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Lifestyle - Liban Pop

Pour le comédien Wissam Kamal, « le rire peut sauver de tout »

Il est monté sur les planches à l’âge de 17 ans et présente depuis plus de deux ans « Shashma », avec un succès et un plaisir continus, sans jamais lasser son public.

Pour le comédien Wissam Kamal, « le rire peut sauver de tout »

Wissam Kamal sur scène, le rire au bout des mots. Photo DR

« Quand j’étais petit, ma mère aimait beaucoup faire le ménage, à tel point que je croyais que mon prénom était “lève tes jambes du sol !” » « Tout le monde me dit que j’ai le complexe d’Œdipe, mais ma mère m’a dit que ce n’est pas vrai. » « Ma mère m’a dit que si je maigris, toutes les filles me courront après, elles l’ont fait pour me demander le numéro de téléphone de la diététicienne ! » « Le courant a été coupé, j’ai allumé une bougie, le Christ m’est apparu. Je lui ai dit que j’étais musulman. Il a baissé le disjoncteur et il est reparti. » « L’internet est tellement lent au Liban que ma mère a appris à l’utiliser très vite. » Debout sur scène, Wissam Kamal, le visage joufflu d’un enfant que tout étonne, très à l’écoute de son audience, raconte ses petites histoires le plus sérieusement du monde, dans un langage très fleuri, alors que les rires fusent dans la salle. Le comédien de stand-up a toujours voulu faire ce métier. « J’ai appris très jeune que le rire peut sauver de tout. Il faut savoir prendre du recul et avoir la capacité de rire de ses propres malheurs », déclare le plus sérieusement ce trentenaire qui est monté sur scène pour la première fois à 17 ans. Il a fait un long chemin depuis.

Wissam Kamal sur scène, le rire au bout des mots. Photo DR

Voilà plus de deux ans qu’il joue – par intermittence – le même show, intitulé Shashma (W.C) où il puise dans ses souvenirs des histoires auxquelles de nombreuses personnes s’identifient. Des histoires vécues, pas toujours faciles, des souvenirs sans doute personnels, comme le harcèlement (bullying) à l’école qu’il a lui-même subi. Le comédien parle aussi, même si c’est sur un ton humoristique, de trois autres sujets graves qui lui tiennent à cœur : la pauvreté, les ruptures amoureuses et la mort de son grand-père. Sans avoir peur d’être parfois politiquement incorrect.

Aujourd’hui, l’acteur fait partie de Awk.word, une plateforme de « stand-up comedy » créée par Dany Abou Jaoudé, Paul Alouf et Andrew Hraiz réunissant une communauté d’amateurs, parmi lesquels Chaker Bou Abdallah, Mohammad Baalbacki, Nour Hajjar, Hussein Kaouk, John Achkar et Shaden Fakih. De retour de Dubaï où il vient de se produire avec Awk.word et en pleine écriture d’un nouveau spectacle, il confie : « Jusqu’à présent, j’ai mis sur papier plus de 45 idées mais cela ne représente même pas 20 minutes de spectacle. » « Nous sommes également en train de faire une tournée dans tout le Liban. Nous avons été à Tripoli et à Zahlé. Nous voulons faire connaître cette forme d’expression à tous les Libanais », relève-t-il. Dans un pays où la comédie est souvent confinée aux chansonniers, il a appris sur le tas. « Je me souviens de l’un de mes premiers spectacles, où durant 45 minutes, l’audience n’a pas bronché, n’a pas ri, pas une seule fois, et où les spectateurs se sont contentés de me regarder. Je n’ai pas baissé les bras, je n’ai pas quitté la scène, j’ai continué jusqu’au bout… Cela m’a appris, depuis, à faire mes répétitions en présence d’un public », dit-il.

Wissam Kamal sur scène, le rire au bout des mots. Photo DR

Des liens qui se tissent

Dans la vie, Wissam Kamal est un homme transparent, authentique et sincère, qui n’a pas peur de dire les choses telles qu’elles sont. Il ne ment pas, ne se ment pas et va jusqu’au bout de lui-même. Une sincérité vite perçue et appréciée par son audience. Ses spectacles font rire ou sourire, certes, mais donnent aussi à réfléchir sur un certain nombre de choses. « Un jour, après la présentation de Shashma, une spectatrice est venue m’insulter dans ma loge. Pour elle, qui venait de perdre un être cher, on ne pouvait pas se moquer de la mort. Nous avons discuté et je l’ai revue des semaines plus tard assise au premier rang du public », raconte-t-il. « Il y a quelques jours, l’un des garçons qui me maltraitaient à l’école m’a téléphoné pour s’excuser après avoir assisté à mon spectacle », dit-il sans rancune, confiant également que cet homme aurait pu devenir son ami. À la question de savoir pourquoi il était la tête de turc des autres élèves de sa classe, il répond simplement : « J’étais le seul enfant musulman dans une école chrétienne. » Et de préciser : « J’ai appris depuis tout petit à prendre sur moi, je n’ai jamais parlé à mes parents de la maltraitance que j’ai vécue à l’école et ce n’est que récemment que je l’ai dit à ma mère. Cet incident l’a énormément attristée. » Révolté par les injustices de toutes sortes, il lutte à sa façon pour redresser les torts occasionnés par la vie. Sensible jusqu’au bout des ongles, il n’est pas près d’oublier une jeune femme sourde-muette qui assistait à son spectacle. « Je la voyais rire de mes blagues. À la fin de la représentation, je me suis approché d’elle pour comprendre comment elle avait réussi à suivre. En fait, quand j’étais en face d’elle, elle pouvait lire sur mes lèvres et quand je tournais la tête, ses amis lui expliquaient ce que je racontais. J’ai décidé d’apprendre le langage des signes et de monter un spectacle exclusivement destiné aux sourds-muets. J’ai pris des cours durant deux ans et je continuerai jusqu’à pouvoir concrétiser ce projet. »

Wissam Kamal sur scène, le rire au bout des mots. Photo DR

Durant son parcours, le traitement de ses thèmes a évolué, surtout ces derniers mois, avec la crise que traverse le pays. « Chaque sujet, même le plus simple, peut porter différents messages et dimensions, surtout quand je regarde en arrière », explique-t-il. Issu d’un milieu modeste, Wissam Kamal a dû laisser tomber de nombreux rêves, mais cela n’a laissé chez lui aucune amertume. Il a su tirer le meilleur de ce que la vie lui a offert. « Je voulais devenir médecin, mais ma famille n’avait pas les moyens de subvenir à mes besoins à l’université. Il fallait donc que je travaille pour me faire de l’argent de poche et pour soutenir les miens. J’ai donc choisi une autre voie. J’ai suivi des cours de cinéma qui me laissaient le temps de travailler », confie-t-il. À trente ans passés, Wissam Kamal travaille dans une boîte de production, mais rêve de pouvoir être comédien à temps plein. Et ce rêve-là, cet espoir, il n’est pas près de le lâcher.

« Quand j’étais petit, ma mère aimait beaucoup faire le ménage, à tel point que je croyais que mon prénom était “lève tes jambes du sol !” » « Tout le monde me dit que j’ai le complexe d’Œdipe, mais ma mère m’a dit que ce n’est pas vrai. » « Ma mère m’a dit que si je maigris, toutes les filles me courront après, elles l’ont fait pour me demander le...

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