Le chef des Forces libanaises Samir Geagea, qui avait dernièrement qualifié le chef de l’État Michel Aoun, son ennemi juré, de "président pirate", a affirmé samedi que son mandat qui s'achèvera l'année prochaine est celui des "ruines et de la pandémie", alors que le Liban s'effondre après deux ans de crise socio-économique sans précédent et qu'il lutte contre le coronavirus avec un système de santé en lambeaux.
Dans un entretien avec la journaliste de la chaîne américaine arabophone al-Hurra, Layal Alekhtiar, le leader chrétien a critiqué ses adversaires politiques, notamment le Courant patriotique libre, fondé par Michel Aoun et dirigé par son gendre Gebran Bassil, et le Hezbollah. Ces critiques interviennent à quelques mois des législatives qui doivent se tenir en mai 2022, alors que les Forces libanaises se positionnent dans l'opposition au pouvoir en place.
Fait remarquable, le chef des FL, ennemi déclaré du régime du président syrien Bachar el-Assad qu'il a une nouvelle fois dénoncé, a estimé que le Liban était contraint de traiter avec ce régime afin d'acheminer du courant électrique dans un pays qui souffre de graves pénuries.
"Pas de relation" avec Hariri
"Quoi que je dise, cela ne sera jamais assez. Le mandat Aoun est un mandat de ruines et de pandémie", a répondu Samir Geagea, lorsque la journaliste lui a demandé ce qu'il pensait du régime du chef de l’État. Samir Geagea avait pourtant scellé un accord politique avec Michel Aoun en 2016, une entente qui avait pavé la voie de la présidence à ce dernier. Toutefois, le chef des FL a dernièrement fait son mea culpa, affirmant regretter d'avoir conclu cette alliance.
"Michel Aoun veut que tout le monde s'adresse à Gebran Bassil et cela est encore le cas actuellement. De nombreuses choses qui arrivent aujourd'hui s'expliquent par le fait que Aoun entend assurer sa succession à Gebran Bassil. Mais cela ne peut pas arriver et n'arrivera pas", a fustigé le leader chrétien.
Interrogé sur sa relation avec l'ex-Premier ministre Saad Hariri, Samir Geagea a répondu : "Pas de relation". Les FL et le Courant du Futur de M. Hariri étaient de proches alliés pendant de nombreuses années au sein de l'alliance souverainiste du 14 Mars. Mais les liens entre les deux hommes se sont détériorés au cours des dernières années, en raison de divergences politiques.
Relation "naturelle et amicale" avec Berry
Quant à la nature de ses rapports avec le leader druze Walid Joumblatt, Samir Geagea a affirmé que ceux-ci sont réduits "au strict minimum". "Cela ne veut pas dire que le dialogue est coupé. Nous nous parlons, mais nos approches sont différentes ainsi que nos prises de positions", a-t-il expliqué, alors que M. Joumblatt soutient le nouveau gouvernement de Nagib Mikati, et que les FL ne lui ont pas accordé leur confiance lors du vote au Parlement.
Enfin, Samir Geagea s'est penché sur ses relations avec le président du Parlement et chef du mouvement chiite Amal, Nabih Berry. "Sur le plan personnel, la relation est toujours naturelle et amicale, mais sur le plan politique, nous avons des divergences de taille, notamment sur la loi électorale et la gestion des affaires de l’État, ainsi que la question de la Résistance (les armes du Hezbollah, NDLR) au sujet de laquelle nous nous opposons", a poursuivi le chef des FL.
Le gouvernement Mikati
Revenant sur la formation du cabinet Mikati après une crise politique qui a duré 13 mois, et suite à une forte pression internationale, Samir Geagea a estimé que "des facteurs locaux et externes ont contribué à la mise sur pied du cabinet". "Mais les facteurs en question ne m'intéressent pas. Ce qui m'intéresse, c'est la nature de ce gouvernement", a-t-il souligné. "Indépendamment des bonnes intentions de son chef, Nagib Mikati, et de certains ministres respectables, les forces actives derrière ce gouvernement sont les mêmes qui se trouvaient derrière les équipes ministérielles des huit dernières années qui ont mené le pays dans la situation dans laquelle il se trouve actuellement", a estimé le leader chrétien. "Nous ne sommes pas très optimistes concernant ce gouvernement, mais s'il entreprend de bonnes actions, nous l'aiderons", a-t-il promis, tout en exprimant des doutes sur la capacité du nouveau cabinet à entreprendre des réformes.
Le Liban "contraint" de traiter avec Assad
Sur le plan régional, Samir Geagea a exprimé les points de vue de sa formation vis-à-vis du régime syrien du président Bachar el-Assad. "Le régime syrien est un régime pirate et non un régime d’État. C'est pourquoi nous sommes très prudents lorsqu'il s'agit de traiter avec lui, en partant d'une expérience vieille de 50 ans ", a dit le leader des FL. Beyrouth a dernièrement relancé ses relations officielles avec Damas pour tenter de résoudre les pénuries de courant électrique dans le pays. "Le Liban a des intérêts et il est contraint de traiter avec les bandits de grand chemin qui se trouvent à Damas en ce moment. (...) Nous avons besoin aujourd'hui d'importer du courant électrique (...)", a affirmé Samir Geagea.
Dernièrement, les ministres jordanien, égyptien, syrien et libanais de l’Énergie se sont entendus sur une feuille de route pour acheminer du gaz égyptien vers le Liban, via la Jordanie et la Syrie, afin d'alimenter les centrales électriques libanaises. Cette réunion était intervenue à la suite d’un feu vert exceptionnel accordé par les États-Unis pour permettre aux pays arabes de contourner les sanctions américaines (loi César) frappant le régime syrien.
commentaires (15)
D'abord, il faut arrêter de nommer Geagea comme le hakim. Il n'a fait qu'une seule année de médecine. Plus important, les FL de Geagea ne sont pas les FL de Bechir. Geagea a détruit les FL historiques en emprisonnant ou executant tous ceux qui pouvaient s'opposer à lui sans volonter d'unification mais plutôt d'hégémonie. Ce faisant, la resistance libanaise a explosé. Les anciens qui sont restés fidèles à l'esprit de Béchir, nous sommes tous partis. Tous les choix que Geagea a fait ce sont avérés catastrophiques pour la resistance souveraine du Liban. Je lui reconnais le mérite d'être le seul parmis les anciens chefs de guerre d'avoir fait son mea culpa, mais je lui attribue l'affaiblissement du front souverainiste A tous les afficionados de Geagea, non, il y avait un choix en 2016. Il n'y avait pas Frangie ou Aoun, il y avait le choix de la resistance à ce moment la et de dire non au deux. Aurriez-vous imaginé Bechir faire le même choix? La réponse est évidente. Son dernier interview fait les louanges des ministres du Hezb, ou ceux de Berry. Je vous parie que ce monsieur sera élu président, et que dans la foulée il signera la paix des "braves" avec le Hezb. Pauvre peuple, nosu avons les dirigeants que nous méritons. J'ai mal à nos martyrs, tant d'amis morts pour en arriver la...
Bachir Karim
11 h 03, le 27 septembre 2021