Nadine Begdache lance un pari : bâtir un pont entre les générations

Trente ans déjà que l’œil bleu perçant de Nadine Begdache ausculte, évalue, anticipe et déniche le beau, l’intelligent, le percutant, même lorsqu’on s’y attend le moins. La directrice et fondatrice de la galerie Janine Rubeiz, l’espace culturel sis à Raouché, aussi inamovible que le rocher qui le jouxte, tourne aujourd’hui son regard vers l’avenir. Vers les artistes de demain. Et cela depuis un bon bout de temps déjà.

En réalité, dénicher les pépites fait partie de l’ADN de sa galerie, comme d’ailleurs de toutes ses semblables. Mais ce qui distingue un peu celle de Begdache, c’est d’abord sa longévité. Et, de ce fait, d’avoir pu constituer au fil des années une écurie d’artistes assez substantielle et prestigieuse. Elle en a accumulé des kilomètres au compteur, en a vu des belles arriver et des pas mûres s’en aller. Sérieuse dans sa démarche, inflexible, parfois, selon les dires de ceux qui la côtoient. Mais aussi généreuse, la main sur le cœur, juste et droite comme un I. Bref, une personnalité qui marque autant son entourage qu’elle creuse son sillon dans le paysage artistique et culturel libanais.

Un pied dans le passé et un autre dans l’avenir, comment la galerie Janine Rubeiz envisage-t-elle de célébrer ses trente ans ? « En faisant rencontrer l’ancienne garde avec la nouvelle génération », lance la doppelgänger (sosie) de Catherine Deneuve. De cette volonté de faire rencontrer les artistes connus et confirmés avec la jeune pousse est donc née l’initiative « Encouters 2023 », réalisée en collaboration avec la curatrice Manar Ali Hassan. « C’est un projet qui célèbre les 30 ans de la galerie et qui a pour objectif de lier notre héritage à notre présent », réitère Begdache.

« Achète-moi un arbre » à la galerie Janine Rubeiz jusqu’au 7 janvier 2023. Photo Michel Sayegh

Afin d’établir un dialogue intergénérationnel, de dresser un pont visant à mettre en lumière des moments phares d’expositions passées pour les faire dialoguer avec l’actualité et les nouveaux modes d’expression, la galeriste lance un appel à participation aux artistes en herbe. Les participants à ce concours, travaillant de préférence avec les nouveaux médias, sont invités d’abord à consulter la liste des œuvres d’art des artistes pionniers comme Etel Adnan, Shafic Abboud, Yvette Achkar, Huguette Caland, Joseph Chahfé, Bassam Geitani, Laure Ghorayeb, Joanna Hadjithomas et Khalil Joreige, Joseph Harb, Lamia Joreige, Samir Khaddaje, Ibrahim Marzouk, Jamil Molaeb, Zad Moultaka, Aref el-Rayess, Antonio Segui et Hanibal Srouji.

Ils devront choisir, parmi ces œuvres-là, celle qui leur parle le plus, celle dont le message résonne avec leur pensée, pour, au final, la proposer en alignement avec les considérations actuelles, la mettre à la sauce du jour en quelque sorte.

Les personnes intéressées sont invitées à soumettre des propositions sérieuses et bien réfléchies, en soulignant leur approche intentionnelle du thème, avec matériel visuel à l’appui, ainsi qu’une déclaration décrivant leur principal centre d’intérêt pour le projet. « Le matériel devra être accompagné d’une biographie, d’un curriculum vitae et d’un portfolio (si disponible), d’une lettre de motivation mettant en relief le thème de l’œuvre choisie et la raison du choix (500 mots maximum), une proposition d’œuvre d’art (500 mots maximum) et des premières ébauches, tout autre matériel (photos, vidéos, textes, croquis) jugé nécessaire », souligne la galeriste. Les propositions peuvent être présentées en arabe, en français ou en anglais. Elles doivent être inédites et présentées avant le 29 décembre. Elles seront examinées par un jury composé d’artistes, de collectionneurs, de galeristes et de critiques d’art.

La galeriste devant un accrochage de giclées sur la thématique de l’arbre. Photo Michel Sayegh

Créatifs libanais ou vivant au Liban

« Sont éligibles les créatifs libanais au début de leur carrière, quel que soit leur âge ou leur niveau d’éducation, résidant au Liban ou à l’étranger, mais aussi les créatifs de toute nationalité résidant au Liban, et en début de carrière, quel que soit leur âge ou leur niveau d’études. Les projets de groupe sont également admissibles », souligne Begdache.

Les formats artistiques peuvent varier entre les nouveaux médias (art numérique, art interactif, art internet, art virtuel et animation sur ordinateur), l’art de la performance, la photographie, l’installation/sculpture, les courts-métrages et vidéos, la peinture, le dessin ainsi que les arts interdisciplinaires et les arts sonores.

Concernant les critères de sélection, la galeriste indique qu’elle se fera en fonction de l’originalité et la pertinence de la proposition, de la discipline artistique, sans oublier la faisabilité budgétaire et logistique du projet. Les artistes choisis auront jusqu’au mois de juin pour achever leur œuvre. « Nous les accompagnerons dans leur démarche jusqu’à l’événement final », conclut Nadine Begdache, déjà curieuse des propositions à venir. Et des éventuels nouveaux talents à couver sur ses cimaises…

Envoyer par mail à : info@galeriejaninerubeiz.com (sujet : « Encounters 2023/Proposal »).

Pour tout renseignement : manar.alihassan@gmail.com (sujet : « Encounters 2023/Inquiry »).

Achète-moi un arbre

En collaboration avec Young Collectors Sale, plateforme en ligne dédiée aux nouveaux talents, la galerie Janine Rubeiz présente actuellement et jusqu’au 7 janvier 2023 un accrochage d’œuvres d’art à prix abordable sous l’intitulé « Buy Me a Tree for the Season » (Achète-moi un arbre cette saison). Et pour cause : ces toiles, sur le thème de l’arbre, sont réalisées en giclée, une technique similaire à celle de la lithographie, une impression à jet d’encre à haute définition produisant des œuvres de belle facture et à un budget plus abordable. La galerie propose en l’occurrence ici des giclées de Hussein Madi, Nabil Nahas, Mohammad el-Rawas et Hannibal Srouji, entre autres.