L’automne 2023 promet d’être la saison des élections à l'intérieur des partis. Après le Courant patriotique libre, qui organise son scrutin en septembre, son principal adversaire sur la scène chrétienne, les Forces libanaises, a annoncé des élections internes pour le dimanche 29 octobre. Une consultation qui devrait déboucher sur l’élection du président du parti, du vice-président et des onze membres du comité exécutif, sorte d’organe décisionnel, pour un mandat de six ans.
Il s’agira des premières élections partisanes des FL depuis la remise en liberté du leader du parti, Samir Geagea, le 26 juillet 2005. Mais les quelques 40 000 membres encartés risquent de ne pas avoir leur mot à dire dans le choix du futur chef de la formation, aucun candidat ne disputant, jusqu’ici, la présidence à Samir Geagea. Ce dernier serait donc vraisemblablement reconduit d’office à son poste, au même titre que son adversaire aouniste, Gebran Bassil.
Les responsables FL semblent conscients de cette réalité, mais préfèrent attendre l’expiration du délai de dépôt des candidatures, le 13 septembre prochain. Contacté par L’Orient-Le Jour, le secrétaire général du parti, Émile Moukarzel, souligne qu’au lendemain de l’ouverture du dépôt des candidatures (le 22 août), personne ne s’était encore lancé dans la course pour la présidence du parti. « Cela n’est pas une surprise parce qu’il est tout à fait normal de voir tous les adhérents voter et accorder leur confiance à Samir Geagea qui a fait beaucoup de sacrifices sur le double plan politique et personnel pour la pérennité du parti », dit-il. « Certains chefs de parti deviennent des figures historiques auxquelles les adhérents accordent leur confiance à chaque échéance », confirme Ghayath Yazbeck, député FL de Batroun.
Reste que la tendance des chefs de parti à être reconduits d’office à leur poste est à même de susciter des interrogations autour de la pérennité et l’avenir de ces formations qui se veulent un porte-étendard de la démocratie. « Les élections internes, qui se tiennent pour la première fois depuis la remise en liberté de M. Geagea et la mise en place du nouveau règlement interne du parti (en 2011), constituent un premier pas sur la voie de la passation des pouvoirs au sein des FL. Nous sommes donc en train d’initier un processus démocratique au sein du parti », répond M. Moukarzel.
« Les élections internes sont une opportunité offerte à plus de 40 000 adhérents de se prononcer au sujet de la direction du parti et ses choix politiques, ajoute de son côté Ghayath Yazbeck. C’est pour cette raison qu’avant de se lancer dans cette démarche, les instances chargées d’organiser le scrutin ont tenu des sessions de formation adressées d’abord aux membres du parti qui devraient se rendre aux urnes. Parce que le vote ne porte pas sur la personne du chef des FL, mais sur le choix de la ligne politique qui devrait guider le parti dans la prochaine phase. »
Ne pas comparer avec le CPL
Samir Geagea est donc quasi sûr d’être aisément reconduit. D’autant qu’ il n’y a pas de vague d’opposition au sein des FL, comme c’est le cas dans d’autres formations, s’accordent à dire plusieurs personnalités proches de Meerab. Une allusion à peine voilée à plusieurs députés aounistes qui ne cachent plus, depuis au moins quelques mois, leur opposition à la gestion par Gebran Bassil du dossier de la présidentielle. Si par leur prise de position ils ont contribué à secouer le CPL en juin dernier, il reste que ces frondeurs ne sont pas allés à se lancer dans une bataille contre leur chef.
« La comparaison entre les deux partis est injuste. Au sein des FL, il n’y a pas d’opposition contre la direction, mais des divergences de points de vue qui peuvent, dans certains cas, pousser Samir Geagea à changer d’avis », explique M. Yazbeck, comme pour mettre l’accent sur l’importance du comité exécutif des FL. C’est d’ailleurs là que se jouera la véritable bataille du scrutin d’octobre. « Je n’ai pas encore reçu de candidatures pour la présidence et la vice-présidence du parti (actuellement tenue par Georges Adwan, député du Chouf). Mais plusieurs responsables veulent faire partie du comité exécutif », confie Émile Moukarzel. Il s’agira, au sein de cette instance décisionnelle, de pourvoir à onze sièges répartis comme suit : un cadre représentant Beyrouth, trois pour le Mont-Liban, trois pour le Liban-Nord, deux pour la Békaa, un pour le Liban-Sud et un pour les membres de la diaspora.
L’appel aux partisans des FL à se rendre aux urnes intervient dans un contexte politique marqué par la bataille ardue pour la présidence de la République. Une course dans le cadre de laquelle Samir Geagea se veut le fer de lance de la confrontation avec le Hezbollah et son candidat, Sleiman Frangié. Quel impact pourrait avoir la reconduction (presque sûre) de M. Geagea sur ce plan ? « Nous sommes le seul parti politique qui, dans la foulée de la contestation d’octobre 2019, est parvenu à agrandir son bloc parlementaire grâce au leadership et à la sagesse de Samir Geagea », répond le porte-parole des FL, Charles Jabbour. « Les élections internes devraient donc nous donner un élan et renforcer notre positionnement en tant qu’élément incontournable dans la course pour Baabda », dit-il.
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Pourquoi singer les partis autocratiques au lieu de procéder à un vote en bonne et due forme pour clouer le bec à tous les partis adversaires qui se veulent plus royalistes que le roi mais s’appliquent à imposer un leader parce qu’ils ont peur de la démocratie. Les FL devraient permettre à tous ceux qui ambitionnent de se montrer à la hauteur du poste de se présenter, et que le meilleur gagne. Ne pas tomber dans les travers de ce que vous avez toujours dénoncé, est le B a Ba de tous ceux qui se prétendent être démocratiques et ouverts. Arrêtons ces pratiques ancestrales qui ne font que nous rapprocher de tout ce que nous rejetons, à savoir la dictature sous ses formes. Soyez grands seigneurs et acceptez que la démocratie triomphe. Je suis sûre que le plus méritant sera élu à ce poste pour le bonheur de tous.
Sissi zayyat
10 h 33, le 25 août 2023