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Moyen-Orient - Elections en Turquie

Doit-on s’attendre à des violences post-électorales en Turquie ?

A quelques jours du scrutin, de nombreux médias étrangers craignent que le président turc ne rejette les résultats électoraux en cas de défaite.

Doit-on s’attendre à des violences post-électorales en Turquie ?

Des partisans du président turc Tayyip Erdogan assistent à un rassemblement avant les élections du 14 mai à Ankara, Turquie, 11 mai 2023. Photo Cagla Gurdogan/Reuters

A quatre jours du scrutin, Muharrem Ince vient de se retirer de la course à la présidence turque. Se présentant comme une troisième voie entre le président-candidat Recep Tayyip Erdogan et le candidat de l’opposition Kemal Kiliçdaroglu, le chef du Memleket Parti avait ainsi mis des bâtons dans les roues de l’alliance anti-Erdogan, rendant un second tour presque inévitable. Avec ses 2 à 4% d’intentions de vote, le retrait de M. Ince pourrait bénéficier au candidat de l’opposition à la tête du Parti républicain du peuple (CHP), au coude à coude avec son rival dans les sondages. En cas de défaite du président au pouvoir depuis deux décennies, nombreux sont ceux qui à l’étranger craignent sa réaction : manifestations violentes de la part de ses partisans, contestation de la véracité des résultats ou du processus électoral… D’aucuns semblent prédire que la transition - s’il elle a lieu - ne se fera pas aussi paisiblement que le processus démocratique le voudrait.

Les déclarations ministérielles du gouvernement actuel font effectivement penser que le Parti de la justice et du développement, l’AKP de Recep Tayyip Erdogan, prépare le terrain pour contester une éventuelle défaite. Cherchant à décrédibiliser l’opposition, le ministre de l’Intérieur Suleyman Soylu a partagé le 28 avril dernier sur son compte Twitter un entretien télévisé dans lequel il pointe du doigt le soutien du président américain Joe Biden à Kemal Kiliçdaroglu en cas de victoire, dénonçant « une tentative de coup des Occidentaux ». Le 7 mai, pendant sa visite à Erzurum, le populaire maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, issu du CHP, a été la cible de jets de pierre provenant de partisans de l’AKP. Des actes qui n’ont pas été condamnés par Recep Tayyip Erdogan : Suleyman Soylu a même rejeté la faute sur l’opposition, qui selon lui a provoqué les heurts en organisant cette visite sans autorisation officielle. La préoccupation dont se font l’écho les médias occidentaux est donc « sérieuse », affirme Howard Eissenstat, chercheur non résident au Middle East Institute, notamment car « les services de sécurité sont fortement politisés ».

Forte tradition électorale

Mais pour Ragip Soylu, chef du bureau Turquie du Middle East Eye basé à Ankara, les discours sur une contestation des résultats électoraux par l’AKP dans l’éventualité d’un revers ne se retrouvent que dans les médias occidentaux. La plupart des médias turcs, comme TRT World, Hurriyet Daily News ou le Daily Sabah, ne mentionnent pas cette possibilité, analysant davantage le paysage électoral, la place des jeunes dans celui-ci, les chances de succès des différents partis, l’effervescence de la Turquie à l’approche du scrutin et les évolutions des campagnes. Le média turc pro-gouvernement Daily Sabah a été jusqu’à accuser les médias occidentaux, comme le Washington Post, Le Point, Der Spiegel et Foreign Policy, d’être excessivement biaisés dans leur critique de Recep Tayyip Erdogan, et de fomenter ainsi la victoire de l'opposition.

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« Il est clair que la censure joue un certain rôle, du moins en ce qui concerne la presse traditionnelle », affirme Howard Eissenstat. Car les médias turcs sont rarement indépendants, et beaucoup d’entre eux sont contrôlés par le gouvernement actuel. Une loi passée au Parlement le 27 mai 2022, intitulée « désinformation et infox » menace de trois ans de prison tout journaliste ou citoyen turc qui publie ou poste des « fausses » informations qui pourraient causer la peur, la panique, ou une menace à la sécurité nationale. Cette loi a souvent été dénoncée comme un moyen pour le gouvernement de contrôler le paysage médiatique et de museler les potentiels trouble-fêtes.

Mais Howard Eissenstat souligne en outre que la tradition turque du respect du processus électoral peut aussi expliquer la différence de couverture médiatique. « Les élections turques sont presque sacro-saintes », explique le chercheur, qui ajoute que « personne n’a jamais contesté une élection nationale ». L’histoire récente autorise tout de même à envisager l’éventualité d’une remise en question des résultats par l’AKP. En 2019, lors des élections municipales, le parti présidentiel avait exigé un recomptage des votes après avoir perdu les mairies d’Istanbul et d’Ankara, criant à la fraude et provoquant la tenue d’un second scrutin à Istanbul. « Personne ne sait ce qui se passera si l'opposition gagne dimanche... peut-être même pas Erdogan », avance Howard Eissenstat. Kemal Kiliçdaroglu a néanmoins appelé mardi ses électeurs à ne pas célébrer dans les rues une éventuelle victoire au premier tour et à « rester à la maison », prévenant de potentielles « provocations » des partisans de son rival.

A quatre jours du scrutin, Muharrem Ince vient de se retirer de la course à la présidence turque. Se présentant comme une troisième voie entre le président-candidat Recep Tayyip Erdogan et le candidat de l’opposition Kemal Kiliçdaroglu, le chef du Memleket Parti avait ainsi mis des bâtons dans les roues de l’alliance anti-Erdogan, rendant un second tour presque inévitable. Avec ses 2...

commentaires (1)

Erdogan est un dur , il ne laissera pas passer ...

Chucri Abboud

17 h 15, le 12 mai 2023

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Commentaires (1)

  • Erdogan est un dur , il ne laissera pas passer ...

    Chucri Abboud

    17 h 15, le 12 mai 2023

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