Un versement de fonds dû à l'opérateur public de télécoms au Liban, Ogero, fait actuellement l'objet d'un bras de fer entre les ministères des Finances et des Télécoms. Ces deux institutions s'accusent mutuellement de manquement concernant ces fonds, alors que le risque d'un arrêt total des centraux d'Ogero continue de planer sur le pays, faute de fonds pour acheter du carburant, entretenir les centraux et payer les employés.
Selon une source au ministère des Finances, le versement a été effectué le 2 mai, mais le ministre des Télécoms n'a pas entrepris les démarches nécessaires auprès de la Banque du Liban (BDL) afin de débloquer les fonds. De son côté, le ministre sortant des Télécoms, Johnny Corm, rejette cette responsabilité en invoquant des complications légales découlant d'une loi budgétaire adoptée en 2019, dans des propos accordés à L'Orient-Le Jour.
Le problème de fonds d'Ogero avait été soulevé fin mai, lorsque le directeur général de l'organisme avait déclaré que 30 stations risquaient de s'arrêter dans les prochains jours, faute de diesel pour alimenter les infrastructures. Depuis, de nombreuses stations de transmission ont cessé de fonctionner.
Un simple appel téléphonique
D'après la source au ministère des Finances, le déblocage du paiement ne nécessite qu'un appel téléphonique à la BDL et "c'est au ministre des Télécoms de justifier pourquoi il ne l'a toujours pas fait". "De notre côté, la procédure a été accomplie dès le début du mois", ajoute-t-elle.
Mais pour Johnny Corm, la situation est plus compliquée que cela et est liée à la suppression d'un poste au sein du ministère, dans le cadre du budget 2019, celle du "comptable principal". Ce dernier était chargé de signer les procédures nécessaires pour débloquer les fonds, afin qu'ils soient envoyés sur le compte du ministère. Mais en l'absence d'un tel responsable, il n'est pas clair de savoir qui est chargé de cette fonction.
M. Corm dit avoir demandé, lors du Conseil des ministres du 27 février 2023, "de revenir à la situation d'avant 2019", en nommant à nouveau un comptable principal "afin de résoudre cette affaire". "Cependant, j'ai été informé que cela serait anticonstitutionnel, parce qu'une loi ne peut être annulée que par une autre loi, pas par une décision ministérielle", a-t-il ajouté. "Pendant ce temps, depuis novembre 2022, nous n'avons toujours pas reçu les fonds alloués à l'entretien d'Ogero. Nous nous débrouillons donc avec les moyens du bord et nous contractons des dettes pour pouvoir continuer à fonctionner", a déploré Johnny Corm. Il évoque notamment un contrat d'entretien avec Ogero signé en décembre 2022 et dont les fonds n'ont toujours pas été débloqués. "J'attends une réponse du département de la législation et des consultations au sein du ministère de la Justice qui doit arriver demain (mardi) afin de déterminer la légalité du rétablissement de la fonction de comptable principal, ce qui permettrait de finaliser ce paiement", a précisé le ministre sortant. "A l'oral, ce département m'a confirmé que cette démarche serait légale", a-t-il ajouté.
Attention aux "fake news"
Contactée par L’OLJ, une source au sein d'Ogero s'est abstenue de commenter la polémique entre les deux ministères.
Revenant sur des informations circulant sur les réseaux sociaux concernant les risques d'un arrêt total des services d'Ogero si le paiement n'était pas débloqué dès lundi, cette source a qualifié ces rumeurs de "fake news". "Aujourd'hui (lundi), la journée a suivi son cours régulier au sein d'Ogero, avec une activité normale", assure-t-elle. "Une panne survenue dans l'un de nos centraux partagés avec les opérateurs de téléphonie mobile Touch et Alfa a entraîné une interruption temporaire des services internet pendant quelques heures. De telles pannes sont malheureusement courantes étant donné que nous opérons plus de 300 centraux", a-t-elle poursuivi, dénonçant des "individus mal intentionnés qui ont lancé des rumeurs infondées selon lesquelles nos services seraient complètement interrompus d'ici la fin de la journée, créant ainsi une atmosphère de panique et de confusion".
La source n'écarte toutefois pas un possible black-out si des fonds ne sont pas débloqués par les autorités pour approvisionner les centraux.
commentaires (5)
Je pense effectivement qu'il y a du foutage du monde. Si le fonction a été supprimée en 2019, comment le Ministère et Ogero ont survécu 3 ans sans un kopec?
Moi
10 h 07, le 13 juin 2023