Rechercher
Rechercher

Idées - Point de vue

Sécurité alimentaire dans la région arabe : il est encore possible de changer la donne

Des agriculteurs dans la vallée de la Békaa au Liban. Photo João SOUSA

Alors qu’elle déploie des efforts pour mettre un terme à la faim, à toutes les formes de malnutrition et garantir à chacun l'accès à une alimentation saine, idoine et abordable, la région arabe est confrontée à des défis sans précédent. Une situation due à de multiples défis et facteurs que les pays arabes ne peuvent contrôler et dépassent leurs actions. Les conséquences de ces défis et facteurs accablent la population et ont obligé les gouvernements à assurer une sécurité alimentaire minimale en fournissant des subventions et d'autres formes d’appui, ce qui devient un défi en soi en tant qu'outil politique compte tenu de l’exiguïté de la marge de manœuvre fiscale.

La situation actuelle ne risque pas de s'améliorer de manière significative dans un avenir proche. Les crises récentes, telles que la guerre russo-ukrainienne en cours, la pandémie COVID-19 et les effets négatifs du changement climatique, ont mis les systèmes agroalimentaires à rude épreuve et chamboulé les chaînes d'approvisionnement alimentaire dans le monde entier, y compris dans la région arabe. Celle-ci a, d’ailleurs, été l'une des régions du monde les plus touchées, principalement à cause de sa forte dépendance aux importations de produits alimentaires en provenance des marchés internationaux et de la région de la mer Noire.

Selon le rapport intitulé « Aperçu régional de la sécurité alimentaire et de la nutrition au Proche-Orient et en Afrique du Nord 2022 », publié récemment par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la région arabe représentait 7,6% du total des importations agricoles mondiales en 2020. Les pays du Proche-Orient et de l'Afrique du Nord sont parmi les plus grands importateurs de céréales au monde, et plus de 50% des besoins caloriques sont assurés par les importations alimentaires. Aux Émirats arabes unis, au Koweït, en Arabie saoudite, en Jordanie et au Yémen, plus de 80% des calories disponibles localement proviennent des importations.

Le rapport met en évidence la crise d’envergure à laquelle la région fait face compte tenu de cette situation ; le nombre de personnes souffrant de malnutrition dans la région avait atteint 54,3 millions en 2021, soit 12,2% de la population. Cela représente une augmentation de 55% par rapport aux chiffres de 2010, c'est-à-dire avant que la région ne soit foudroyée par des chocs majeurs dus à une vague de conflits et de soulèvements populaires. Le nombre de personnes souffrant d'insécurité alimentaire grave en 2021 avait été estimé à 53,9 millions, soit une augmentation de cinq millions par rapport à l'année 2020.

Les taux d'insécurité alimentaire modérée ou sévère ont également continué à augmenter, affectant négativement environ 154,3 millions de personnes en 2021, soit une augmentation de 11,6 millions de personnes par rapport à 2020. Le nombre de personnes souffrant d'insécurité alimentaire n'a cessé d'augmenter depuis 2014. En 2021, le pourcentage de la population souffrant d’insécurité alimentaire modérée ou sévère était de 34,7%. Plus de la moitié de la population arabe n'a pas les moyens de s’assurer un régime alimentaire sain.

Au premier abord, ces indicateurs et ces chiffres laissent entendre que la région arabe a peu de chances d'atteindre l'objectif de développement durable n°2, qui consiste à éliminer la faim d'ici à 2030, en plus de nombreux autres défis, notamment ceux liés au changement climatique, conflits, catastrophes et aux problèmes structurels tels que la pauvreté et l'inégalité. Toutefois, en dépit de ces chiffres alarmants, il demeure possible d'inverser la donne, de surmonter ces crises et ces défis et de retourner sur la bonne voie pour atteindre les objectifs en matière d'alimentation et de nutrition en transformant les systèmes alimentaires et agroalimentaires des pays de la région pour les rendre plus inclusifs, durables et résilients. Certains pays de la région ont, en effet, commencé à s'en rendre compte et s'efforcent de préparer leurs systèmes alimentaires et agricoles à cette transformation à travers diverses stratégies de développement agricole et rural durable.

La première étape de ce changement consiste à améliorer et à diffuser les connaissances et les technologies nécessaires, ainsi que les cadres incitatifs tels que le financement. Le renforcement de l'intégration entre les pays et du commerce intra-régional contribuerait, en outre, à réduire la facture des importations alimentaires, tout en utilisant de manière optimale les ressources locales dans les pays arabes. Cela nécessite des investissements stratégiques dans tous ces domaines, une volonté politique de haut niveau, en plus de l'élaboration de politiques claires et éprouvées.

L'importance du commerce pour garantir la réalisation des quatre dimensions de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, à savoir la disponibilité, l'accès, l'utilisation et la stabilité, ne doit pas être négligée dans notre tentative de réduire la facture des importations alimentaires. Le commerce peut contribuer à augmenter la quantité et la diversité des aliments et à réduire leurs prix dans les pays importateurs de produits alimentaires. Le commerce international est, par conséquent, essentiel pour des systèmes alimentaires diversifiés et sains dans la région.

Par Abdulhakim ELWAER, sous-directeur général et représentant régional de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pour le Proche-Orient et l'Afrique du Nord.

Alors qu’elle déploie des efforts pour mettre un terme à la faim, à toutes les formes de malnutrition et garantir à chacun l'accès à une alimentation saine, idoine et abordable, la région arabe est confrontée à des défis sans précédent. Une situation due à de multiples défis et facteurs que les pays arabes ne peuvent contrôler et dépassent leurs actions. Les conséquences de ces...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut