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Moyen-Orient - Libye

Récit d’un coup de force nocturne manqué à Tripoli

Des combats entre groupes armés rivaux se sont soldés par la mise en échec de la tentative de Fathi Bachagha de déloger le gouvernement de son rival Abdelhamid Dbeibah.

Récit d’un coup de force nocturne manqué à Tripoli

Le chef du gouvernement d’union Abdelhamid Dbeibah s’offre un bain de foule en ville tout en inspectant les dégâts, devant une nuée de photographes et caméras de télévision, après le coup de force raté de son rival. Ayman al-Sahili/Reuters

Il est trois heures du matin, mardi à Tripoli, quand les journalistes reçoivent un message des services de Fathi Bachagha annonçant son arrivée dans la capitale libyenne pour y prendre ses fonctions. Le coup de force du Premier ministre, allié de l’homme fort de l’Est, est en marche.

Deux heures plus tard, les habitants de Tripoli sont réveillés par des tirs nourris de kalachnikov et de mortier. Des combats éclatent entre groupes armés rivaux, se soldant par la mise en échec de la tentative de M. Bachagha de déloger le gouvernement de son rival Abdelhamid Dbeibah, en place depuis février 2021.

Les affrontements sont d’une ampleur sans précédent depuis l’échec en juin 2020 de la tentative du maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’Est et allié de M. Bachagha, de conquérir militairement la capitale au plus fort de la guerre civile ayant suivi la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011.

Le principal groupe armé à prendre fait et cause pour M. Bachagha est la « brigade d’al-Nawasi » qui annonce avoir participé à son entrée à Tripoli en se disant « engagée » à lui fournir « son plein soutien ».

L’Ouest libyen abrite des dizaines de milices, appelées « brigades », connues pour leurs allégeances mouvantes, qui restent très influentes et jouissent d’une certaine autonomie bien qu’elles aient été officiellement intégrées aux ministères de la Défense et de l’Intérieur.

Au même moment, M. Bachagha apparaît dans une séquence filmée dans un lieu neutre et non identifié, et affirme avoir été « très bien accueilli » dans la capitale. « Nous tendons la main à tous, même à nos opposants », assure cet ancien ministre de l’Intérieur. Plusieurs sources indiqueront plus tard qu’il se trouvait alors au QG d’al-Nawasi, en face d’un quartier des affaires central de la capitale.

Départ de Tripoli

Les combats se poursuivent jusqu’aux premières heures du jour et se concentrent ensuite devant le siège de cette milice. Les déflagrations et les échanges de tirs résonnent cependant dans toute la capitale. Les affrontements, bien qu’intenses, ont fait un mort et cinq blessés seulement, selon des sources dans les deux camps, mais provoqué d’importants dégâts matériels.

Dans une déclaration filmée, le ministre de l’Intérieur du gouvernement Bachagha appelle « toutes les forces de sécurité (...) à coopérer » pour faciliter la transition. Jusqu’à ce moment, le gouvernement rival de M. Dbeibah n’a pas encore réagi et son sort semble incertain.

Mais peu après 09h00 et plusieurs heures de combats, M. Bachagha annonce finalement son départ de Tripoli, pour « préserver la sécurité (...) des citoyens ».

Selon des médias libyens, le départ de cet ancien formateur de pilotes d’avions de chasse a été décidé lors d’une médiation menée par une brigade de l’armée de l’Ouest appelée 444. Des vidéos non authentifiées montrent le cortège de Bachagha rebroussant chemin, conspué par des combattants pro-Dbeibah.

Son rival, lui, s’offre un bain de foule en ville, inspectant les dégâts, devant une nuée de photographes et caméras de télévision, et échangeant avec des badauds.

Un passage sûr

Il limoge ensuite le puissant chef du renseignement militaire, Oussama Jouili, sans avancer de raison pour cette éviction, ainsi que le chef de la brigade d’al-Nawasi, Mustafa Gaddour.

Dans un discours en soirée, M. Dbeibah fustige l’action de son rival, parlant d’un « suicide politique » qui signe « l’acte de décès » du projet prôné par Bachagha et ses alliés. Il affirme aussi avoir donné dans la matinée des instructions pour la mise en place d’un « passage sûr » ayant permis à M. Bachagha et son cortège de partir.

Revenant sur sa nuit mouvementée à Tripoli, M. Bachagha affirme lors d’une conférence de presse mardi soir être entré dans la capitale par la route, dans un cortège de trois véhicules et qu’aucun des passagers, y compris ses gardes, ne portait d’armes.

C’est aussi par voie terrestre qu’il a quitté la capitale, en passant par une localité située à environ 380 km au Sud-Est, contournant ainsi par le Sud, Misrata, bastion de milices dont lui et M. Dbeibah sont originaires, mais qui semble s’être rangée du côté de M. Dbeibah.

Après l’échec essuyé à Tripoli, M. Bachagha compte installer provisoirement son QG à Syrte, ancien fief de Kadhafi à 450 km à l’est de la capitale.

Hamza MEKOUAR et

Rim TAHER/AFP

Il est trois heures du matin, mardi à Tripoli, quand les journalistes reçoivent un message des services de Fathi Bachagha annonçant son arrivée dans la capitale libyenne pour y prendre ses fonctions. Le coup de force du Premier ministre, allié de l’homme fort de l’Est, est en marche.Deux heures plus tard, les habitants de Tripoli sont réveillés par des tirs nourris de kalachnikov et de...

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