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Politique - Crise gouvernementale au Liban

Mikati critique implicitement Aoun : La surenchère de certains aura des conséquences insupportables

Le Premier ministre prend la défense du gouverneur de la Banque du Liban : "On ne change pas d'officiers en cours de guerre".

Mikati critique implicitement Aoun : La surenchère de certains aura des conséquences insupportables

Le Premier ministre libanais, Nagib Mikati, le 28 décembre 2021 lors d'une conférence de presse au Grand sérail à Beyrouth. Photo Dalati et Nohra

Le Premier ministre libanais, Nagib Mikati, dont le gouvernement ne se réunit plus depuis le 12 octobre en raison d'une grave crise politique, a affirmé mardi qu'il ne démissionnera que s'il estime qu'une telle démarche pourra ouvrir une brèche dans le mur de la crise. En réponse indirecte aux appels pressant du chef de l'Etat, Michel Aoun, pour une reprise des réunions du Conseil des ministres, il a prévenu que "la surenchère de certains pourrait avoir des conséquences insupportables" sur la scène locale.

"Faille structurelle"
"Je ne démissionnerai que si j'estime que cela paverait la voie à une solution", a déclaré M. Mikati dans une conférence de presse au Sérail. "Il est vrai que le travail de l'exécutif se poursuit à travers les réunions des commissions ad-hoc pour étudier les dossiers urgents afin de les soumettre au Conseil des ministres. Mais la non-réunion du gouvernement est une faille structurelle dans l'action du cabinet", a-t-il reconnu. "Mais il est tout aussi vrai que la surenchère de certains complique davantage les choses et pourrait avoir des conséquences désastreuses", a-t-il souligné dans une réponse évidente aux appels successifs du président Aoun, le dernier en date datant de la veille.

Le cabinet de M. Mikati est paralysé depuis le 12 octobre dernier, les ministres du tandem chiite Amal- Hezbollah s'opposant à ce que le Conseil des ministres se réunisse avant qu'il ne tranche la question du sort du juge Tarek Bitar, le magistrat en charge de l'enquête sur la double explosion meurtrière au port de Beyrouth. Ce dernier est accusé par les deux partis chiites de politiser les investigations. Le Hezbollah plaide même pour la mise à l'écart du juge, alors que le mouvement Amal dit se contenter de le voir dessaisi du volet politique de l'affaire. Michel Aoun, allié de longue date du Hezbollah, réclame la reprise des réunions du Conseil, afin de tenter de sauver la dernière année de son mandat, qualifié de catastrophique par ses détracteurs. En attendant une solution à cette crise politique, le Premier ministre refuse de convoquer une nouvelle réunion de son cabinet, de crainte qu'il n'implose. A ce sujet, Nagib Mikati s'est voulu, encore une fois, très clair: "Tant qu'une composante essentielle ne prend pas part au Conseil des ministres, je ne le convoquerai pas", a-t-il lancé, dans une allusion au tandem chiite. "La relance du Conseil des ministres ne se fera pas dans le cadre d'un troc que n'accepterait pas le peuple libanais" , a encore martelé le leader sunnite. Des propos qui interviennent quelques jours après la mise en échec d'un deal politique liant le sort de Tarek Bitar aux élections législatives et à la reprise du travail du gouvernement. 

Dans un message adressé à la nation lundi soir, le président Aoun a vivement critiqué la paralysie gouvernementale, réitérant son appel à la relance du Conseil des ministres, afin de plancher sur la situation économique et sociale des Libanais, frappés de plein fouet par une crise économique inédite depuis 2019.

Le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, connu pour mener les missions de bons offices en périodes de paralysie politique, avait démenti lundi les informations ayant récemment circulé dans les médias, et portant sur une éventuelle médiation à même de relancer le Conseil des ministres. "Il n' y a pas de médiation en cours", avait-il dit lors de l'inauguration d'une nouvelle branche de la SG dans la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah.

Signature du décret sur les législatives
Connu pour sa capacité à arrondir les angles, Nagib Mikati a en outre affirmé qu'il y a "des failles qui entachent l'enquête sur le drame du port", une accusation implicite lancée à l'égard du juge Bitar. Il a toutefois réitéré l'appel à garder la justice loin des tiraillements politiques. "C'est le premier pas sur la voie de la préservation de (la bonne image du Liban), a-t-il jugé.

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Evoquant par ailleurs les élections législatives prévues en mai 2022, le chef du gouvernement a rappelé qu'avec les réformes économiques et le vote du budget pour l'année en cours, le scrutin figure au centre des missions de son équipe. Il a dans ce contexte annoncé avoir apporté mardi matin son contreseing au décret de convocation du collège électoral émis la veille par le ministre de l'Intérieur. "Ce matin même, j'ai signé le décret de convocation du collège électoral qu'a paraphé le ministre de l'Intérieur lundi", a-t-il dit. Il a ensuite estimé que le chef de l'Etat fera de même, dans la mesure où la date du 15 mai - fixée pour l'échéance - "est le fruit d'une entente avec le président". 

Lundi, le ministre de l'Intérieur, Bassam Maoulaoui, a signé le décret de convocation du collège électoral pour les législatives, fixant la date du scrutin au 15 mai 2022, contrairement à des amendements de la loi électorale approuvés en octobre par le Parlement et qui prévoyaient le 27 mars comme date pour les élections. Cette date était toutefois contestée par le chef de l'Etat, Michel Aoun, et son camp. La Chambre des députés avait approuvé la date du 27 mars 2022 pour l'organisation du scrutin, justifiant cet amendement par le jeûne du Ramadan qui tombe l'an prochain en avril, ce qui risquerait, selon eux, d'impacter la bonne marche de la campagne électorale. Le Parlement avait également adopté un amendement permettant aux Libanais de l’étranger de voter pour les 128 membres de l'Assemblée et non seulement pour les six dévolus à la diaspora. Ces deux amendements avaient été rejetés par le Courant patriotique libre (CPL, aouniste), seul bloc parlementaire à s'y opposer, arguant de l'illégalité du quorum retenu pour ce vote par le président de la Chambre, Nabih Berry. Le CPL avait présenté un recours en invalidation de ces amendements, mais le Conseil constitutionnel avait échoué à prendre une décision. 

Soutien à Riad Salamé
Sur le plan financier, Nagib Mikati a apporté son soutien au gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, perçu par de nombreux observateurs comme l'un des responsables de la crise économique et financière dans le pays. M. Salamé fait l'objet de critiques récurrentes de la part du président Aoun et de son camp, qui réclament sa mise à l'écart, alors que le gouverneur fait l'objet de plusieurs enquêtes, notamment dans des pays européens. "On ne change pas d'officiers en cours de guerre", a répondu M. Mikati, interrogé par l'agence Reuters durant la conférence de presse. Une réponse qui a suscité des critiques de la part du chef du parti Kataëb, Samy Gemayel. "M. le Premier ministre, lorsque tous les plans d'un officier échouent, et lorsqu'il cache les véritables données et cause des catastrophes à son peuple, et qu'on refuse de le remplacer et de le sanctionner, cela signifie que ses supérieurs sont ses complices contre le peuple et la nation", a affirmé ce dernier.

Crise avec le Golfe
Revenant enfin sur la crise diplomatique avec les monarchies du Golfe, le Premier ministre a plaidé pour un dialogue national qui examinerait la politique étrangère du pays. Il a dans ce cadre appelé à ce que soit respectée la politique de distanciation du Liban par rapport aux conflits des axes régionaux, critiquant ainsi le Hezbollah sans le nommer.  Dénonçant "les interférences dans les affaires de certains pays arabes" de la part du parti chiite, M. Mikati s'est abstenu de se prononcer sur l'hégémonie iranienne sur le Liban. "Je ne me permets pas de le faire", a-t-il dit. Si dans son discours lundi soir, Michel Aoun n'a pas employé les termes distanciation et neutralité, il a tout de même lui aussi critiqué son allié, le Hezbollah, sur ce plan. "Je souhaite de meilleures relations avec les pays arabes, en particulier avec les pays du Golfe, et je demande : qu’est-ce qui justifie aujourd’hui la tension avec ces pays et l'ingérence dans leurs affaires qui ne nous concernent pas ?", avait lancé le chef de l’État.

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Fin octobre, une grave crise diplomatique a éclaté entre le Liban et plusieurs monarchies du Golfe, Arabie saoudite en tête, qui critiquent la mainmise du Hezbollah sur la politique libanaise, à la suite de la diffusion de propos controversés de Georges Cordahi, ex-ministre de l'Information sur le rôle de Riyad dans le conflit au Yémen. En dépit de la démission de M. Cordahi, dont les propos avaient été tenus avant sa prise de fonction, la brouille n'a toujours pas été réglée, même si le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane est entré en contact par téléphone avec M. Mikati à l'issue de son entretien avec le président français, Emmanuel Macron, à Djeddah le 4 décembre.

Le Premier ministre libanais, Nagib Mikati, dont le gouvernement ne se réunit plus depuis le 12 octobre en raison d'une grave crise politique, a affirmé mardi qu'il ne démissionnera que s'il estime qu'une telle démarche pourra ouvrir une brèche dans le mur de la crise. En réponse indirecte aux appels pressant du chef de l'Etat, Michel Aoun, pour une reprise des réunions du Conseil des...

commentaires (18)

Mikati n’en revient toujours pas d’avoir pu réintégrer la sphère politique avec un poste et non des moindres de PM. Il est content de son sort même si son gouvernement n’existe pas et il n’y renoncerait pour rien au monde, quitte à sacrifier son pays. Son exemple est le président de la république et sa clique qui se cramponnent au pouvoir en détruisant le pays. Tant que ces loubards font passer leur ego avant la patrie nous sommes mal barrés. Leur double langage et leur lâcheté qui consistent à enfoncer l’autre aussitôt qu’il se redresse pour dénoncer le saccage du pays en dit long sur leur loyauté envers la nation pays et son peuple. HB est le seul à profiter de leur manque de patriotisme et leur égoïsme poussés à l’extrême et n’entend pas lâcher la grippe des tenailles tant que son emprise fonctionne sur les demeurés qui se prennent pour Einstein.

Sissi zayyat

11 h 03, le 29 décembre 2021

Tous les commentaires

Commentaires (18)

  • Mikati n’en revient toujours pas d’avoir pu réintégrer la sphère politique avec un poste et non des moindres de PM. Il est content de son sort même si son gouvernement n’existe pas et il n’y renoncerait pour rien au monde, quitte à sacrifier son pays. Son exemple est le président de la république et sa clique qui se cramponnent au pouvoir en détruisant le pays. Tant que ces loubards font passer leur ego avant la patrie nous sommes mal barrés. Leur double langage et leur lâcheté qui consistent à enfoncer l’autre aussitôt qu’il se redresse pour dénoncer le saccage du pays en dit long sur leur loyauté envers la nation pays et son peuple. HB est le seul à profiter de leur manque de patriotisme et leur égoïsme poussés à l’extrême et n’entend pas lâcher la grippe des tenailles tant que son emprise fonctionne sur les demeurés qui se prennent pour Einstein.

    Sissi zayyat

    11 h 03, le 29 décembre 2021

  • le 3eme larron, le 3 eme "stooge" de cette farce macabre qui s'assure la pérennité de la 3eme presidence . toutes ses positions prises ne sont pas pour lui assurer l'attention de l'Arabie Saoudite, loin d'en faire le chef des sunnites libanais. Mais qui s'en fout n'est ce pas !

    Gaby SIOUFI

    08 h 27, le 29 décembre 2021

  • Aoun et Miqati (et Hariri) partagent tous les deux (les trois) un attachement indéfectible aux accords de Doha, une soumission au Hezbollah et à son axe néo-safavide qu’ils cherchent désormais tous à dissimuler, et avec tous ces points communs ils trouvent moyen tant les uns que les autres d’entretenir un combat complètement artificiel: « droits des chrétiens » vs « droits des sunnites » pour les beaux yeux de leurs maîtres néo-safavides qui craignent plus que tout un leader comme Samir Geagea et surtout un parti organisé comme les Forces Libanaises capable d’unir chrétiens et sunnites dans le même vrai combat à mener contre le nouvel « empire safavide ». Où sont les droits des chrétiens et où sont les droits des sunnites tant qu’on continue à mettre en pratique le compromis de la dhimminitude de Doha qui interdit de former un gouvernement sans le Hezbollah et ses armes ?

    Citoyen libanais

    07 h 56, le 29 décembre 2021

  • Le tandem chiite de quoi il a peur du juge abitar? Ils ont vendu leur pays à l’Iran et ils ont l’audace de parler figli di buona donna….

    Eleni Caridopoulou

    20 h 56, le 28 décembre 2021

  • Avec tous mes respects envers le Chef du Gouvernement qui vient de dire "On ne change pas d'officiers en cours de guerre" : en France, au cours de la guerre de 14-18, le Général Robert Nivelle, commandant en chef des armées françaises a été relevé de ses fonctions en raison des controverses autour de ses options stratégiques, particulièrement meurtrières notamment au Chemin des Dames a Verdun.

    Un Libanais

    18 h 22, le 28 décembre 2021

  • Comme disait Gambetta: “la politique est l’art du possible”… Le Liban a de la chance d’avoir un PM intelligent et habile comme Mikati, contrairement aux commentaires exaltés.

    Mago1

    16 h 31, le 28 décembre 2021

  • Vivement un tsunami pour les balayer tous en sachant que la montagne restera saine et sauve !

    Wow

    16 h 29, le 28 décembre 2021

  • Vivement une coupure du courant de 24 sur 24 pour nous epargner finalement ces interventions télévisées des présidents, des politiciens, des analystes, des chefs de ci et de ça.... héllou aan saména! Allez faire vos réunions et lavez vos sales affaires chez vous et dans vos souterrains maudits...

    Wlek Sanferlou

    15 h 06, le 28 décembre 2021

  • PLUS HYPOCRITE QUE MIKATI TRÈS DIFFICILE À TROUVER. IL SOUTIENT SALAMÉ ET TROUVE DES FAILLES CHEZ BITAR ET ATTEND QUE LE HEZBOLLAH ÉJECTE BITAR POUR RÉUNIR SON GOUVERNEMENT

    Gebran Eid

    14 h 59, le 28 décembre 2021

  • A force d'arrondir les angles, on vas finir par tourner en rond pour les 30 prochaines années!

    Assouad Fady

    14 h 51, le 28 décembre 2021

  • "Sur le plan financier, Nagib Mikati a apporté son soutien au gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé,..." Bien évidemment, entre milliardaires magouilleurs, on s'entraide et on forme un groupe uni face à l'adversité...

    Georges MELKI

    14 h 42, le 28 décembre 2021

  • "Le Hezbollah plaide même pour la mise à l'écart du juge, alors que le mouvement Amal dit se contenter de le voir dessaisi du volet politique de l'affaire." C'es quoi au juste "le côté politique de l'affaire"? Et s'il existe vraiment, c'est qu'il y a un parti politique qui a introduit le nitrate d'ammonium explosif au Liban...Faut-il être Sherlock Holmes pour savoir à qui a profité ce nitrate? C'est pour cette raison que ledit parti veut éloigner le juge Bitar, qui est déjà sur sa piste...

    Georges MELKI

    14 h 37, le 28 décembre 2021

  • Les mollassons du Sérail. Jusqu'à quand ?

    Esber

    14 h 19, le 28 décembre 2021

  • Arrondis arrondis tes angles.. Il en restera quelque chose.

    Esber

    14 h 07, le 28 décembre 2021

  • "Tant qu'une composante essentielle ne prend pas part au Conseil des ministres, je ne le convoquerai pas" Autrement dit, le gouvernement, et le pays tout entier est sois aux caprices de quelques trublions! Au lieu de sanctionner les grévistes, Mikati a choisi de céder au chantage et accepte de laisser paralyser le pays. "Il faut bien que je les suive puisque je suis leur chef!", semble être sa devise.

    Yves Prevost

    13 h 28, le 28 décembre 2021

  • Tous on attendait impatiemment d'avoir un gouvernement , car il fallait se pencher sur les besoins de la population . Une fois formé il est bloqué et le pays est bloqué et l'inflation est galopante , insupportable . Quand il s'agissait du Bahrain , l'exécutif n'a pas mâché ses mots et a vite réagi sans crainte .Quelles conséquences plus insupportables que celles que l'on on vit , faut il craindre ? les seules seraient un dérapage sécuritaire : on l'a vécu à Tayyouneh et la Justice s'est aussi bloquée alors . Le Président a oeuvré pour écarter les conflits internes depuis 2006 et il a appelé plus d'une fois à un dialogue et ceci bien avant octobre 2019 .Malheureusement on ne voit pas une effacité du gouvernement mais plutôt comme un gouvernement qui gère les affaires courantes car les sujets importants doivent avoir l'aval de tous et en particulier du tandem chiite . Restez les bras croisés et attendre quoi ?

    Lecteurs OLJ 2 / BLF

    13 h 02, le 28 décembre 2021

  • Le plus terrible est d' en arriver a cohabiter avec les corrompus, dans un système totalement grippé, et de subir leurs péroraisons à longueur de journée... On ne purifiera l' air , qu' en se débarrassant de la milice.... A ne pas confondre avec la communauté chiite bien entendu..!

    LeRougeEtLeNoir

    12 h 27, le 28 décembre 2021

  • blablabla....Il faut appeler un chat un chat...! Fares Souhaid president , allez !!

    LeRougeEtLeNoir

    12 h 23, le 28 décembre 2021

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