
Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, le 9 juin 2022, lors d'un discours télévisé retransmis en direct. Photo AFP / HO / AL-MANAR
Dans un contexte de tensions sécuritaires et de surenchère politique autour de la délimitation de la frontière maritime avec Israël, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a assuré jeudi que la résistance pouvait "empêcher l'ennemi d'extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish", un gisement de gaz qui selon Israël fait partie de sa zone économique exclusive, mais qui selon le Liban se trouve dans des eaux contestées.
"Que possède le Liban dans cette confrontation (contre Israël)?, a demandé le leader chiite avant de répondre : "Le droit, le besoin (de richesses) et la force de l'armée et de la résistance". "La résistance possède la capacité financière, militaire, sécuritaire, logistique et humaine, d'empêcher l'ennemi d'extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish. Comment ? Ce sont des technicités", a-t-il assuré. "Aucune action de l'ennemi ne sera en mesure de protéger ce navire", a-t-il lancé en référence à l’unité flottante Energean Power, chargée d’extraire et de stocker les hydrocarbures offshore de l’État hébreu, arrivée dimanche en Méditerranée orientale. Les propos de Hassan Nasrallah sont les premiers depuis l'arrivée de l’unité flottante.
Dans son discours prononcé en direct et retransmis à la télé, le secrétaire général du Hezbollah a affirmé que "le Liban est entré dans une nouvelle phase après l'arrivée du navire. Ce qui s'est passé est une agression et place le pays dans une situation difficile qui l'oblige à prendre une décision claire", a-t-il poursuivi soulignant que le navire est là pour l'extraction et non pas l'exploration.
Le leader chiite a souligné que "dans la région, seuls le Liban et la Syrie n'ont pas le droit d'extraire leur pétrole et leur gaz sous peine de sanctions". Selon lui, "quand on parle de frontière maritime, de la zone économique et de la richesse de ces eaux qui appartiennent au Liban, cette cause doit concerner tous les Libanais, quelle que soit leur communauté et leur ligne politique". "Cette richesse appartient à tout le peuple libanais et elle est le seul espoir de sauver le Liban de sa situation difficile et le seul espoir pour un meilleur lendemain", a-t-il martelé affirmant que cette richesse devait constituer "une cause nationale" et qu'il faut la "protéger et en profiter". "Nous sommes devant une cause qui n'est pas moins importante que celle de la libération de la frontière", a-t-il encore dit.
Le secrétaire général du Hezbollah a appelé à une action rapide, affirmant "que chaque jour de retard implique une perte de richesses et d'argent appartenant au peuple libanais". "L'objectif immédiat devrait être d'empêcher l'ennemi d'extraire du pétrole et du gaz sur le champ gazier de Karish", a-t-il lancé. En réponse aux menaces de guerre lancées par l’État hébreu, Hassan Nasrallah a estimé que "ce que va perdre Israël dans n'importe quelle guerre est bien plus important que ce que le Liban pourrait perdre". "Toute bêtise que peut faire l'ennemi aura des répercussions, a-t-il poursuivi. (...) La résistance n'a pas peur de la guerre. Nous ne voulons pas la guerre, mais nous ne la craignons pas".
"Une des plus importantes raisons de la présence et la légitimité de la résistance est d'aider dans la protection du Liban", a encore affirmé Nasrallah, assurant que la "résistance ne peut rester les bras croisés face aux vol des richesses, du trésor et du seul espoir du Liban. "Elle ne restera pas les bras croisés, toutes les options sont sur la table", a-t-il encore dit. Réitérant que "tout travail d'extraction dans le champ de Karish doit s'arrêter", Hassan Nasrallah a appelé "les sociétés possédant les navires d'extraction à les retirer immédiatement ou assumer la responsabilité des dommages matériels et humains qui pourraient en découler". "Le champ de Karish est une seule ligne, et donc ce qui en sera extrait est contesté, et peu importe où est le navire et où se trouvent le forage et l'extraction. Le danger est que l'ennemi commencera à extraire dans un seul champ commun", a-t-il mis en garde.
Ces menaces interviennent alors que le Liban officiel s’apprête à reprendre les pourparlers indirects avec Israël, si le retour en début de semaine du négociateur américain Amos Hochstein se confirme.C'est dans ce cadre que le leader chiite a appelé les "trois présidents" (le chef de l’État, le président de la Chambre et le Premier ministre) à avoir une position unifiée. Après la panique liée à l’arrivée au large d’Israël de l’unité flottante Energean Power, le Liban s’active pour jouer la carte diplomatique, mais les autorités n'ont toujours pas adopté de position officielle au sujet du tracé de la frontière maritime.
Les négociations indirectes entre le Liban et Israël avaient été entamées sur la base des revendications libanaises officielles enregistrées en 2011 auprès des Nations unies, en référence au décret 6433/2011 portant sur une zone de 860 km2 délimitée par la ligne 23. Elles avaient ensuite été interrompues lorsque la délégation libanaise de négociateurs, qui était alors dirigée par le général Bassam Yassine, avait annoncé sa volonté de réclamer un droit supplémentaire sur 1.430 km2 limités par la ligne 29. Cette ligne coupe en deux le champ de Karish. Une revendication qui, pour être officialisée, nécessitait l’amendement du décret 6433. Ce qui n’a jamais été fait par les autorités libanaises. En lieu et place, elles se sont contentées d’adresser une missive officielle à l'ONU rappelant que le champ gazier de Karish se trouve dans la zone contestée et que Beyrouth "tient au respect de ses droits sur ses ressources offshore".
"Responsabilité exclusive de l'État"
S'adressant aux protagonistes qui estiment que l'amendement du décret 6433 pour réclamer un droit supplémentaire sur 1 430 km2 limités par la ligne 29 est la clé pour toute solution, le chef du Hezbollah a répondu : "Nous sommes face à un ennemi qui ne reconnaît ni le droit international ni les décisions internationales, et la seule logique qu'il comprend est celle de la force".
Le Liban a adressé lundi une invitation au négociateur américain Amos Hochstein, qui attend toujours la réponse officielle libanaise à sa proposition présentée en février dernier, prévoyant le tracé d'une frontière sinueuse sur base de la ligne 23, qui accorde au Liban une importante partie du champ d’hydrocarbures de Cana et l’autre partie de ce même champ à Israël. Par contre, elle accorde à Israël la totalité du champ de Karish, de même qu’une partie du bloc 8. M. Hochstein devrait arriver en début de semaine prochaine au Liban selon le palais présidentiel et la présidence du Parlement, bien que cela n'ait pas été confirmé par Washington.
Au sujet de ce tracé, Hassan Nasrallah a affirmé : "En tant que parti et en tant que résistance, nous ne parlons pas de frontières, ni de la ligne 23, ni de la ligne 29, ni d'une zone contestée ou non contestée. C'est l'État qui s'exprime sur ce sujet". Il a aussi réaffirmé que son parti "ne se mêle pas des négociations et n'est pas partie dans les pourparlers". Il en a profité pour accuser le médiateur américain d'être "injuste et de travailler dans l'intérêt de l'ennemi". Selon lui, les négociations relèvent de la "responsabilité exclusive de l'État". "Mais nous, en tant que résistance, avons le droit de faire le nécessaire pour collecter les informations nécessaires et nous suivrons la situation heure par heure", a-t-il ajouté.
Le chef du Hezbollah a dans ce cadre annoncé que son parti a pris "ces derniers jours la décision de constituer un dossier sur tout ce qui concerne le gaz, le pétrole, les richesses des eaux et des terres, la délimitation des frontières maritimes et la zone économique exclusive, et nous y avons ajouté tout ce qui concerne les frontières terrestres avec la Palestine occupée, le dossier des fermes de Chebaa et la partie libanaise de Ghajar".
Déjà il y a quelques jours, le numéro deux du Hezbollah Naïm Kassem avait soufflé le chaud et le froid, assurant que le Hezbollah serait prêt à passer à l'acte si l'État libanais affirmait qu'Israël viole sa frontière maritime. Après ces menaces du numéro deux du parti chiite, qui se rangeait toutefois derrière l’État avant de prendre toute décision, le Hezbollah a nommé l'ancien député Nawaf Moussaoui comme représentant du parti dans toutes les discussions sur cette affaire avec l’État libanais.
Côté israélien, les autorités tentent d'envoyer des signaux rassurants, tout en agitant la menace d'un recours à la force. Mercredi, les ministres israéliens de la Défense, des Affaires étrangères et de l’Énergie ont ainsi affirmé que la plateforme Energean power "n'extraira pas de gaz dans la zone contestée". Ils ont néanmoins affirmé que Tel-Aviv est "prêt à défendre ses atouts stratégiques".
Qu’il commence déjà à sortir de son bunker à 40 mètres sous terre pour nous prouver son courage. Au fait qui peut se terrer ainsi durant 16 ans et garder tous ses esprits? C’est médicalement impossible. Alors mabrouk a ses alliés du CPL qui le considèrent comme un véritable homme d’Etat, cela prouve définitivement aussi quel concept ils se font de l’Etat.
19 h 31, le 10 juin 2022