« La fin justifie les moyens. » C’est ainsi que les responsables et parlementaires des Forces libanaises expliquent à L’Orient-Le Jour les propos tenus mercredi par le chef du parti Samir Geagea, qui a agité, pour la toute première fois, le spectre d’un blocage des séances parlementaires consacrées à l'élection présidentielle afin d’empêcher le Hezbollah et ses satellites d’imposer leur candidat à la magistrature suprême.« Nous nous opposerons, par tous les moyens, à l’élection d’un président issu du camp de la moumana'a » mené par le Hezbollah, a déclaré sans ambages le chef des FL lors d’un point de presse tenu à Meerab à l’issue d’une réunion du groupe parlementaire de son parti. Dans cette bataille, le leader maronite menace donc de recourir à la même arme utilisée par le parti de Dieu pour faire parvenir Michel Aoun à Baabda : le défaut de quorum. Une option qui traduirait une rupture avec le discours traditionnel des FL et de leurs alliés, principalement axé sur le bon fonctionnement des institutions.
« Dernière carte »
Pendant plus de deux ans, le Hezbollah et ses alliés ont empêché la tenue des séances consacrées à l’élection du président de la République, jusqu’au moment où la victoire de leur candidat, le général Michel Aoun, a été assurée le 31 octobre 2016. Cette démarche avait valu au parti chiite une salve de critiques de la part de ses opposants, dont les FL qui l’accusaient de violer la Constitution et de paralyser les institutions. Comment, dès lors, justifier un probable boycottage du scrutin présidentiel par le parti de Samir Geagea ? « Nous avons toujours veillé au bon fonctionnement des institutions. Mais aujourd’hui, la situation du pays est tellement dangereuse qu’il faut tout faire pour lever la mainmise du Hezbollah sur le pays », répond Gayath Yazbeck, député FL de Batroun. « Toutes les options sont ouvertes, et la Constitution n’interdit pas aux députés de boycotter l’élection présidentielle », ajoute-t-il, précisant toutefois que sa formation n’a toujours pas pris sa décision finale.
« Nous voulons empêcher le camp du 8 Mars de nous imposer le président, car nous avons vu le résultat catastrophique d’une telle expérience », souligne, de son côté, le porte-parole des FL Charles Jabbour dans une critique à l'adresse de Michel Aoun, pourtant appuyé par cette formation à la faveur de l’accord de Meerab conclu en janvier 2016. « Pour cela, tous les moyens sont envisageables, même le boycott », poursuit-il. Quelle différence donc avec la méthode du parti de Dieu ? « Entre 2014 et 2016, le Hezbollah a bloqué la présidentielle et le pays dans son ensemble pour imposer l’élection d’une personne. Alors que nous envisageons de le faire pour empêcher le maintien de la ligne politique actuelle, répond M. Jabbour. Nous rendrons donc un grand service à l'ensemble des Libanais. D’autant qu’il est désormais impossible de cohabiter au sein des institutions avec un parti doté d’un arsenal illégal. Il faut en finir avec cette dualité. »
L’option du boycottage de la présidentielle n’est pas exclue dans les cercles du reste des opposants au parti de Dieu. Mais certains d’entre eux évitent, à ce stade, de trancher la question. « Il est vrai que le fait de bloquer un pays pour faire élire Untel est une chose et bloquer pour se libérer du joug du Hezbollah en est une autre. Mais nous n’allons pas révéler nos prochaines étapes », commente Salim Sayegh, député Kataëb du Kesrouan, interrogé par L’OLJ. « Il faut que le boycottage soit notre dernière carte », dit pour sa part un député opposant qui a requis l’anonymat.
Unifier les opposants
Samir Geagea a profité de son point de presse pour réitérer son appel à une unification d’une opposition hétérogène face à un camp plus ou moins soudé derrière le Hezbollah. Un combat que le chef des FL avait défini comme une priorité au lendemain des législatives de mai dernier. Mais contrairement à ce qu’il aurait espéré, cette opposition a subi des défaites cuisantes lors des élections du président et du vice-président de la Chambre, les candidats appuyés par le parti chiite (Nabih Berry et Élias Bou Saab) ayant remporté les deux scrutins. Cela s’est reproduit au moment de la désignation du Premier ministre. À l'heure où Nagib Mikati bénéficiait de l’appui du Hezbollah et de ses alliés, garantissant presque son retour au Sérail, Samir Geagea a assené un sérieux coup aux opposants qui avaient accordé leurs violons pour soutenir Nawaf Salam, ex-ambassadeur du Liban à l’ONU et juge à la Cour internationale de justice. Une décision que les FL avaient justifiée par « le manque de sérieux du diplomate ». À quelques semaines de la présidentielle (prévue à partir du 31 août, soit deux mois avant la fin du mandat de Michel Aoun), Samir Geagea et son parti veulent éviter une réédition de ce scénario d'effritement du camp de l'opposition. Des contacts sont menés dans cet objectif. Car le camp de l'opposition « n’a pas le choix. Il doit mener la bataille autour d’un même candidat », pour reprendre les termes de Charles Jabbour. « Nous sommes pour l’unification derrière une même figure. Nous avons tiré les leçons des échéances précédentes », renchérit un député opposant.
Les contacts au sein du camp anti-Hezb interviennent au moment où, parmi les présidentiables, le nom du chef des Marada Sleiman Frangié, allié de longue date du parti de Dieu, revient en force. Et si le Hezbollah a laissé, par la bouche de son secrétaire général Hassan Nasrallah, la porte ouverte à un candidat de compromis, M. Frangié est toujours perçu comme un candidat du 8 Mars, malgré ses tentatives de rassurer le camp adverse. Il pourrait toutefois faire l’objet d'une entente élargie et bénéficier de l'appui de grandes puissances, selon plusieurs observateurs. Que feront les FL dans ce cas ? « Nous n’appuierons jamais Sleiman Frangié. D'autant qu'il ne peut être présenté comme un candidat d'entente, car il est fidèle à une ligne politique syro-iranienne et ne changera pas de cap », tranche Ghayath Yazbeck. Entre-temps, le chef du législatif Nabih Berry, grand rival de Michel Aoun, pourrait convoquer la Chambre à la première séance consacrée à l’élection d’un président durant la première semaine de septembre, apprend-on de source proche de Aïn el-Tiné. Samedi dernier, M. Berry avait déclaré qu’il ne convoquera pas à la présidentielle tant que le Parlement n'a pas voté les réformes exigées par le Fonds monétaire international. Un processus complexe qui ne pourrait pas s’achever d’ici à la fin du mois.« Il s’agit d’une façon d’inciter les députés à voter ces réformes le plus rapidement possible, avant l’arrivée à Baabda d’un nouveau président, et non de retarder l'échéance », explique un proche du président du Parlement, laissant entendre que ce dernier s’attend à ce qu’un candidat fasse l’objet d’une entente élargie, comme ce fut le cas par le passé.
commentaires (13)
LES FOURMIS SAVENT PRENDRE LES PREDATEURS PAR LE NEZ ET LES OREILLES ET LES RENDRE FOUS... JUSQU,A CE QUE MORT S,ENSUIVE !
LA LIBRE EXPRESSION
11 h 53, le 06 août 2022