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Économie - Dette

Bank of America émet ses projections concernant la restructuration des eurobonds

La banque d’investissement juge possible que l’accord définitif entre le Liban et le Fonds monétaire international ne soit conclu qu’en 2023.

Bank of America émet ses projections concernant la restructuration des eurobonds

Dans sa note aux investisseurs, Bank of America part sur deux projections distinctes concernant la restructuration des eurobonds libanais. Photo AFP

Les élections législatives ont livré leur verdict il y a un mois déjà. Pour autant, les nouveaux députés ne semblent toujours pas disposés à voter les lois que le Fonds monétaire international (FMI) a inscrites dans l’accord préliminaire du 7 avril dernier, et qui conditionnent le déblocage d’une aide de 3 milliards de dollars sur 4 ans pour financer le redressement du pays, en crise depuis 2019.

En attendant que la situation se débloque, les institutions qui observent la situation continuent d’affiner leurs pronostics en interne, à l’image de Bank of America (BoA) qui a publié une nouvelle note réservée à ses investisseurs, la seconde depuis le scrutin du 15 mai. Sans changer son fusil d’épaule, la banque d’investissement a exploré en profondeur (sur 55 pages au lieu de moins de 10 habituellement) la question de la restructuration de la dette publique en devise, et plus particulièrement les eurobonds (LEBAN-eurobonds). Le cours de ces derniers est passé en dessous de la barre des 10 cents pour un dollar la semaine dernière, une première dans l’histoire du pays. Ils se négocient uniquement sur le marché secondaire (entre détenteurs de titres) dans la mesure où l’État, en défaut depuis mars 2020, n’en émet plus de nouveaux.

Pas de restructuration sans réformes

BoA part des trois scénarios de base qu’elle esquissait dans une première note publiée en avril – avant l’accord préliminaire – et dans laquelle elle spéculait sur le degré de mobilisation de la classe dirigeante pour lancer les réformes attendues par le FMI, dépendamment de la représentation à l’issue des législatives. La banque considère de prime abord que les détenteurs d’eurobonds perdront virtuellement tout espoir de récupérer une partie de leur mise en cas de statu quo sans réformes, ou de mise en œuvre partielle de ces dernières, qui ne suffiront pas à convaincre le FMI.

Pour mémoire

Ce que Bank of America retient du verdict des législatives libanaises

Le seul scénario viable est donc celui qui passe par un accord ferme avec l’institution, ce qui suppose que les autorités libanaises adoptent plusieurs lois critiques (contrôle des capitaux, aménagement du secret bancaire, restructuration bancaire et budget pour 2022), un régime de change unifié et flottant, ou encore complètent un audit des réserves de devises de la Banque du Liban. Les autorités doivent en outre élaborer et fournir un plan de redressement, qui doit lui aussi être approuvé par le Parlement – une mouture a été adoptée par l’exécutif avant les élections. Sans mise en œuvre, ce plan n’est qu’une « feuille de route », concède BoA. Samedi, le vice-Premier ministre Saadé Chami a assuré dans nos colonnes que le FMI n’avait pas fixé d’échéance pour évaluer le dossier libanais, mais qu’il était souhaitable que les autorités parviennent à convertir l’accord préalable en programme d’assistance ferme dans les deux à trois mois. Sous peine notamment de devoir élaborer un nouveau plan de redressement intégrant les pertes engendrées par ce retard supplémentaire.

S’agissant de la restructuration des eurobonds, l’exécutif ne s’est pas fermement engagé sur un montant, se contentant de renvoyer aux négociations avec les créanciers. Concrètement, le mécanisme de restructuration implique que l’État récupère les titres sur lesquels il a fait défaut et les échange contre d’autres correspondant aux modalités – maturité, principal (montant initial) et intérêts – fixées à la suite des négociations avec les créanciers.

Deux projections

BoA part sur deux projections distinctes. La première, optimiste, considère que les dirigeants libanais seront à même de conclure un accord définitif avec le FMI en 2022. Dans ce cas, les créanciers pourraient espérer récupérer leur mise avec une décote de 72 % par rapport au principal initialement investi et les rendements qui y étaient greffés. Cela ferait osciller le prix des eurobonds renégociés entre 10 à 20 cents pour un dollar pour des nouvelles maturités allant de 10 à 20 ans avec par exemple des rendements faibles, mais amenés à augmenter avec le temps (step-up coupon), ou un prix final incluant le principal et intérêt (flat coupon).

BoA émet aussi l’hypothèse d’un accord conclu avec le FMI en 2023, une situation qui pourrait être liée à une nouvelle période de paralysie institutionnelle jusqu’à la fin du mandat présidentiel, le 31 octobre prochain. Dans ce contexte, les créanciers ne pourront pas espérer mieux qu’une décote de près de 80 %, tandis que le prix des nouveaux titres oscillera entre 7 et 14 cents, également pour des maturités de 10 à 20 ans.

Le 8 juin, l’ancien ministre du Travail et spécialiste du marché des titres de dette Camille Abousleiman avait évoqué la faisabilité d’une « offre publique de rachat » par l’État des titres émis à 12 cents pour un dollar.

Parmi les autres estimations publiées dans sa note, BoA estime que la dette en devise du pays (en comptant tous ses engagements, dont les eurobonds) a atteint 38,5 milliards de dollars à fin 2021, contre 33,7 milliards à fin 2019 (soit une hausse de plus de 5 milliards en deux ans). Elle ajoute que sans accord du FMI et restructuration, cette dette culminera à 41,6 milliards de dollars à la fin de cette année. Samedi, Saadé Chami avait indiqué que dans le plan de redressement du gouvernement, la dette totale en devise s’élève à un peu plus de 27 milliards, dont environ 2 milliards qui correspondent à des financements bilatéraux ou multilatéraux qui ne seront pas restructurés.

Le ratio dette/PIB à fin 2021 est ainsi de 360,7 %, contre 172,3 % à fin 2019. Le PIB a littéralement fondu depuis le début de la crise, passant de 53,2 milliards à 19,9 milliards de dollars selon BoA qui se base en partie sur les données fournies par le gouvernement. Une chute qui a été en grande partie provoquée par la dépréciation de la livre sur la même période (le taux de change était proche de 28 000 livres pour un dollar hier sur lirarate.org, loin de la parité officielle de 1 507,5 livres d’avant la crise).

Les élections législatives ont livré leur verdict il y a un mois déjà. Pour autant, les nouveaux députés ne semblent toujours pas disposés à voter les lois que le Fonds monétaire international (FMI) a inscrites dans l’accord préliminaire du 7 avril dernier, et qui conditionnent le déblocage d’une aide de 3 milliards de dollars sur 4 ans pour financer le redressement du pays, en...

commentaires (1)

Le rapport de la Bank of America semble traiter le problème de la faillite de l’Etat, comme un problème de mauvaise gouvernance, qu’avec un peu de théorie et de mesures techniques , apprises dans les livres d’économie et de comptabilité, tout se remettrait en place… Mais voilà, il s’agit d’un pillage organisé, par une mafia , s’adossant a une milice criminelle… Le problème est donc ailleurs.. Les élections législatives bling malheireusement pas pu extirper les mauvaises herbes , les Al Capone du pays… Seul peut-être un coup de tonnerre régional pourra le faire ?

LeRougeEtLeNoir

00 h 51, le 14 juin 2022

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Commentaires (1)

  • Le rapport de la Bank of America semble traiter le problème de la faillite de l’Etat, comme un problème de mauvaise gouvernance, qu’avec un peu de théorie et de mesures techniques , apprises dans les livres d’économie et de comptabilité, tout se remettrait en place… Mais voilà, il s’agit d’un pillage organisé, par une mafia , s’adossant a une milice criminelle… Le problème est donc ailleurs.. Les élections législatives bling malheireusement pas pu extirper les mauvaises herbes , les Al Capone du pays… Seul peut-être un coup de tonnerre régional pourra le faire ?

    LeRougeEtLeNoir

    00 h 51, le 14 juin 2022

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