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Société - Education

Hausse drastique des frais d'inscription à l'UL

Si le recteur estime que cette mesure est indispensable pour assurer la continuité de l'institution publique, des étudiants refusent de payer le prix de l'effondrement. 

Hausse drastique des frais d'inscription à l'UL

Des étudiants de l'Université libanaise manifestant devant le siège de la direction centrale à Beyrouth contre la hausse des frais d'inscription, le 17 août 2023. Photo ANI

« Nous ne pouvons accepter que l'Université libanaise (UL) soit amenée à fermer ses portes. Il fallait hausser les frais d'inscription pour assurer sa continuité. » Bassam Badran, recteur de l'UL, ne cache pas son inquiétude. Réajustement salarial, entretiens logistiques et techniques, maintien d'un enseignement de qualité : l'institution publique fait face à des défis de taille dans un Liban en plein effondrement. Et c'est pour y faire face qu'une hausse conséquente des frais d'inscription — de plus de dix fois les montants de l'année précédente — a été décidée pour les étudiants de la seule université publique du Liban.

Si le recteur reconnaît que les étudiants « ne doivent pas assumer la responsabilité de la situation dans laquelle se trouve l'UL », il estime que ces derniers peuvent toutefois contribuer à « protéger » l'institution. Une opinion sur laquelle s'accordent nombre d'étudiants, mais qui ne semble pas convaincre tout le monde.

Bassam Badran indique à L'Orient-Le Jour que les frais d'inscription seront compris entre 12 et 13 millions de livres libanaises par an (soit aux alentours de 140 dollars au taux du jour sur le marché parallèle) pour les étudiants libanais et palestiniens en licence (contre 885 000 LL l'année dernière), entre 17 et 18 millions (dans les 190 dollars) en master (contre 2 085 000 LL au préalable), et près de 22 millions (près de 250 dollars) en doctorat (contre 6 585 000 LL). « Les frais d'inscription seront plus élevés pour les étudiants étrangers, et atteindront par exemple 300 millions de livres (plus de 3 300 dollars) pour les doctorants », détaille-t-il.


Les revendications de l'UL
Selon lui, cette majoration, instaurée pour répondre aux besoins essentiels de l'UL, permettra d'éviter une grève du corps professoral ainsi que des problèmes logistiques à la rentrée. « Il est inacceptable que le professeur, qui touchait environ 4 000 dollars/mois avant la crise, soit actuellement payé 200 dollars », regrette M. Badran, qui rappelle que malgré ces entraves, les cours n'ont pas été suspendus l'année dernière. Le recteur reconnaît aussi que les étudiants ne doivent pas payer le prix de l'effondrement dans le pays. « Le gouvernement est appelé à assurer un budget qui réponde aux besoins de l'UL », plaide-t-il.

Bassam Badran fait état de plusieurs revendications essentielles réclamées par l'université : un budget d'au moins 4 000 milliards de livres (contre 860 milliards au préalable), un soutien financier aux professeurs et aux fonctionnaires, la possibilité de titulariser les professeurs et d'accorder aux contractuels un statut permanent. « Nous sommes devant deux choix : résoudre les problèmes ou laisser l'université s'effondrer », met en garde le recteur, qui appelle à protéger l'institution sur le long terme. « Nous avons vu ce qui s'est dernièrement passé avec Télé-Liban, lorsque la chaîne publique a risqué de fermer ses portes faute de fonds. En matière d'éducation, nous ne pouvons accepter cela. Je n'accepterai pas que l'Université libanaise soit amenée à fermer ses portes », souligne-t-il.


Les étudiants divisés
Côté estudiantin, la hausse des frais d'inscription ne fait pas l'unanimité. Jeudi, quelques dizaines d'étudiants, notamment issus du club séculaire de l'UL, ont manifesté devant le siège de la direction centrale de l'université à Beyrouth. Se prononçant au nom de ses camarades, Zahraa Nemer a déploré cette hausse des frais, assurant continuer de « lutter pour une éducation publique accessible à tous ». 

Si elle reconnaît ne pas avoir été surprise par la hausse des frais d'inscription, Rowan Ibrahim, étudiante en première année de master en droit, trouve que cette décision est « insolente ». Contactée par notre publication, elle estime que l'université dispose « d'autres sources de financement pour contrer son déficit, notamment les fonds collectés pour effectuer des tests PCR aux voyageurs arrivant à Beyrouth en plein Covid ».

Même son de cloche du côté de Karim Safieddine, coordinateur au sein du réseau Mada dont des membres ont pris part au sit-in de jeudi. « Les étudiants ne doivent pas payer le prix de l'effondrement », affirme-t-il, estimant que le déficit de l'université peut être résolu via d'autres fonds collectés par l'UL. 

D'autres étudiants trouvent en revanche que la hausse des frais d'inscription est raisonnable, voire un passage obligé pour contribuer au redressement de l'université. 

Pour Randa el-Hachem, étudiante en master en littérature francophone et comparée à Dékouané, la majoration des tarifs est « juste ». « Étalés sur les neuf mois de l'année universitaire, les nouveaux frais sont compris entre 16 et 23 dollars par mois, ce qui reste, à mon avis, un montant raisonnable pour obtenir un diplôme d'une université respectée. » « Il ne faut pas cependant que cet argent soit volé par l'État, mais qu'il soit versé aux professeurs qui méritent une augmentation salariale », ajoute-t-elle. 

Des propos sur lesquels s'accorde Michael Chaïban, étudiant en troisième année de médecine générale. « L'année dernière, les frais s'élevaient à ce qui équivaut aujourd'hui 10 dollars, ce qui est un montant minime par rapport à ce qu'on apprend. Des campus ont besoin d'entretien et les professeurs doivent être mieux payés », reconnaît-il.

« Nous ne pouvons accepter que l'Université libanaise (UL) soit amenée à fermer ses portes. Il fallait hausser les frais d'inscription pour assurer sa continuité. » Bassam Badran, recteur de l'UL, ne cache pas son inquiétude. Réajustement salarial, entretiens logistiques et techniques, maintien d'un enseignement de qualité : l'institution publique fait face à des défis...

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