Le ministère des Affaires sociales s’apprête à doubler le nombre de foyers bénéficiant d’une aide financière mensuelle dans le cadre du Programme national de ciblage de la pauvreté NPTP (National Poverty Targeting Program). Lancé en 2011, ce programme vient en aide à l’heure actuelle à 36 000 familles libanaises auxquelles viendront bientôt s’ajouter 39 000 foyers qui ont récemment basculé dans la précarité. Ce qui devrait porter à 75 000 le nombre de familles bénéficiant des aides en espèces du NPTP, un total qui en dit long sur la dégradation tragique de la situation économique et sociale au Liban et qui est probablement en deçà du nombre réel de familles dans le besoin. Car, selon les dernières estimations de l’Escwa, 78 % de la population libanaise vit désormais sous le seuil de pauvreté.
« Les familles qui bénéficient déjà des aides du NPTP reçoivent 25 dollars tous les mois payés dans cette devise. Elles ont également droit à 15 dollars supplémentaires pour chaque membre de la famille. Ces mêmes montants seront octroyés aux nouveaux foyers bénéficiaires une fois leurs dossiers validés », explique Ola Boutros, conseillère du ministre des Affaires sociales et responsable du Plan de réponse à la crise au Liban (LCRP).
Jusque-là, les aides du NPTP étaient payées en livres libanaises, mais elles ont été converties en dollars « frais » en septembre dernier afin de renflouer le pouvoir d’achat des familles, dans un contexte de dévaluation violente de la livre et d’inflation galopante. Le NPTP, lui, est financé par l’Union européenne, l’Allemagne, le Canada, la Norvège, l’Italie et la France. Il est piloté par le Programme alimentaire mondial (PAM), en coordination avec le ministère des Affaires sociales.
Cent trente mille demandes reçues
Interrogée sur le nombre de foyers ayant récemment basculé dans la pauvreté, Mme Boutros avoue que le ministère ne possède pas de données officielles à ce sujet, mais qu’il travaille à bâtir une base de données. « Chaque jour, de nouvelles personnes basculent dans la pauvreté au Liban, ce qui rend le calcul difficile. La pauvreté est, de surcroît, désormais multidimensionnelle », souligne Ola Boutros. Elle révèle que « le pays ne possède pas de chiffres officiels concernant l’évolution de la pauvreté ». « Nous travaillons en ce moment à collecter des données sur les foyers vivant dans la précarité. Nous nous basons, pour cela, sur les informations centralisées sur la plateforme Impact (utilisée par les autorités pour réceptionner, entre autres, les demandes d’assistance sociale) », indique-t-elle à L’Orient-le Jour. Sur le site web d’Impact, qui recense aussi bien les populations vulnérables que les personnes vaccinées dans le pays, de nombreux chiffres sont accessibles au grand public, mais la plupart des données ne sont pas datées, ce qui permet difficilement de comprendre l’évolution de la crise ou des besoins des Libanais.
Mme Boutros révèle par ailleurs que la sélection des nouvelles familles qui seront intégrées aux aides du NPTP commencera très prochainement. « En tout, 130 000 familles libanaises ont effectué des demandes dans les centres relevant du ministère afin d’être incluses dans ce programme. Nos assistants sociaux commenceront bientôt les visites sur le terrain afin de retenir les foyers les plus vulnérables », indique la conseillère du ministre des Affaires sociales.
« Le PAM est en train de former 450 assistants sociaux relevant du ministère qui se rendront auprès des foyers pour effectuer les entrevues. L’objectif est d’étudier tous les dossiers d’ici à février. Dès qu’un dossier est vérifié, la famille commencera tout de suite à recevoir les aides », assure Mme Boutros. Elle souligne par ailleurs que « les aides seront équitablement réparties entre les différentes régions libanaises ».
Huit cent mille Libanais assistés par le PAM
Rasha Abou Dargham, porte-parole du PAM au Liban, révèle pour sa part que 217 000 Libanais profitent du programme NPTP à l’heure actuelle, tandis que 270 000 autres personnes reçoivent des colis alimentaires mensuels prodigués par le PAM. « Lorsque les nouvelles familles seront ajoutées aux bénéficiaires du NPTP, nous passerons dès janvier à un total de 800 000 Libanais bénéficiant d’aides sociales, que ce soit par le biais du NPTP ou des colis alimentaires », indique-t-elle à L’OLJ.
« La situation est difficile partout dans le pays. 35 % de la population libanaise vit aujourd’hui dans l’insécurité alimentaire », révèle Mme Abou Dargham. Quant au taux de pauvreté, il a quasiment doublé en un an. « En 2020, 1,7 million de Libanais ont basculé dans la pauvreté. Nous sommes passés à 3 millions de personnes en 2021. La situation est également désastreuse parmi les réfugiés syriens. Neuf réfugiés sur 10 vivent aujourd’hui dans l’extrême pauvreté », souligne la porte-parole du PAM.
Rasha Abou Dergham annonce par ailleurs que les Nations unies « ambitionnent d’élargir leur éventail d’aide pour toucher environ 1,6 million de Libanais au cours des prochains mois ». « Ces 1,6 million de personnes devraient pouvoir bénéficier d’aides mensuelles à travers un autre projet de protection sociale, en réponse à la crise et au Covid-19, baptisé ESSN et rattaché à un nouveau programme d’aides, Daem », révèle-t-elle. Lancé la semaine dernière en grande pompe, Daem (soutien en arabe) devrait être financé par la Banque mondiale et mis en application par le ministère des Affaires sociales et le PAM. Outre le projet ESSN, Daem permettra également le lancement d’une carte d’approvisionnement qui, elle, devrait permettre de venir en aide à 500 000 familles.
commentaires (5)
QUEL CONTRASTE ÉTOUFFANT. IL FAUT FAIRE LES LONGUES DÉMARCHES NÉCESSAIRE POUR AVOIR LA CHANCE D'ÊTRE CHOISI PAR CE MINISTRE. ET DE L'AUTRE BORD, ON VOIT CE PREMIER MILLIARDAIRE QUI VA GÉRER CETTE SITUATION. ÇA FAIT VAUMIR. QUEL EST L'INTÉRÊT DE MIKATI DE VIVRE DANS CE PAYS ? QUI PEUT CROIRE QU'IL EST LÀ POUR AIDER CES GENS LÀ. C'EST HORRIBLE DE LE VOIR SUR CE POSTE DE PREMIER MINISTRE. INSUPPORTABLE.
Gebran Eid
17 h 20, le 09 décembre 2021