Raï plaide depuis Baabda pour un vote "massif" aux législatives

Le président libanais Michel Aoun a reçu en audience vendredi matin au palais de Baabda le patriarche maronite Béchara Raï. L'entretien intervient dans un contexte de rapports tendus, à la suite des critiques adressées par le cardinal à la présidence au sujet de plusieurs dossiers épineux, notamment celui de la justice et des poursuites engagées contre le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé. A l'issue de son entrevue avec le chef de l’État, le patriarche a démenti avoir abordé ces questions conflictuelles, la discussion ayant principalement porté sur la visite attendue du pape François au Liban. Il a ainsi confirmé cette visite en juin, comme l'avait fait la présidence libanaise, alors que le Vatican n'a toujours pas avancé de date. Mgr Raï a en outre exhorté les Libanais à voter "massivement" aux élections législatives du 15 mai.

Une preuve de réussite
"Nous avons félicité le président Aoun après son retour du Vatican, à l'issue d'une visite très réussie", a déclaré Béchara Raï à sa sortie du palais présidentiel. Ce déplacement avait été critiqué par les détracteurs du chef de l’État, qui lui reprochent d'avoir pris une nouvelle fois la défense du Hezbollah. Pour le patriarche maronite, "la visite du pape François au Liban en juin est une preuve de la réussite du déplacement du président Aoun au Vatican". "La nonciature apostolique prépare déjà cette visite en collaboration avec l'évêque maronite de Jbeil, Michel Aoun, et un comité national formé à cet effet, sous la supervision de Baabda", a ajouté le prélat. "A travers sa visite, le pape assure aux Libanais qu'ils sortiront de l'obscurité qu'ils vivent à tous les niveaux", a estimé Béchara Raï, croyant savoir que le pape évoquera "la démocratie du Liban, sa pluralité, mais aussi les difficultés qu'il endure, notamment au niveau socio-économique".

Lorsque des journalistes lui ont demandé s'il avait abordé avec son interlocuteur les dossiers litigieux qui les opposent, le patriarche a répondu par la négative. Il a également fait savoir qu'il a invité le chef de l’État à assister à la messe de Pâques à Bkerké.

"Le changement commence dans les urnes"
Le chef de l’Église maronite s'est en outre attardé sur la question des législatives du 15 mai. S'adressant aux Libanais, il a déclaré : "Le vote est un devoir constitutionnel. Vous ne pouvez pas rester chez vous et vous plaindre. Accordez votre confiance à ceux qui répondent à vos aspirations et qui sont capables d'opérer un changement". "Votez massivement parce que c'est dans les urnes que le changement commence", a-t-il ajouté. "Nous avons béni la révolte parce qu'elle était transcommunautaire. Mais l'heure n'est plus à couper les routes et brûler les pneus", a encore dit le patriarche, en référence au soulèvement populaire d'octobre 2019. 

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Il s'est enfin félicité de l'accord de principe signé jeudi entre le Liban et le Fonds monétaire international, afin de lancer sous conditions un programme d'assistance financière d'un montant de trois milliards de dollars sur quatre ans, pour faire face à la crise. "Le président m'a informé que le Liban s'est entendu avec le FMI sur toutes les phases de l'accord. Il a assuré que le gouvernement présentera à la Chambre les projets de lois requis, et que ce chantier se poursuivra après les élections, même si le cabinet sera un gouvernement d'expédition des affaires courantes", a déclaré le prélat.

Sur le plan arabe, le patriarche a indiqué avoir évoqué avec le chef de l’État sa visite en Égypte où il s'était entretenu en mars dernier avec le président Abdel Fattah al-Sissi. Ce dernier "s'est dit prêt à ouvrir le marché égyptien aux récoltes de pommes libanaises, et que le marché du travail est ouvert aux Libanais", selon les propos de Béchara Raï. Lors de son déplacement au Caire, le patriarche maronite avait de nouveau prôné la neutralité du Liban et son retour au giron arabe, estimant que les causes de "l'isolement" du pays sont "connues", dans une allusion implicite à l'allié du président Aoun, le Hezbollah, dont la mainmise grandissante sur le pays et l'implication dans les conflits régionaux est dénoncée par le Golfe et la communauté internationale.