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Économie - Carburant

La « vraie » levée des subventions sur l’essence est enclenchée

Certains importateurs s’attendent à ce que la BDL diminue à un rythme hebdomadaire le ratio de dollars qu’elle échange au taux de Sayrafa.

La « vraie » levée des subventions sur l’essence est enclenchée

Une station-service désaffectée près de Bouar, dans le Kesrouan. Photo P.H.B.

Partiellement maintenues avec une voilure réduite malgré l’annonce de leur levée depuis presque un an, les subventions sur l’essence qui permettent de mitiger la hausse des prix des 20 litres d’octane 95 et 98 semblent en passe d’être définitivement et totalement supprimées dans un Liban en crise dont la monnaie s’effondre au même rythme que l’économie.

Une tendance confirmée par les filières d’importation et de distribution, en l’absence d’annonce officielle de la part des autorités, et qui a des airs de déjà-vu. L’été dernier, les autorités libanaises avaient en effet entamé cette levée. En octobre 2021, elles avaient annoncé que les prix des carburants, jusqu’ici subventionnés par la Banque du Liban, allaient être peu ou prou alignés sur le taux dollar/livre du marché, qui était alors à 21 000 livres pour un dollar, bien moins que les quelque 34 000 actuels, mais déjà loin de la parité officielle de 1 507,5 livres.

L’État avait dû ensuite temporiser quelque peu, mais sans changer de cap, face à la grogne provoquée par la hausse des prix liée à l’effondrement continu de la monnaie nationale mais aussi des cours mondiaux du brut, elle aussi soutenue depuis fin 2020. Et si, depuis plusieurs mois, les prix des bonbonnes de gaz et du mazout destiné aux générateurs privés fluctuent bien en fonction du marché, ceux de l’essence bénéficient encore d’un dernier lambeau de subventions assurées par la Banque du Liban (BDL). Ce mécanisme permet de mitiger les variations de prix liées à celles de la livre.

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Jusqu’à maintenant, la BDL garantit encore un ratio de dollars sur les factures des importateurs d’essence qu’elle consent à fournir au taux de sa plateforme Sayrafa, qui est généralement inférieur de quelques milliers de livres à celui du marché (27 200 livres hier soir), le reste devant être fourni par les intéressés. Remonté à 100 % en mars dernier, ce ratio est passé à 85 % en juillet, puis 70 % la semaine dernière et enfin 55 % au début de cette semaine.

Quinze points par semaine

Contactés, ni le porte-parole du syndicat des propriétaires de stations-service, Georges Brax, qui estime que la levée complète et définitive des restes de subventions sur l’essence était désormais acquise et imminente, ni le président de l’Association des sociétés importatrices de pétrole (APIC), Maroun Chammas, n’ont pu s’avancer sur la suite du calendrier.

Mais une source au sein de la direction de l’un des grands distributeurs de carburant du pays s’attend à ce que la BDL diminue de 10 à 15 points de pourcentage, chaque semaine et jusqu’à ce qu’il tombe à zéro, le ratio de dollars. « Passé ce cap, le prix devrait alors être fixé par le ministère de l’Énergie et de l’Eau intégralement en fonction du taux dollar/livre sur le marché, avec une marge de 1 000 à 2 000 livres », indique la source.

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Faisant écho à cette perspective, plusieurs acteurs du secteur des carburants au Liban ont réclamé hier une hausse de la marge qui leur est accordée dans les tarifs établis. Au terme d’une réunion à Hazmiyé, des représentants du syndicat des propriétaires de stations-service, de celui des propriétaires de camions-citernes et des distributeurs de carburant ont appelé, dans un communiqué commun, le ministère de l’Énergie à « augmenter la marge de profit en dollars américains » afin de pouvoir poursuivre leurs opérations, dans un texte diffusé par l’Agence nationale d’Information (ANI, officielle).

Hausse de 1 000 livres

Dans la matinée, le ministère de l’Énergie avait publié un nouveau tarif des carburants. Les 20 litres d’essence 95 et 98 octane ont très légèrement augmenté de 1 000 livres pour atteindre respectivement 592 000 et 605 000 livres, tandis que le bidon de diesel pour les véhicules a connu une hausse de 13 000 livres et se vend désormais à 710 000 livres. Le prix de la bonbonne de gaz demeure lui à 335 000 livres. Enfin, le kilolitre de mazout, utilisé notamment pour les générateurs privés – palliatif sui generis des insuffisances du fournisseur public Électricité du Liban (EDL) –, a pris 14 dollars, passant à 984 dollars – sans compter les frais de transport (597 000 livres par kilolitre). À noter que le prix des 20 litres d’essence est inférieur d’environ 100 000 livres au niveau atteint en juin, lorsque le baril de pétrole avait atteint des niveaux proches de ses records historiques (140 dollars pour le Brent et environ 1 256 pour le WTI américain). « La BDL semble avoir attendu que les cours du brut se tassent (ils évoluent actuellement en dessous de 100 dollars) pour entamer la levée définitive des subventions en minimisant l’impact sur les consommateurs », selon le distributeur anonyme précité.

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La levée entamée des subventions a enfin, et comme presque à chaque épisode similaire, coïncidé avec de nouveaux problèmes d’approvisionnement des stations-service en essence – et, de manière moins compréhensible, de certains propriétaires de générateurs en mazout. À ce propos, les propriétaires de stations-service ont critiqué le retard de publication des tarifs par le ministère de l’Énergie, « qui mène à un retard de livraison des carburants aux stations et donc à des problèmes avec les clients ». Si des solutions ne sont pas trouvées dans l’immédiat, les propriétaires de stations-service « seront contraints de prendre des mesures » de rétorsion, ont rajouté les auteurs du texte. Si Maroun Chamas assure que les quantités actuellement livrées de mazout et d’essence sont suffisantes pour les besoins du marché (près de 50 millions de litres par semaine de chaque carburant), il n’exclut pas que certains distributeurs puissent avoir décidé de ne pas vendre leurs stocks en attendant que les prix augmentent davantage. Enfin, selon le distributeur contacté, un des importateurs a vu deux de ses navires-citernes bloqués pendant une semaine en raison d’un retard de la BDL dans le déblocage des crédits, ce qui a accentué la pression sur le marché.

Partiellement maintenues avec une voilure réduite malgré l’annonce de leur levée depuis presque un an, les subventions sur l’essence qui permettent de mitiger la hausse des prix des 20 litres d’octane 95 et 98 semblent en passe d’être définitivement et totalement supprimées dans un Liban en crise dont la monnaie s’effondre au même rythme que l’économie.Une tendance confirmée...

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Tout le monde vole tout le monde. Dans un magasin de la montagne, on achète les 10 litres de gaz (Bonbonne), sur place à 360000 livres au lieu de 335000 annoncé par le ministère. Aussi, certaines stations prétendent n'avoir pas de carburants.

Esber

13 h 02, le 25 août 2022

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Commentaires (1)

  • Tout le monde vole tout le monde. Dans un magasin de la montagne, on achète les 10 litres de gaz (Bonbonne), sur place à 360000 livres au lieu de 335000 annoncé par le ministère. Aussi, certaines stations prétendent n'avoir pas de carburants.

    Esber

    13 h 02, le 25 août 2022

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