
L'avocat Nader Gaspard célébrant son élection au poste de bâtonnier de Beyrouth, le 21 novembre 2021. Photo Claude Assaf
C'est à l'issue d'une journée marquée par une forte affluence au palais de Justice que se sont clôturées dimanche les élections du Barreau de Beyrouth avec la victoire de Nader Gaspard , élu nouveau bâtonnier. Me Gaspard s'est présenté comme candidat indépendant, comptant majoritairement sur ses relations parmi les avocats plus que sur un appui partisan, mais il a tout de même obtenu lors du second tour le soutien de plusieurs partis traditionnels, notamment le Courant patriotique libre (CPL, aouniste), le courant du Futur et le mouvement Amal. Pour beaucoup, cette victoire marque ainsi celle de la classe dirigeante à quelques mois des législatives de 2022.
Dans un bref discours suivant son élection, le nouveau bâtonnier s'est engagé à protéger "la dignité et l'immunité" des avocats, qui est une "ligne rouge". "Nous n'interférerons pas dans la politique et nous demandons à la politique de ne pas s'ingérer dans nos affaires", a-t-il lancé, assurant que "le droit de tous à la défense restera sacré".
Lors des élections syndicales de 2019, M. Gaspard avait déjà accédé au second tour, avant d’être battu par Melhem Khalaf. Il bénéficie de l’appui de plusieurs collectifs, dont le Club des juristes composé de 250 avocats. Il jouit également de la confiance de nombre de ses confrères dans les régions. Il avait néanmoins fait, il y a quelques jours, l’objet de vives critiques sur les réseaux sociaux, du fait de la présence d’un député du Hezbollah, Ali Mokdad, à un déjeuner organisé ce jour-là en son honneur à Baalbeck.
Une longue file formée devant un bureau de vote au Palais de Justice de Beyrouth, lors des élections du Barreau, le 21 novembre 2021. Photo Claude Assaf
Au second tour du scrutin de l'ordre des avocats, Nader Gaspard, qui a récolté 1.539 voix, se mesurait à Abdo Lahoud (1.035 voix) et Wajih Massaad (187 voix), lesquels se qualifiaient également de candidats "indépendants". Tous trois avaient été élus peu auparavant membres du Conseil du Barreau lors du premier tour de ces élections, condition sine qua non pour pouvoir prétendre à la course au bâtonnat. L'avocat Alexandre Najjar, également élu membre du Conseil et qui était jusque-là candidat à la présidence de l'ordre, s'était lui retiré de la course peu après la fin du premier tour, suite à des tractations entre différentes parties. Il a toutefois reçu 599 votes lors du second tour, malgré son retrait. Il bénéficiait notamment du soutien du parti Kataëb.
Aucun membre du Conseil issu de l'opposition
Outre MM. Gaspard, Lahoud, Massaad et Najjar, cinq autre membres du Conseil ont été élus lors du premier tour. Il s'agissait des avocats Imad Martinos, Élias Bazerli, Fadi Masri, Marwan Jabre et Maya Zeghrini.
Aucun des candidats du collectif "Nakabetna" (Notre ordre) qui s'étaient portés candidats au bâtonnat n'a pu être élu membre du Conseil lors du premier tour. Tous ont donc perdu l'opportunité de se présenter au second tour. Un revers pour ce collectif, qui n'était pas parvenu à se mettre d'accord sur la candidature d'un seul représentant.
Le seul candidat au bâtonnat affilié à un parti, Fadi Barakat, membre du Courant patriotique libre mais qui s'était présenté sans l'étiquette officielle du CPL, a de son côté été élu membre suppléant du Conseil.
Alors que le Barreau est chargé de la défense des proches des victimes de la double explosion au port de Beyrouth, le comité de ces famille a confirmé à L'Orient-Le Jour que l'élection ne changerait pas la donne et qu'ils resteraient défendus par les mêmes avocats membre du collectif formé au moment du dépôt de leur plainte collective.
Il y a deux ans, dix jours après le début du soulèvement populaire du 17 octobre 2019, l'élection de Melhem Khalaf, qui s'était présenté comme candidat indépendant et soutenu par la société civile, avait été considérée comme une victoire pour ce soulèvement, qui réclame l'indépendance de la justice et la chute de la classe politique actuelle.
A Tripoli (Liban-Nord), le barreau local a également élu ses représentants au cours de la journée de dimanche. C'est l'avocate Marie-Thérèse al-Qawwal, soutenue par les Marada, qui a été élue bâtonnière.
commentaires (10)
Si l'opposition compte se présenter aux législatives en rangs dispersés -comme elle l'a fait hier aux élections du barreau - la classe politique actuelle petit continuer à dormir sur ses deux oreilles !!! Vous n'avez pas réussi à vous mettre d'accord sur UNE SEULE LISTE , que ferez-vous quand il s'agira de présenter des dizaines de listes ???
Leila G
13 h 31, le 22 novembre 2021