La politique chez nous, il y a les Iraniens qui la font et les Libanais qui en parlent. Les premiers, par la bouche de leur poulain barbu local, font miroiter des guerres gigognes assorties de victoires divines, les seconds caquettent au Parlement en pédalant dans la semoule. L’histoire vient ainsi de repasser les plats avec la réélection les doigts dans le nez d’Istiz Nabeuh, en droite ligne du jurassique. Dans cette République de peu, rien n’est plus semblable à l’identique que ce qui est pareil à la même chose…
Pauvre fauteuil ! Par 65 voix léchant le minimum syndical, ce meuble vénérable vient d’être condamné, quatre années de plus, à tutoyer la même paire de fesses agrémentées de la même raie qu’il y a 30 ans… Sans oublier les bruits qui vont avec, reflet des petites misères intimes de leur propriétaire qui du haut de son extrait de naissance est frappé du vertige des altitudes.
L’éternel tenancier de la Chambre est donc un homme heureux. Lilou Bou Saab aussi, élu dans la foulée à la fonction éminemment stratégique de vice-président et installé à la droite du Père… mais attention, une marche plus bas. Incontournable et dure loi de la hiérarchie ! Istiz Nabeuh a ensuite voulu marquer l’histoire par une giclée de pure formalité : un discours babillard, véritable pot-pourri de lieux communs brassant des niaiseries sucrées du genre aimons-nous en nous pelotant les uns les autres, avec au passage l’indispensable couche de pommade à son mentor, le tout assaisonné d’un mélange imbuvable de lutte contre la corruption, d’armement sacré et de résistance à barbe. Voilà ! La corvée est pliée, on tourne la page. Trouver du boulot par les temps qui courent n’est pas une sinécure, en revanche, c’est bel et bien une cure de ciné.
À ne pas en douter, la fanfaronnade est une marque déposée des chefs politiques libanais, avec leur façon péremptoire d’annoncer des victoires virtuelles en prenant leurs partisans pour des abrutis patentés, transis et frémissants devant chacune de leurs saillies. Certes, ils le font avec majesté, tout en s’efforçant de ne pas céder à l’envie d’en fusiller certains s’ils osaient les contredire. Le cliché est usé jusqu’à la ficelle : il suffit de transformer une raclée en triomphe. Tel est d’ailleurs le cas du Basileus, qui enchaîne les vantardises, même amputé du tiers de ses pendentifs parlementaires. D’ailleurs, il ne s’est pas gêné pour plastronner devant sa claque en lui faisant gober des couleuvres bien charnues, fraîchement sorties de sa besace. À chaque fois, on pense qu’il a touché le fond, mais il creuse encore, c’est un génie du forage, ce bonhomme.
Il n’y a pas à dire : politicien, c’est un métier !
gabynasr@lorientlejour.com
commentaires (9)
merci pour l'humour de Gaby Nasr , il est génial
Rudloff Geneviève
11 h 03, le 04 juin 2022