
Le chef de l'Église maronite Béchara Raï lors de son homélie dominicale, le 19 mars 2023. Photo ANI
Plusieurs groupes parlementaires ont répondu positivement dimanche à l'appel de Bkerké visant à réunir les députés chrétiens à une journée de "prière" à Harissa en vue de débloquer l'impasse présidentielle au Liban. Le Courant patriotique libre (CPL), les Kataëb et le bloc du Renouveau, dont Michel Moawad, candidat officiel à la présidentielle, fait partie, ont confirmé leur participation à cette "journée de prière" à laquelle le chef de l'Église maronite a convié vendredi les 64 députés chrétiens. Celle-ci se tiendra le 5 avril à Harissa, près du sanctuaire de Notre-Dame du Liban.
Délégués par Gebran Bassil, les députés aounistes Nicolas Sehnaoui, César Abi Khalil et Georges Atallah ont confirmé dimanche au patriarche la participation des élus de leur parti à cette initiative, exprimant l'espoir que cette journée sera l'occasion pour les élus de "s'inspirer des valeurs chrétiennes pour approcher toutes les échéances nationales". Le CPL était parmi les premiers à plaider en faveur d'un dialogue présidé par le patriarche Raï pour débloquer la présidentielle.
Présidentielle "purement libanaise"
De son côté, le député Élias Hankache a affirmé que les Kataëb "ne peuvent refuser un appel lancé par Bkerké, surtout s'il est lié à la présidentielle". Dans un entretien accordé au site al-Anba' publié dimanche, il a estimé que "le Liban et la région sont face à un nouveau chapitre après l'accord irano-saoudien, notamment le parti qui lie son destin à l'Iran", dans une allusion au Hezbollah. "Nous insistons sur la nécessité que cette échéance soit purement libanaise", a poursuivi le député, assurant que le parti dirigé par Samy Gemayel "est ouvert sur toutes les forces politiques".
Le député Adib Abdelmassih a lui confirmé sur son compte Twitter "sa participation (à la journée de prière) au nom du bloc du Renouveau", qui regroupe aussi Michel Moawad, Achraf Rifi, et Fouad Makhzoumi.
Aucune information n'a jusque-là filtré sur la participation des Forces libanaises (FL) et du reste des députés de l'opposition, notamment ceux issus de la contestation populaire, à la journée de prière.
Le Liban est sans président depuis le départ de Michel Aoun, le 31 octobre dernier. Selon plusieurs observateurs, la reprise des relations diplomatiques entre Riyad et Téhéran le 10 mars pourrait impacter la présidentielle au Liban. La semaine dernière, le tandem chiite Amal-Hezbollah avait officialisé son soutien au leader des Marada Sleiman Frangié, connu pour sa proximité avec le régime syrien, mais qui ne bénéficie pas du soutien des principaux groupes chrétiens sur la scène locale, à savoir les Forces libanaises (FL) et le CPL. Les groupes de l'opposition, dont certains sont proches de l'Arabie saoudite, soutiennent le député de Zghorta Michel Moawad. Certains affirment être ouverts à d'autres candidats de compromis. Le nom du commandant en chef de l'armée, le général Joseph Aoun, circule aussi pour la présidence, une fonction traditionnellement réservée aux maronites. Le chef du CPL Gebran Bassil s'oppose à ces trois noms.
Le patriarcat maronite avait récemment établi une liste d'une dizaine de candidats consensuels potentiels à la présidence, que L'Orient-Le Jour s'était procurée.
Dialogue "honnête et impartial"
Abordant l'impasse présidentielle dans son homélie dominicale, Béchara Raï a estimé que les responsables "ne peuvent exercer la politique sans dialogue honnête et impartial". Il a ainsi plaidé en faveur d'une "écoute mutuelle, un discernement de la décision à prendre sans qu'une opinion soit imposée de force et sans calculs occultes", ce qui permet d'œuvrer pour "le bien public". Pour le prélat, le fait de "ne pas assurer le bien public constitue la source des crises politiques, économiques, financières, commerciales et morales" au Liban. "C'est la raison essentielle pour laquelle la présidentielle est entravée, voire bloquée, ce qui engendre une paralysie du Parlement, du gouvernement, des ministères et administrations publiques", a-t-il renchéri, estimant que cette situation engendre "le chaos, la corruption, le délitement de l'État et l'appauvrissement des gens".
De son côté, le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth Élias Audi a regretté que les responsables soient "éloignés et en désaccord au sujet de l'élection présidentielle". Il a espéré que les députés parviendront à passer outre leurs désaccords, qu'ils trouveront un terrain d'entente, de dialogue, et parviendront à trouver une solution à une crise qui n'a que trop longtemps duré". "Tout le monde doit faire prévaloir le sauvetage du Liban sur l'accession au pouvoir, et le langage de la raison, du dialogue et de la sagesse sur l'intransigeance et les conflits", a-t-il plaidé.
Compromis national
Côté chiite, le mufti jaafarite Ahmad Kabalan, proche du Hezbollah a commenté implicitement l'appel lancé par Mgr Raï, exhortant les chrétiens au "partenariat". "Sans partenariat, le Liban n'existe pas, et le partenariat vous attend", a-t-il souligné, en apostrophant le patriarche maronite dans un communiqué. "Nous n'avons plus le temps car le Liban est au quatrième stade de l'effondrement, les services publics et les institutions sont finis ou presque (...). Le chaos, la criminalité et l'immigration sont en train de ronger le pays, alors que les risques sécuritaires sont à leurs indicateurs les plus élevés".
Accusant par ailleurs les Etats-Unis de s'immiscer dans les affaires politiques du Liban, le mufti a estimé que le pays se trouve "face à sa dernière chance" et qu'il est "tributaire d'un compromis présidentiel dont la moitié dépend d'une permission américaine" (...). "Il n'y a pas de sauvetage sans Parlement et la clé de la solution ne réside pas dans un jeu de votes, mais plutôt dans un règlement national basé sur un compromis", a-t-il ajouté. "Ce qui est requis, c'est un compromis national via le Parlement", a-t-il conclu.
commentaires (16)
Est ce que Frangieh y a été convié ? Et pourquoi attendre aussi longtemps, ces députés ne pourraient ils se libérer avant ou bien il y a une préparation spécifique qui demande du temps à la méthode de prière prévue ? Si après cela ils ne dégagent pas un président.... On pourra rappeler michel aoun pour les six prochaines années..
C…
23 h 38, le 20 mars 2023