Une décision de l'Autorité d'orientation religieuse – une instance du Conseil supérieur chiite (CSC) – de déchoir 15 cheikhs de leurs titres a fait l'objet d'un recours devant le Conseil d'État, déposé par l'un d'eux, Yasser Audi, connu pour son opposition au Hezbollah et au mouvement Amal de Nabih Berry et pour ses vidéos critiques des dirigeants libanais en général.
"L'Autorité d'orientation religieuse a outrepassé son autorité et abusé de son pouvoir", a déclaré mardi à L'Orient Today l'avocat du cheikh Audi, Hassan Bazzi, qui avait déposé le recours lundi.
La semaine dernière, la fuite de la décision de déchoir les quinze cheiks avait fait polémique sur les réseaux sociaux, et le CSC avait indiqué dans la foulée ne pas avoir avalisé le document. "Ce communiqué ne reflète pas les opinions du Conseil supérieur chiite. Il n’a pas été lu par le vice-président du Conseil, le cheikh Ali Khatib. Nous appelons à faire comme s’il n’avait pas été publié", avait indiqué le CSC. Cependant, le directeur général de l'Autorité d'orientation religieuse, le cheikh Abd el-Halim Charara, a officiellement publié la décision dans les tribunaux jaafarites (religieux), malgré l'absence de signature du cheikh Khatib, selon plusieurs médias libanais.
Cette décision "ne relève pas de la compétence de l'Autorité, et l'organe légitime habilité à prendre de telles décisions est le Conseil", a déclaré Me Bazzi, "ce qui montre les divisions internes entre le Conseil supérieur chiite et l'Autorité d'orientation religieuse, et constitue un autre exemple d'abus de pouvoir et d'exploitation de la religion".
Le recours déposé, la prochaine étape est d'attendre les explications du cheikh Ali Khatib. S'il désavoue, une nouvelle fois, la décision de l'Autorité d'orientation religieuse, cela pourrait conduire à l'annulation de cette décision par le Conseil d'État.
"Inapte sans preuve"
Toutefois, si Ali el-Khatib accepte d'endosser la décision, "cela équivaudrait à une reconnaissance publique et à une adoption de cette décision, ce qui nuirait grandement à la réputation du CSC et constituerait un cas de plus montrant l'étendue de la corruption au sein du Conseil", a surenchéri Me Bazzi.
Outre Yasser Audi, le document liste les cheikhs Samer Abdel Hussein Ghanoui, Bilal Ibrahim Salim, Mohammad Youssef Hajj Hassan, Nizar Mohammad Hamzé, Ibrahim Hassan Herz, Abdel Karim Cheikh Ali, Youssef Hassan Kanj, Ahmad Abbass Idi, Abou Hassan Mortada, Mohammad Ali Fouani, Hachem Ali Moussaoui, Mahmoud Abdallah Fakih, Abdel Salam Niazi Dandache et Nizar Jamal Jechi.
"Ces personnalités ont été jugées inaptes à exercer en raison de +déviances théologiques, de déviations comportementales ou d'un manque de connaissances religieuses, mais sans aucune preuve+, a estimé Me Bazzi. "Le Conseil ne les a même pas convoquées pour les interroger et ne leur a pas donné le droit de se défendre contre ces accusations génériques", a regretté l'avocat.
L'Orient Today a contacté le Conseil, qui n'a pas souhaité commenter l'affaire.
Le Conseil supérieur chiite a été fondé en 1969 par l'imam Moussa Sadr, un chef religieux chiite, dans le but d'unir les musulmans du Liban et du monde entier et d'ouvrir le dialogue entre la communauté chiite et les autres religions. Selon son site web, le Conseil est chargé de "l'organisation des affaires de la communauté".
Cheikh Audi est connu pour son opposition au Hezbollah qui veut étouffer toutes les voix chiites indépendantes
10 h 41, le 23 août 2023