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Moyen-Orient - Éclairage

Une escalade des tensions qui sonne l’heure d’une sortie de crise au Yémen

Alors qu’une vaste offensive a été lancée par la coalition militaire menée par Riyad en représailles à une attaque meurtrière sur son sol revendiquée par les rebelles houthis, les conditions semblent réunies pour trouver enfin une solution politique au conflit.

Une escalade des tensions qui sonne l’heure d’une sortie de crise au Yémen

Turki al-Maliki, porte-parole de la coalition militaire au Yémen dirigée par l’Arabie saoudite, présentant des preuves de la militarisation de l’aéroport de Sanaa durant une conférence de presse à Riyad, le 26 décembre 2021. Ahmad Yosri/Reuters

Une lueur d’espoir a jailli de cette main tendue au grand jour, peu commune dans le contexte de lutte régionale entre les ennemis jurés que sont l’Arabie saoudite et l’Iran. « Les délégués des deux nations se retrouveront bientôt à Bagdad », a annoncé le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, lors d’une conférence de presse avec son homologue irakien jeudi dernier. Le lendemain pourtant, une attaque revendiquée par les rebelles houthis au Yémen voisin, soutenus par Téhéran, tuait deux personnes dans la province saoudienne de Jizan. Si les tirs de missiles balistiques et de drones armés sont fréquents et souvent interceptés par le royaume, ils n’avaient pas fait de victimes civiles sur le sol saoudien depuis 2018, transgressant ainsi la ligne rouge définie par Riyad.

La coalition militaire au Yémen, menée par le royaume wahhabite depuis 2015 en appui aux forces gouvernementales, a donc réagi rapidement en lançant une offensive à grande échelle dans le pays. Une escalade rapide des tensions qui pourrait mettre à mal les efforts pour trouver une sortie de crise entre les deux principaux parrains de ce conflit qui dure depuis plus de sept ans.

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Au cours d’une conférence de presse donnée dimanche dernier à Riyad, la coalition a accusé des experts iraniens et du Hezbollah libanais, vidéos et photos à l’appui, de former les houthis au chargement et à l’utilisation de drones armés et de leur dicter la stratégie à adopter face aux forces gouvernementales. Dans le viseur de la vaste offensive lancée durant le week-end se trouvent ainsi les abords de l’aéroport de Sanaa, supposés abriter des rampes de lancement pour les missiles houthis de fabrication iranienne, ainsi que des camps d’entraînement rebelles. Des déclarations « ridicules et qui ne méritent même pas d’être commentées », souligne le Hezbollah dans un communiqué publié à l’occasion, alors que son implication au Yémen est la raison évoquée par l’Arabie saoudite pour le blocus imposé au Liban depuis fin octobre. Si Téhéran a toujours démenti tout soutien aux houthis autre que politique, la marine américaine a saisi la semaine dernière près de 1 400 fusils d’assaut AK-47 et plus de 200 000 munitions en mer d’Arabie, sur un bateau en provenance d’Iran et à destination du Yémen.

Solution politique

Des rumeurs circulent toutefois sur les limites de l’influence iranienne sur les groupes rebelles, comme à l’occasion de l’évacuation, à la demande des houthis, de l’ambassadeur iranien de Sanaa pour des raisons sanitaires.

Celui-ci est officiellement décédé du Covid-19 peu après son retour en Iran. Coupant court à ces bruits qui dédouaneraient Téhéran de ses responsabilités, le porte-parole de la coalition, Turki al-Maliki, a souligné que « les houthis n’ont pas le pouvoir de décision pour faire partie de la solution politique au Yémen ». Une manière de dire que les développements sur le terrain au Yémen ne sont que des monnaies d’échange pour un règlement du conflit entre les deux puissances régionales. Ce que confirme le porte-parole iranien du ministère des Affaires étrangères, Saeed Khatibzadeh, admettant que « la seule solution pour mettre un terme à la crise au Yémen est politique ».

Aussi, malgré l’escalade des tensions sur le terrain, les conditions d’une sortie de crise semblent-elles réunies entre les deux États rivaux. La priorité pour Riyad est d’en finir avec cette guerre en sauvant les meubles, notamment avant que le dernier bastion loyaliste de Ma’rib ne tombe aux mains des rebelles qui avancent sur la ville. Le coût sécuritaire, financier et en termes de réputation du conflit est trop important pour le royaume qui veut concentrer ses efforts à diversifier son économie dans le cadre de son plan « Vision 2030 », élaboré par le prince héritier Mohammad ben Salmane. Dans cette perspective, quatre cycles de pourparlers bilatéraux se sont tenus secrètement depuis avril dernier entre des représentants de la sécurité et des renseignements iraniens et saoudiens, organisés par l’intermédiaire de l’Irak. Si Riyad n’est pas allé jusqu’à la réouverture du consulat iranien à Djeddah, comme souhaité par Téhéran, le royaume a tout de même délivré la semaine dernière trois visas diplomatiques à des délégués iraniens de l’Organisation de coopération islamique, basée en Arabie saoudite. Des signes positifs qui permettent d’envisager la tenue du cinquième cycle de rencontres annoncé plus tôt, alors que le nouveau président iranien élu en juin dernier, Ebrahim Raïssi, affirme vouloir faire de « l’amélioration des relations avec ses voisins » une priorité de sa politique extérieure.

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Le dossier yéménite s’inscrit dans un contexte régional plus large, qui doit prendre en compte les négociations sur le nucléaire iranien qui ont repris lundi à Vienne dans le but de revenir à l’accord de 2015, dont les États-Unis se sont retirés unilatéralement en 2018. Comme convenu entre les parties prenantes, les dossiers des missiles balistiques de l’Iran et de ses activités régionales devraient être laissés de côté pour d’autres discussions.

Un sentiment d’incertitude domine ainsi parmi les pays rivaux de l’Iran dans la région qui, comme en 2015, ne sont pas conviés dans la capitale autrichienne. Si Israël et l’Iran brandissent la menace militaire en montrant les muscles, d’autres s’essaient à la diplomatie pour répondre à leurs préoccupations.

Le conseiller émirati à la Sécurité nationale s’est notamment rendu dans la capitale iranienne fin novembre pour envisager l’après-Vienne, notamment en cas d’échec des pourparlers. Une voie que ni Riyad ni Téhéran ne veulent emprunter sans avoir en poche la carte du conflit yéménite, prête à être dégainée.

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