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Politique - Décryptage

Abbas Ibrahim à Washington, une mission à contre-courant

Abbas Ibrahim à Washington, une mission à contre-courant

Le directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim. Photo d’archives ANI

Ce n’est certes pas la première fois que le directeur de la Sûreté générale Abbas Ibrahim est officiellement invité aux États-Unis. Mais c’est sans doute la première fois que l’invitation ne lui est pas adressée par un responsable sécuritaire américain, qu’il s’agisse du chef de la CIA ou d’un autre dans le même domaine. Cette fois-ci, l’invitation lui a été adressée par la Maison-Blanche, et c’est d’ailleurs là qu’il a tenu la plupart de ses entretiens, la semaine dernière. Au moment où le monde semble plongé dans une perspective de conflits et de guerres, cette visite apparaît comme un développement à contre-courant de la tendance générale.

Les autorités américaines ont envoyé au général Ibrahim un avion spécial, et ce sont elles qui lui ont fait la réservation à l’hôtel Four Seasons à Washington, un établissement proche des centres de la décision politique aux États-Unis. C’est aussi dans cet hôtel qu’il a rencontré l’ancien Premier ministre Saad Hariri, lui aussi de passage dans la capitale américaine. Selon ses proches, Hariri avait d’ailleurs choisi sciemment cet hôtel, parce qu’il prévoyait d’avoir des rencontres avec des responsables américains. Dans l’invitation qui a été adressée à Ibrahim, les points qui intéressaient les Américains étaient mentionnés. Il y était ainsi dit que ses interlocuteurs américains souhaitaient discuter avec lui de trois dossiers, celui du Liban, à la lumière des résultats des élections législatives, celui de la Syrie, notamment autour du cas d’Austin Tice, journaliste américain disparu dans ce pays, et celui de la situation régionale en général.

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Abbas Ibrahim à Washington pour tenter de faire libérer Austin Tice, otage en Syrie

Bien entendu, le sujet principal pour les Américains est celui de leurs otages. Selon des informations parues dans la presse américaine, il y aurait actuellement six Américains portés disparus en Syrie. Mais le plus connu d’entre eux et celui auquel s’intéressent particulièrement les autorités, c’est le journaliste Austin Tice, disparu en 2012. Régulièrement, son dossier revient à la une de l’actualité, en raison des efforts soutenus de sa mère Debrah qui ne cesse de mobiliser les médias et les responsables pour obtenir des nouvelles de son fils. D’ailleurs, Debrah Tice a rencontré la semaine dernière le président américain Joe Biden, ainsi que le directeur de la Sûreté générale libanaise, dont elle a évoqué « le grand cœur ». Toujours selon des informations parues dans la presse américaine, les autorités de ce pays seraient désormais convaincues qu’Austin Tice a disparu dans les zones sous le contrôle du régime syrien et celui-ci serait le seul à être en mesure de donner de ses nouvelles. Des démarches en ce sens ont été effectuées ces dernières années, notamment pendant le mandat du président Donald Trump, mais à chaque fois les autorités syriennes opposaient aux Américains une fin de non-recevoir. Cette fois, les autorités américaines, et en particulier le diplomate Roger Carstens – chargé par le président Biden du dossier des otages américains dans le monde –, auraient décidé de faire un pas en avant et de confier officiellement la mission de négocier avec les autorités syriennes au général Ibrahim. Sur le plan politique, c’est une nouvelle étape qui commence ainsi, celle des négociations indirectes entre Damas et Washington via le Liban. Toujours selon les médias américains, Washington accorde beaucoup d’importance à la médiation d’Ibrahim, ce dernier ayant montré ses talents de négociateur et surtout sa capacité à travailler dans la plus grande discrétion, loin des clivages idéologiques et politiques.

Pendant près de cinq jours, Abbas Ibrahim a donc multiplié les rencontres dans les différentes ailes de la Maison-Blanche mais aussi au siège de la CIA où il s’est entretenu avec son chef, William Burns.

La situation libanaise après les élections législatives a été longuement évoquée, d’autant que pour les Américains, si l’issue du scrutin a certes montré qu’il y avait, au Liban, une volonté réelle de changement, celle-ci n’est pas suffisante, puisqu’au sein du nouveau Parlement, aucune majorité claire ne s’est encore dégagée. Les autorités américaines, qui ont suivi de près le déroulement de ce scrutin, sont actuellement en pleine période d’évaluation des résultats, pour pouvoir définir leur politique pour la prochaine étape. Celle-ci est en tout cas cruciale pour le Liban, avec des échéances importantes comme la formation d’un nouveau gouvernement, l’élection d’un président et le processus de négociations pour le tracé des frontières avec Israël. Dans ce contexte, Abbas Ibrahim serait-il porteur d’un message américain en direction du Hezbollah ? Pour l’instant, il n’y a aucune indication précise sur ce sujet, mais des milieux politiques proches de cette formation n’excluent pas cette possibilité, ajoutant que le général Ibrahim a, par le passé, prouvé sa crédibilité et son sérieux à ses différents interlocuteurs. Dans ce cadre, Abbas Ibrahim a fait un saut de 24 heures pour des rencontres discrètes à Genève, sur le chemin du retour vers Beyrouth. De même, il devrait se rendre fin juin à Oslo (Norvège) pour participer à un congrès international sur la médiation et la libération des otages. Ce qui consacre officiellement son rôle de médiateur et de spécialiste des questions de libération d’otages sur le plan international.

Ce n’est certes pas la première fois que le directeur de la Sûreté générale Abbas Ibrahim est officiellement invité aux États-Unis. Mais c’est sans doute la première fois que l’invitation ne lui est pas adressée par un responsable sécuritaire américain, qu’il s’agisse du chef de la CIA ou d’un autre dans le même domaine. Cette fois-ci, l’invitation lui a été adressée...

commentaires (5)

J’ai lu le titre, je me suis arrêté à “Scarlett Haddad", et j’ai zappé…

Gros Gnon

13 h 10, le 31 mai 2022

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Commentaires (5)

  • J’ai lu le titre, je me suis arrêté à “Scarlett Haddad", et j’ai zappé…

    Gros Gnon

    13 h 10, le 31 mai 2022

  • On vient nous expliquer que le pays le plus puissant du monde n’est pas capable d’exiger la libération de ses citoyens américains sans conditions, directement au petit dictateur auto-proclamé et qu’ils ont besoin des services de ses agents pour les libérer? Ça vole bas, très bas. On ne comprend plus rien à ce qui se passe dans le monde. La démocratie est devenue une tare et la dictature un atout qu’on ménage et qu’on encourage dans les quatre coins du monde. Et si ce négociateur est si fort dans les transactions de la libération des otages, pourquoi Aoun ne l’a pas sollicité pour libérer nos otages à nous, détenus par son ami de toujours et qui croupissent dans les geôles syriennes sans qu’aucun de nos politiciens ne s’en émeuve?

    Sissi zayyat

    11 h 44, le 31 mai 2022

  • S’il pouvait en profiter pour demander une aide US afin de pouvoir faire imprimer des passeports qui sont en rupture d’approvisionnement. Ceci dit, si les otages américains sont aux mains du régime Assad (ce qui est le plus probable) comment se fait il que les américains n’ont pas la force ni le courage d’imposer au petit dictateur de Damas leur libération. S’ils ne sont pas aux mains du régime, à quoi ça sert que Abbas Ibrahim discute avec ce régime ?

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 02, le 31 mai 2022

  • abbas ibrahim, un agent double officiel, est-ce que le hezbolla est au courant? je vais finir par penser que tout le hezbolla est un agent double, voir triple, irano-israelo-americain. En tout cas pas Libanais, ca on le sais depuis 1982

    Elementaire

    07 h 45, le 31 mai 2022

  • Obiden décidément donne un rôle de premier plan au no 1 du pouvoir profond néo-safavide au Liban le dénommé général Abbas Ibrahim, accessoirement soupçonné d’être complice de la plus grande explosion non-nucléaire de l’histoire. Peu après l’explosion du port de Beyrouth Emmanuel Macron était venu avec dans ses bagages un projet de « gouvernement de mission » (mission de sauvetage des kellon néo-safavides et alliés assumés ou non), là Obiden semble vouloir le concurrencer sur ce terrain. Et il est clairement à prévoir que ce tandem infernal à la tête des marchands de viennoiseries nucléaires du JCPOA s’active encore plus pour empêcher à tous prix l’émergence d’un gouvernement de majorité au Liban. Les Obiden et Maacroun du 21ème siècle ne rappellent que trop les funestes Beaufort d’Hautpoul et Des Essarts du 19ème siècle qui avaient tout fait pour soutenir le servile Dawoud Pacha contre Youssef Bey Karam.

    Citoyen libanais

    06 h 11, le 31 mai 2022

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