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Les anti-Frangié vont-ils sortir de leur léthargie ?

La présidentielle libanaise est comme une course de chevaux. Au cours de celle-ci, la position des uns et des autres peut drastiquement évoluer. Surtout que, tant qu’aucun cheval n’a franchi la ligne d’arrivée, rien n’est joué.

Au départ de la course, les chances de Sleiman Frangié d’accéder à la magistrature suprême étaient assez faibles. Sa candidature n’était soutenue que par le tandem Hezbollah-Amal et quelques députés du 8 Mars. Insuffisant pour obtenir les 65 voix nécessaires à son élection et encore plus pour réunir le quorum de 86 députés qui requiert un minimum de consensus interne. Mais à mesure que la course avance, le candidat Frangié accélère et se place en tête du peloton, profitant de deux facteurs aussi favorables qu'inattendus. Le premier est l’appui de la France, qui considère cette option comme un moindre mal pour éviter le vide présidentiel et le chaos qui pourrait l’accompagner, et pour permettre l’arrivée d’un Premier ministre et d’un gouvernement réformateur. Le second est la double normalisation saoudo-iranienne et saoudo-syrienne. Même si le Liban n’est pas au menu (en tout cas pour le moment) de cette reconfiguration géopolitique à vitesse grand V, il est clair que le leader des Marada se sent renforcé par ces évolutions. Si l’Arabie est prête à recevoir Bachar el-Assad à Riyad, pourquoi s’opposerait-elle ad vitam aeternam à l’élection de son « meilleur ami » au Liban ?

Deux obstacles de taille se dressent encore devant la route du zaïm de Zghorta. Le flou de la position saoudienne et le veto des deux principaux partis chrétiens. Cela peut paraître considérable. Mais là aussi, les choses peuvent tourner en sa faveur.

Mohammad ben Salmane se fiche complètement du Liban. Le prince héritier considère que le pays du Cèdre n’est pas un enjeu pour le royaume et qu’il y a déjà perdu assez de temps et d’énergie. Si le réengagement saoudien, c’est-à-dire une aide financière, dépend de conditions précises, un « feu orange » à Sleiman Frangié n’est pas exclu pour autant. L’Arabie n’est pas pressée et ne voit pas d’un bon œil l’arrivée d’un nouveau président allié au Hezbollah. Mais si la France continuait d’insister et qu’aucune alternative ne se dessinait d’ici là, Riyad pourrait bien faire le service minimum. Dans ces conditions, la partie deviendrait nettement plus compliquée pour les anti-Frangié puisque le blocage ne serait plus qu’une affaire chrétienne.

Depuis le début de l’échéance présidentielle, le Hezbollah a une stratégie très claire : soutenir Sleiman Frangié, convaincre l’Arabie de ne pas s’y opposer puis, au dernier moment, trouver un compromis avec Gebran Bassil pour qu’il donne une « légitimité chrétienne » à cette élection. On peut critiquer cette approche, tout comme l’on peut reprocher à la France de lui avoir donné du crédit. Mais cela ne suffit pas. Si l’on souhaite empêcher l’arrivée au pouvoir de Sleiman Frangié, il faut construire une alternative solide et réaliste. Or aucun de ses opposants ne s’est montré capable de le faire jusqu’ici. Face au Hezbollah, les autres partis se complaisent dans la surenchère et dans l’attentisme. La stratégie consistant à voter pour Michel Moawad pouvait avoir du sens au début de la course. Mais à partir du moment où elle a montré ses limites, il était nécessaire d’en changer. Pourtant, les mêmes discussions et les mêmes noms circulent depuis des mois sans que personne ne prenne l’initiative de rallier derrière eux une majorité de voix.

Deux chemins pourraient permettre aujourd’hui de bloquer l’arrivée de Sleiman Frangié à Baabda. Le plus court, et le plus compliqué, suppose une entente entre Samir Geagea et Gebran Bassil. Si les deux plus grands partis chrétiens trouvent un compromis autour d’un candidat, ni le Hezbollah ni les puissances étrangères ne pourront imposer l’élection du leader des Marada. Cela semble toutefois peu probable. Et pour cause : à l’ombre de la présidentielle, se joue entre ces deux-là une autre bataille tout aussi importante, celle du leadership sur la scène chrétienne. Samir Geagea considère que c’est son opposition au Hezbollah qui lui a permis de gagner du terrain face à son rival aouniste au cours de ces dernières années et ne veut rien lâcher. Gebran Bassil est pour sa part tenté par une alliance, mais à condition de jouer à nouveau les premiers rôles lors du prochain mandat, condition inacceptable pour une large partie du spectre politique. Chat échaudé craint l’eau froide.

Le second chemin nécessite le ralliement d’une majorité de voix derrière un autre candidat. Cela suppose de trouver une personnalité qui permette de convaincre tous les députés (contestation, anciens haririens, « gris ») qui ne sont pas dans le camp du Hezbollah mais qui ont refusé lors des précédentes séances parlementaires de voter pour Michel Moawad. Il ne pourra pas être élu, mais cela prouvera à la communauté internationale qu’une alternative solide existe. Là aussi, la tâche est compliquée. Mais la fenêtre de tir existe tant que l’Arabie saoudite n’a pas donné son feu vert à Sleiman Frangié. Après, il sera trop tard.

Sur le plan politique, le Hezbollah est plus désarmé qu’il n’y paraît, d’autant plus depuis sa brouille avec Gebran Bassil. Mais le parti de Dieu est fort de la faiblesse de ses adversaires. Au lieu de profiter de cette opportunité de transformer le rapport de force en leur faveur, la plupart des anti-Hezbollah se contentent de slogans faciles et de calculs d’épicier. Si Sleiman Frangié s’installe à Baabda, ce ne sera pas uniquement de la faute du Hezbollah (qui fait ce qu’il a à faire) et de la France, mais aussi de tous ceux qui ont regardé la course de loin sans essayer sérieusement d’y participer.

La présidentielle libanaise est comme une course de chevaux. Au cours de celle-ci, la position des uns et des autres peut drastiquement évoluer. Surtout que, tant qu’aucun cheval n’a franchi la ligne d’arrivée, rien n’est joué.Au départ de la course, les chances de Sleiman Frangié d’accéder à la magistrature suprême étaient assez faibles. Sa candidature n’était soutenue que...

commentaires (10)

Pour l’opposition : la balle se trouve entre les mains de M Michel Mouawad. Ils devrait informer l’opposition qu’il retire sa candidature aux élections présidentielles. À partir de là, l’opposition sortira de sa léthargie et devra OBLIGATOIREMENT se trouver un candidat choisi par les chrétiens et qui aura l’aval des sunnites et de toutes les parties libanaises. Une fois fort par le biais de ce nouveau candidat, les opposants pourront contrer la désignation du candidat franjieh. Ceci dit, sans pour autant s’allier sur le moyen terme. Le CPL et FL ainsi que Kataeb, PNL et nouveaux députés devraient se mettre d’accord sur un candidat. Pas la peine que GEAGEA et BASSIL se parlent. Chacun des 2 possède des conseillers et des représentants qui pourraient négocier et se mettre d’accord ( avec l’accord des 2 patrons de ces 2 partis. Ainsi FL et CPL auront un seul candidat sans pour autant GEAGEA ou BASSIL n’aient à se rencontrer. On s’en tape de leurs egos. L’important est que leurs voix s’unissent , au moins pour cette échéance qui bloque tout le pays. En ne faisant rien, GEAGEA et BASSIL facilitent la tâche à ceux qui voudraient islamiser le liban en supprimant le poste de président chrétien de cette république libanaise

LE FRANCOPHONE

22 h 18, le 29 avril 2023

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Commentaires (10)

  • Pour l’opposition : la balle se trouve entre les mains de M Michel Mouawad. Ils devrait informer l’opposition qu’il retire sa candidature aux élections présidentielles. À partir de là, l’opposition sortira de sa léthargie et devra OBLIGATOIREMENT se trouver un candidat choisi par les chrétiens et qui aura l’aval des sunnites et de toutes les parties libanaises. Une fois fort par le biais de ce nouveau candidat, les opposants pourront contrer la désignation du candidat franjieh. Ceci dit, sans pour autant s’allier sur le moyen terme. Le CPL et FL ainsi que Kataeb, PNL et nouveaux députés devraient se mettre d’accord sur un candidat. Pas la peine que GEAGEA et BASSIL se parlent. Chacun des 2 possède des conseillers et des représentants qui pourraient négocier et se mettre d’accord ( avec l’accord des 2 patrons de ces 2 partis. Ainsi FL et CPL auront un seul candidat sans pour autant GEAGEA ou BASSIL n’aient à se rencontrer. On s’en tape de leurs egos. L’important est que leurs voix s’unissent , au moins pour cette échéance qui bloque tout le pays. En ne faisant rien, GEAGEA et BASSIL facilitent la tâche à ceux qui voudraient islamiser le liban en supprimant le poste de président chrétien de cette république libanaise

    LE FRANCOPHONE

    22 h 18, le 29 avril 2023

  • La France a d’autres problèmes et qui laisse tranquille le Liban , un fiasco entre Macron et XI XI , Macron laisse tomber Frangié…

    Eleni Caridopoulou

    19 h 11, le 29 avril 2023

  • Malgré ce que vous dites, les Saoudiens sont les seuls à pouvoir sortir le pays de l'inter de la moumanaa. Ils ont encore des,principes chose que la France a complètement mis de côté

    Nouna Chidiac

    17 h 43, le 29 avril 2023

  • .les seuls dans l'avenir à pouvoir aider les libanais à remonter la pente sont essentiellement les saoudiens. Donc ils ne s'en foutent pas du Liban et ne veulent pas de Frangieh , malgré ce que vous dites. Heureusement qu'ils soient encore à croire à quelques principes . Ch ose que la France a complètement oublié

    Nouna Chidiac

    17 h 42, le 29 avril 2023

  • MONSIEUR SAMRANI, AVEC TOUTE MON ESTIME, VOTRE PRONOSTIC EST FAUX. SACHEZ QUE L,AIDE, ET PRETEUR ET INVESTISSEUR ET RECONSTRUCTEUR DICTE LES CONCESSIONS A FAIRE A SES EMPRUNTEURS ET NON LE CONTRAIRE. VOUS ETES PARTI D,UNE SUPPOSITION FAUSSE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 21, le 29 avril 2023

  • On a beau dire, c’est à cause de la visite de Macron après la catastrophe du port que les fossoyeurs ont trouvé en lui un partenaire à l’écoute pour les remplumer. Le jour où Macron comprend qu’on ne peut pas être à la fois le chef et l’arbitre nous serons sauvés. En attendant, les libanais devraient se montrer intransigeants et s’activer à faire le ménage dans leurs administrations sans tarder. Peut être trouveront ils des alliés pour répondre à leurs exigences de livrer tous les corrompus traitres sans état d’âme. Nous avons vu qu’une victoire, aussi minime soit elle, peut dynamiser le peuple. Alors pourquoi ne pas les démultiplier pour montrer aux vendus que nous ne sommes pas près d’abdiquer ni nous résigner jusqu’à récupérer notre souveraineté et notre indépendance. Le courage est comme la peur, ils sont contagieux. Pour cela,nous devons nous montrer fermes et décidés à lutter contre tous les pays qui se croient légitimes de décider à notre place et ce, quelque soit leur motivation et leurs intérêts. Seul celui de notre pays devrait primer. Macron essaie d’éviter la moralisation de notre problème, lui préférant le manichéisme et le cynisme qu’on lui connaît lorsqu’il s’agit de boucler une affaire à son avantage. Dans le cas présent, son but étant d’assurer le lendemain et de ne pas fâcher ses futurs partenaires économiques, aux dépens des libanais. Il le fait sans l’ombre d’une honte ni remise en question quand aux conséquences de ses actes. Dire que j’ai cru en lui

    Sissi zayyat

    12 h 01, le 29 avril 2023

  • Mohammad ben Salmane se fiche complètement du Liban et considère, à juste titre que le Liban est inintéressant pour le royaume... Nos dirigeants devraient cesser ce nombrilisme, persuadé qu'ils sont en entretenant cet égocentrisme que le monde s'intéresse au Liban, davantage sources d'ennuis que de satisfactions... Les saoudiens n'en ont cure de savoir qui et comment l'on élira un président, ce qui leur importe c'est de cesser le flux constant des produits illicites que l'on exporte chez eux, avec la complicité active des syriens et du hezbollah. Et à trop vouloir camper dans des positions absurdes, au nom d'intérêts personnels, les partis chrétiens, une nouvelle fois seront les dindons de la farce, avec à la tête du pays un président aux ordres du part de dieu et de la syrie...

    C…

    11 h 43, le 29 avril 2023

  • Voilà une analyse logique, à bon entendeur salut.

    Sarkis Dina

    09 h 36, le 29 avril 2023

  • Monsieur Salrani, vous oubliez une chose essentielle, tous les politiciens que vous nommez dans votre article net et précis, tous sans exception, sont des incompétents, des orgueilleux et des incapables. Selon vous, comment le Hezbollah a pu avoir la mainmise sur le pays? Grâce à ses armes ou à cause de la bêtise de ses adversaires. Les leaders chrétiens tous bords confondus sont les champions absolus de la bêtise en politique

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 53, le 29 avril 2023

  • Souvent ce n’est que devant l’imminence d’un danger mortel pour tous que les bonnes volontés finissent par s’unir. Nous pouvons espérer ainsi que devant la menace Frangié ceux qui ont refusé de voter Moawad le fassent désormais, à défaut de s’accorder sur un autre nom. Ceux qui ne le feraient toujours pas pourront alors être considérés comme des traîtres et des fraudeurs envers leurs propres électeurs. Ce sera alors un DEVOIR pour les authentiques patriotes de dénoncer la fraude et demander des législatives anticipées sur la base d’un candidat présidentiel à déclarer obligatoirement pour chaque liste.

    Citoyen libanais

    08 h 19, le 29 avril 2023

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