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Moyen-Orient - Témoignages

« C’était pire que tous les bombardements qu’on a subis en Syrie »

Le séisme a fait au moins 1.000 morts en Syrie, selon un bilan toujours provisoire.

« C’était pire que tous les bombardements qu’on a subis en Syrie »

Image de désolation après l’effondrement de bâtiments dans le village de Harim, dans la région d’Idleb. Omar Haj Kaddour/AFP

Au plus fort de la guerre, Mohammad* a vécu le siège d’Alep, les bombardements intenses, un enlèvement par les forces gouvernementales et la torture. Il a survécu allant de ville en ville et vu des centaines de corps anonymes arriver aux urgences des hôpitaux dans lesquels il a travaillé. Mais cette nuit, lorsque les murs de son appartement ont tremblé en raison du séisme, a été la pire de sa vie. « Ce tremblement de terre a été plus terrible que tous les bombardements qu’on a subis depuis le début de la guerre », raconte-t-il. À quelque 60 kilomètres à vol d’oiseau de l’épicentre, la Syrie a été très lourdement affectée par le séisme de cette nuit. De nombreuses habitations fragilisées par plus de onze années de guerre, ou d’autres construites à la va-vite, sont tombées au plus fort des secousses, mais aussi plus tard dans la journée.


Mohammad, alépin d’origine déplacé dans la ville d’al-Dana, dans le Nord-Ouest syrien, près de la frontière turque, a d’abord cru à un énième bombardement. « J’ai pris les petits et nous nous sommes réfugiés dans la voiture. À cause du choc, ma femme enceinte de deux mois s’est sentie très mal. Elle est dans une maternité maintenant, et elle risque de perdre le bébé », raconte-t-il. Après s’être occupé des siens, cet infirmier s’est rendu à l’hôpital de la ville dans lequel il travaille. « On n’arrêtait pas de recevoir des blessés graves, des crânes fracassés, des jambes coupées. Et ce n’est pas terminé, il y a encore des gens sous les décombres, poursuit-il. Le pire c’est que nous n’avons pas assez de matériel médical ou de médicaments pour soigner tout le monde. »

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Les zones frontalières avec la Turquie ont été les plus touchées, le tremblement de terre causant des dommages totaux ou partiels de bâtiments dans plus de 58 villes et villages, principalement dans le Nord-Ouest syrien. Les images d’immeubles effondrés et d’habitants emprisonnés sous les décombres ont rapidement circulé dès les premières lueurs du jour.

Le séisme a fait au moins 1.000 morts en Syrie, selon un bilan toujours provisoire.

« C’est l’opération de sauvetage la plus difficile jamais vue jusque-là », déplore Mounir al-Mustafa, directeur adjoint des Casques blancs (défense civile dans le Nord-Est syrien), contacté par L’OLJ. En raison des conditions météorologiques mauvaises et du manque de moyens, les secours ne parviennent pas à atteindre toutes les villes et tous les villages touchés. « On entend des voix sous des décombres ici et là et nos équipes travaillent d’arrache-pied pour sauver ces vies. Les hôpitaux sont à leur maximum en termes de capacité d’accueil », appuie le secouriste dont l’organisation appelle à l’aide les ONG internationales, et notamment à envoyer du « matériel lourd de secours ». « Nous sommes restés des heures sous la pluie, on n’ose plus rentrer chez nous, les petits sont terrorisés », raconte Ahmad qui vit avec dix membres de sa famille dans une maisonnette d’un étage toujours en travaux. Depuis cette nuit, il n’arrive pas à oublier les visages de ses enfants en pyjama dans la rue. Des photos des victimes ont commencé à circuler sur les groupes WhatsApp et Ahmad a reconnu, bouleversé, celle d’un ami et de sa petite fille de deux ans, morts, écrasés par les fondations de leur immeuble.

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« La peur de ma vie »

Dans les zones progouvernementales, le ministère de la Santé a fait état d’un bilan provisoire de 430 morts et de plus de 1 315 blessés entre Lattaquié, Tartous et Alep. À Hama, un immeuble de huit étages où se trouvaient environ 125 résidents s’est effondré. « Il nous est arrivé des choses de ce genre, mais cette fois-là, j’ai vraiment eu la peur de ma vie », raconte Chouicar, une habitante de Homs jointe par L’OLJ. Dans la ville côtière de Tartous, la panique a également gagné les habitants en pleine nuit. « J’étais à mon poste lorsque les placards ont commencé à nous tomber dessus. Des immeubles se sont effondrés dans le quartier et on a vu des vagues hautes de plus de 10 mètres déferler », raconte Hicham*, officier de police de la ville. « Il pleuvait des cordes, c’était la panique, les gens ont sauté dans leur voiture en pyjama en direction des montagnes par crainte d’un tsunami », raconte-t-il.

À Alep, la deuxième ville du pays, au moins 46 bâtiments se sont effondrés, faisant 156 morts, selon les autorités locales citées par SANA. La Direction générale des antiquités et des musées a publié des photos sur Facebook montrant le minaret de la mosquée ayyoubide, la façade de l’hospice ottoman et des parties de la citadelle d’Alep endommagés.

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Que faire avant, pendant et après un tremblement de terre ?

Dans le quartier alépin de Azizieh, la moitié d’un immeuble de six étages où vit la famille de Maria* s’est écroulé. « Nous avons été réveillés en sursaut, secoués comme dans un manège, j’ai croisé mon voisin de palier avec une jambe cassée qui hurlait “ma famille est tombée” », raconte cette mère de trois enfants. L’épouse de ce voisin, Mirna Tenekejean, et leurs fils Alper ont été retrouvés morts sous les éboulements. « Nous sommes dévastés, sous le choc, nous avons vécu tous ensemble les affres de la guerre et cette crise qui nous consume de jour en jour », confie Maria. La partie encore intacte de l’immeuble a été évacuée par des pompiers au niveau du premier étage et les secours tentent encore de retrouver des survivants, à « coups de pelle ». « Il n’y a pas d’électricité, aucun moyen sophistiqué à cause de la situation terrible de la Syrie et du poids des sanctions économiques qui sont encore pires pour nous que les bombardements », déplore la mère de famille qui n’a plus accès à son appartement qui menace de s’effondrer à tout moment. « Je ne sais pas comment on va sauver ce qui nous reste. Des soldats russes croisés dans la rue viennent de me donner du sucre puis sont partis. Aidez-nous SVP », lance Maria désemparée. « Nous avons tous cru que la maison allait s’effondrer sur nos têtes. C’est la quatrième fois que nous sortons de chez nous en panique à cause des répliques », raconte Faya, 21 ans, de Qamishli dans le Nord-Est. Comme elle, de nombreuses personnes en Syrie ont fait état de rumeurs d’un nouveau séisme d’une magnitude encore plus importante qui aura lieu demain après-midi. « Il faut se préparer à tout, on vit un cauchemar éveillé. »

*Les prénoms ont été modifiés.

Au plus fort de la guerre, Mohammad* a vécu le siège d’Alep, les bombardements intenses, un enlèvement par les forces gouvernementales et la torture. Il a survécu allant de ville en ville et vu des centaines de corps anonymes arriver aux urgences des hôpitaux dans lesquels il a travaillé. Mais cette nuit, lorsque les murs de son appartement ont tremblé en raison du séisme, a été la...

commentaires (1)

Une façon détournée pour minimiser les effets des bombardements par barils de nitrate d’ammonium en provenance du port de Beyrouth?…

Gros Gnon

19 h 42, le 06 février 2023

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Commentaires (1)

  • Une façon détournée pour minimiser les effets des bombardements par barils de nitrate d’ammonium en provenance du port de Beyrouth?…

    Gros Gnon

    19 h 42, le 06 février 2023

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