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Moyen-Orient - TEMOIGNAGE

Dans le camp de réfugiés de Jénine, « les Israéliens nous ont donné deux heures pour partir »

48 heures après le début du raid terrestre et aérien lancé par l’État hébreu lundi à l’aube, Israël a annoncé mercredi qu'il était terminé, après avoir forcé 3 000 résidents palestiniens à fuir leur domicile. C’est le cas d’Ahlam, militante de la société civile âgée de 44 ans. Toujours choquée par les scènes d’horreur auxquelles elle a assisté, elle revient sur cette opération militaire massive jamais vue depuis 20 ans en Cisjordanie au cours de laquelle 12 Palestiniens ont été tués ainsi qu'un soldat israélien.

Dans le camp de réfugiés de Jénine, « les Israéliens nous ont donné deux heures pour partir »

Des habitants fuyant le camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie en plein milieu d'un raid israélien, le 4 juillet. Ronaldo Schemidt/AFP

« Tout a commencé vers 1 heure du matin, lundi. J’étais dans ma chambre, j’allais me coucher. Mes trois enfants âgés de 10 à 15 ans dormaient dans la leur. Tout à coup, un énorme bruit nous a fait sursauter. Je me suis levée pour regarder par la fenêtre ce qu’il se passait. Un gigantesque nuage de fumée s’échappait d’une maison. Je ne savais pas laquelle exactement. Jusqu’à deux heures de l’après-midi, je suis restée à l’abri chez moi. Je n’osais pas sortir, j’entendais le bruit des coups de feu et les mouvements de pas à l’extérieur. Je suis seulement descendue d’un étage avec mon mari et mes enfants pour rejoindre ceux de ma sœur, qui était hors du pays, alors que mon beau-frère travaillait. Les enfants n’avaient toujours pas mangé depuis le début du raid. Je me suis mise à leur préparer un repas lorsqu'une seconde explosion aussi intense que la précédente a retenti dans l’habitation d’à côté. Toute la maison a tremblé. C’était la panique. On est sortis de chez nous en courant pour aller chez un de mes oncles, un peu plus loin dans le camp, pensant qu’on y serait à l’abri. Sur la route, j’ai vu certains de mes voisins blessés.

On est restés là jusqu’en fin d’après-midi avant qu’un autre bombardement ne tombe à proximité. On a fui de nouveau dans la précipitation pour nous réfugier chez un autre parent. Plusieurs familles étaient rassemblées dans la maison, peut-être une cinquantaine de personnes. C’était relativement calme, les enfants allaient mieux. Puis un bombardement a encore frappé. Tout le monde hurlait, les enfants ont éclaté en sanglots, je récitais le Coran. Pris de panique et de peur, mon fils a commencé à se sentir mal. J’étais tellement angoissée que j’ai commencé à avoir des spasmes. On est restés là jusqu’à 21 heures, jusqu’à ce qu’on soit obligés d’évacuer le camp. Les Israéliens nous ont donné deux heures pour partir en nous disant qu’ils s’apprêtaient à bombarder toutes les maisons. Ils ont fait passer le message à un quartier en le chargeant de l’ébruiter. On est partis à pied. Les rues étaient remplies de débris en tout genre. On marchait sur des bris de verre de fenêtres éclatées au sol. On a porté mon oncle qui ne pouvait pas marcher, alors que les voitures ne pouvaient plus circuler.

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Là, on s’est réfugiés à l’hôpital de Jénine, on pensait que c’était plus sûr. Des dizaines de familles de la ville et des villages voisins se sont portées volontaires pour héberger des résidents du camp. On est allés chez des connaissances dans la ville, où on se trouve toujours. Je n'ai pas pu savoir ce qu'il s'est passé depuis que je suis partie de chez moi, car tous les gens que je connais ont fui.

Je vis dans le camp de réfugiés depuis 1998. J’y étais en 2002 (lors de l’invasion israélienne du camp menée durant la seconde intifada, au cours de laquelle plus de 50 Palestiniens ont été tués en près d’une semaine d’affrontements, NDLR). L’opération commencée lundi est la plus violente à Jénine depuis des années, je n’avais jamais vu ça : l’intensité des bombardements, les destructions d’habitations, les rues entièrement délabrées. En 2002, les raids étaient concentrés dans un seul quartier. Aujourd’hui, tout le camp est pris pour cible. Mes enfants n’ont jamais été aussi terrifiés. Oui, le bruit des accrochages et des tirs leur est familier, mais c’est la première fois qu’ils voient des avions larguer des bombes sur les maisons. Avant, il y avait des raids ponctuels. Les forces d’occupation venaient pendant 2 ou 3 heures. Ou bien elles restaient aux alentours du camp où elles se heurtaient souvent à une résistance les obligeant à partir rapidement. Maintenant, elles utilisent des avions pour pouvoir rester longtemps dans le camp.

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Aujourd’hui (mardi), on est un peu moins effrayés que la veille. Les enfants ont recommencé à jouer entre eux. Des familles nous apportent de la nourriture et ce dont nous avons besoin. Mais l’angoisse nous habite encore. On ne sait pas bien dans quel état est notre maison située sur un axe principal du camp, où les Israéliens circulent tout le temps quand ils viennent à Jénine. J’ai peur d’y retourner… »

« Tout a commencé vers 1 heure du matin, lundi. J’étais dans ma chambre, j’allais me coucher. Mes trois enfants âgés de 10 à 15 ans dormaient dans la leur. Tout à coup, un énorme bruit nous a fait sursauter. Je me suis levée pour regarder par la fenêtre ce qu’il se passait. Un gigantesque nuage de fumée s’échappait d’une maison. Je ne savais pas laquelle...

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QUI SEME LE VENT, RECOLTE LA TEMPETE.... Les palestiniens recoltent ce qu ils ont seme.

IMB a SPO

20 h 55, le 05 juillet 2023

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Commentaires (1)

  • QUI SEME LE VENT, RECOLTE LA TEMPETE.... Les palestiniens recoltent ce qu ils ont seme.

    IMB a SPO

    20 h 55, le 05 juillet 2023

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