qui frappait le Liban cette contrebande concernait surtout les exportations illégales vers la Syrie de produits subventionnés, qui ont provoqué des pénuries sur le marché libanais, M. Tarchichi a pointé du doigt, dans un entretien à L'Orient-Le Jour, le problème actuel des importations de produits de contrebande, qui font concurrence aux produits libanais, en raison notamment de leur plus grande disponibilité et de leurs prix concurrentiels.
Et pour justifier sa demande d'un gel de toutes les importations de fruits et légumes, il a argué du fait que "les contrebandiers font passer leurs marchandises dans des camions ayant obtenu officiellement des autorisations". "Ils dissimulent leur marchandise dans des cargaisons importées de manière légale", a-t-il insisté. "La plupart de ces produits de contrebande proviennent de Syrie. Il s'agit de fruits ou de légumes que l'on ne trouve pas au Liban durant cette saison, comme les grenades ou la corne grecque", a poursuivi Ibrahim Tarchichi. "Je n'ai pas encore reçu de réponse" concernant un gel des importations, a-t-il dit cependant.
Selon lui, c'est surtout au niveau du passage de Abboudiyé, à la frontière entre le Liban et la Syrie, que ces cargaisons arrivent. "Le passage de Abboudiyé a toujours été peu contrôlé", a indiqué le syndicaliste. Quant à l'identité des contrebandiers, il s'est contenté de lancer : "Il vaut mieux ne pas rentrer là-dedans pour le moment".
Samedi, le ministre sortant de l'Agriculture Abbas Hajj Hassan avait annoncé dans une interview sur la chaîne télévisée al-Hurra des saisies effectuées, avec le concours du service de la Sécurité de l'État dans différentes régions libanaises, de produits agricoles non libanais, au cours de perquisitions visant à ''protéger les produits locaux''.
Dans son homélie dimanche à Dimane, le patriarche maronite Béchara Rai est revenu sur cette question et a félicité les autorités pour leur lutte contre la contrebande. ''Nous saluons les équipes du ministère de l’Agriculture qui ont saisi hier (samedi) des quantités de raisins et de légumes introduits illégalement dans toutes les régions libanaises". Le patriarche a aussi salué les efforts du ministère visant à ''favoriser la commercialisation des produits libanais sur les marchés locaux et étrangers''.
Les engrais cancérigènes
Le syndicaliste est également revenu pour L'OLJ sur la question de l'utilisation d'engrais et autres produits agricoles cancérigènes dénoncée par le député Waël Bou Faour plus tôt cette semaine. "Très peu d'agriculteurs utilisent" de tels produits, s'est-il défendu. "Il y a de nombreux substituts à ces produits, au même prix. Je ne vois donc pas pourquoi on continuerait à y recourir. Ces produits étaient utilisés au Liban jusqu'à il y a quelques années. Ils ont été retirés du marché après que l'Union européenne et les Etats-Unis les ont interdits", a-t-il poursuivi.
Jeudi dernier, Waël Bou Faour avait révélé, au cours d'une conférence de presse au Parlement, que le secteur de l'agriculture au Liban continuait de recourir à des engrais cancérigènes pourtant interdits par la loi. ''Les Libanais ne savent pas ce qu’ils mangent et la plupart des agriculteurs utilisent des engrais cancérigènes, interdits au Liban et dans de nombreux pays. Ces engrais sont introduits sous l'appellation de produits de nettoyage", avait-il déclaré.
Réagissant sur cette question, le ministre sortant de l'Agriculture, Abbas Hajj Hassan, a fait savoir samedi que son ministère "travaille avec l'agence de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) depuis 4 ans sur un projet de lutte contre les produits non conformes et effectue régulièrement des tournées avec la Sécurité de l'Etat et la justice pour fermer les pharmacies agricoles illégales".
Ne demandez pas pourquoi la contrebande des fruits et légumes à contre courant cette fois. Vous oubliez les 2 millions de syriens qui vivent au Liban, ils ne vont pas accepter d'être abusés par les gourmands vendeurs de gros et de boutiques de ces produits. Arrêtez de faire les innocents ignorants et fermant les yeux.
15 h 29, le 28 août 2023