Rechercher
Rechercher

Lifestyle - Liban Pop

John Achkar, « maronite, divorcé et vacciné »

Pour cet artiste francophone, l’un des rares dans ce domaine au Liban, le stand-up est un art qui permet, dans la bonne humeur, de montrer toute sa vulnérabilité.

John Achkar, « maronite, divorcé et vacciné »

John Achkar, un des rares comédiens libanais francophone de stand-up. Photo DR

« J’ai le traumatisme des voyages. En 2001, après les attaques du 11 septembre et que le monde était totalement terrifié, je suis allé avec ma grand-mère à Londres. J’étais petit, ma grand-mère me tenait la main. Quand nous sommes arrivés à l’aéroport de Heathrow, l’un des plus grands aéroports du monde, ma grand-mère, complètement perdue, interpelle une femme policière en lui demandant avec son anglais hésitant : « Vous police, venez ici, ici c’est Londres ? » Et la policière de répondre : « Oui Madame, c’est Londres. » Pas sûre d’avoir compris, la grand-mère insiste : « Regardez-moi bien dans les yeux, ici, Londres ? » « Oui, c’est bien Londres », répond-elle encore. Alors ma grand-mère, pour la remercier, retire une photo de saint Charbel de son sac et la lui remet en cadeau. Un geste qui fut suivi de… trois interrogatoires, une même question : « D’où est-ce que vous connaissez cet homme ? »

Voici l’un des nombreux sketches de John Achkar, inspiré donc d’une histoire vraie, et qui, malgré sa phobie des voyages, vit aujourd’hui entre le Liban et les Émirats arabes unis. Parfaitement francophone et ancien élève de Notre-Dame de Jamhour, le comédien est réputé pour être « le plus chrétien des comédiens de stand-up », « C’est comme ça qu’on me présente », raconte John Achkar qui tente, en dépeignant la société à laquelle il appartient, de casser les stéréotypes et d’effectuer un rapprochement entre les communautés libanaises, voire de construire un autre Liban. Dans ses stand-up, dont l’un est baptisé Maronite, divorcé et vacciné, il parle de son père qui conteste ses achats Aliexpress car « il faut acheter chez les chrétiens » ou qui le pousse à fermer son entreprise et à trouver un emploi à la Sûreté générale car « l’administration manque de chrétiens ». Il parle aussi de sa vie de tous les jours, des pressions sociales qui l’ont poussé à se marier et de son divorce. « Tout est puisé dans mon quotidien. Je n’invente rien sur scène. Le stand-up, c’est pour moi l’art de montrer dans la bonne humeur ses propres vulnérabilités et sa fragilité. »

John Achkar, des histoires toujours inspirées de son vécu. Photo DR

85 000 followers

Rien ne présageait que John Achkar, aujourd’hui 32 ans, deviendrait un jour comédien de stand-up. « C’était en 2011. J’étais en troisième année de sciences économiques à l’Université Saint-Joseph (USJ) et j’étais responsable de jeunes scouts. Nous étions en train d’organiser un voyage en Turquie et nous manquions d’argent. Pour collecter des fonds, j’ai tenu, dans un stand, ma première comédie stand-up », raconte-t-il. Le voyage a bien eu lieu et le jeune homme est encouragé par sa famille et ses amis à devenir comédien. Il suit divers stages, dont un stage de clowns dispensé à l’USJ, en parallèle avec ses études. Après une licence en économie, il décroche un master en relations internationales de la même université. Faisant partie d’un programme d’échange Erasmus, il se retrouve à l’Institut d’études politiques de Paris, obtient un master en gestion d’entreprise de la Singapore Management University et suit aussi des formations en gestion à l’IE Business School à Madrid. John Achkar travaille auprès de diverses organisations internationales au Liban. Il met ensuite en place des modules de coaching et décide, en 2015, d’aider sa mère, Rafka, qui avait ouvert en 1991 une petite librairie à Achrafieh. Avec elle, il transforme la librairie Everythink en papeterie, concept store et fabrique de jeux de société. Avant la crise de 2019, elle avait plusieurs branches dans Beyrouth et sa banlieue.

Lire aussi

Pour le comédien Wissam Kamal, « le rire peut sauver de tout »

Côté spectacles, John Achkar monte sur les planches du Beirut Open Space à Mar Mikhaël pour la première fois en 2017. Il continue avec Awkword, la première plateforme de la comédie stand-up au Liban, dont le théâtre KED a vu le jour dans le secteur de la Quarantaine. Entre la comédie stand-up et son concept store, il continue son bout de chemin jusqu’en 2019, année où tout commence à s’effondrer. Aujourd’hui, il partage son temps entre le Liban et Dubaï où il s’était rendu pour prospecter de nouveaux marchés pour les créations du concept store et, où, pour la première fois, il a enregistré sur Tiktok un sketch en langue anglaise qui commence par : Why Did You Come to Dubai ? destiné surtout aux expatriés de l’émirat. « C’est un sketch de 15 secondes qui a été vu par six millions de personnes et qui m’a permis, d’un coup, de passer de 7 000 à 85 000 followers », confie-t-il, réalisant alors la possibilité pour lui de travailler en langue anglaise.

Positif, créatif et ouvert à toutes les perspectives, John Achkar, qui soutient la révolution du 17 octobre, rêve de changement, d’un autre Liban non confessionnel où toutes les lois seraient respectées et où les gens seraient heureux de vivre.

Lire aussi

Pour Nour Hajjar, la scène est un « pur bonheur »

« J’ai le traumatisme des voyages. En 2001, après les attaques du 11 septembre et que le monde était totalement terrifié, je suis allé avec ma grand-mère à Londres. J’étais petit, ma grand-mère me tenait la main. Quand nous sommes arrivés à l’aéroport de Heathrow, l’un des plus grands aéroports du monde, ma grand-mère, complètement perdue, interpelle une femme...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut