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Nos Lecteurs ont la Parole

Beyrouth et diaspora

Il y a des moments comme celui-là, où nous sommes capables de nous scotcher sur un canapé en plein été. Des moments où la vie ne se résume à rien, où le cœur est désespérément vide et la tête remplie de pensées, de pensées colorées. Ces couleurs se mélangent dans un inconscient énigmatique. Un inconscient noir rempli de couleurs, rempli de contradictions. Des idées jaune orangé, vert éclaté et rouge foncé. Certaines sont éblouissantes, d’autres étincelantes, mais les racines de ma mémoire n’arrivent pas à les différencier. Elles se mélangent dans le vacarme de mon passé, le passé d’une vie dérapée. Je vous rassure, je ne suis pas déprimé. J’ai juste envie d’écrire ou de crier : Beyrouth, pour l’amour de Dieu, qu’as-tu fait de moi pendant toutes ces années ?

Des années que je te cherche et des années que tu me fuis. Et là, depuis que je te fuis, tu ne fais que me chercher. Qui es-tu? Pourquoi occupes-tu mon inconscient? Que veux-tu ? Suis-je le seul que tu hantes jours et nuits? Je pensais en avoir fini avec toi, mais malgré tout, tu es toujours là.

Tu es là, dans le train, quand, soudainement, Li Beyrouth se faufile dans mes écouteurs. Tu es là, à table, quand quelqu’un ramène un houmous « à la libanaise », comme si le houmous était né ailleurs. Tu es là quand je parle et que quelqu’un me demande l’origine de mon accent. Tu es là à dix, quinze et même vingt-quatre ans.

Tu es cet inconscient noir blindé de couleurs. Tu es toutes ces idées qui remontent à la surface. Ces idées qui me secouent entre un passé traumatisant, éprouvant, accablant, et un présent intrigant. On m’a conseillé d’écrire, d’écrire pour t’oublier. Mais à quoi bon de le faire si même le « B » de mes récits me ramène à toi ? L’alphabet n’a plus de sens depuis que j’essaie de t’oublier. Provoque-moi, Beyrouth. Provoque-moi ce soir. Je veux écrire. Je veux écrire des mots. Je veux écrire des mots sur la mort de Dalida. Je veux écrire des mots sur la disparition des Mayas. Je veux écrire des mots sur la magie du Sahara. Je veux écrire des mots sur mon envie de faire l’amour dans des salles d’opéra. Je veux écrire des mots sur toi, sur moi et mes émotions en diaspora. Provoque-moi, Beyrouth, provoque-moi ce soir. Je veux oublier que je suis un parmi des milliers en diaspora.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Il y a des moments comme celui-là, où nous sommes capables de nous scotcher sur un canapé en plein été. Des moments où la vie ne se résume à rien, où le cœur est désespérément vide et la tête remplie de pensées, de pensées colorées. Ces couleurs se mélangent dans un inconscient énigmatique. Un inconscient noir rempli de couleurs, rempli de contradictions. Des idées jaune...

commentaires (1)

Bravo et merci. Magnifique texte qui résume parfaitement la mélancolie des déplacés...

Vero M

08 h 58, le 21 août 2023

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Commentaires (1)

  • Bravo et merci. Magnifique texte qui résume parfaitement la mélancolie des déplacés...

    Vero M

    08 h 58, le 21 août 2023

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