"Crime flagrant", "grand mensonge", "mobilisations surprises et douloureuses" : un mois après le premier anniversaire des explosions meurtrières du 4 août 2020 au port de Beyrouth, des familles de victimes du drame ont à nouveau crié leur colère contre cette catastrophe et le sur-place de l'enquête, au cours d'un nouveau sit-in organisé devant une des entrées du port. Alors que de hauts responsables inculpés refusent toujours de comparaître devant le juge d'instruction près la cour de justice, Tarek Bitar, les manifestants ont mis en garde contre une nouvelle escalade de leur mouvement de contestation, estimant que la déflagration du "4 août est un crime flagrant et non un problème de négligence professionnelle".
"Arrêtez de nous dénigrer et de prendre à la légère notre affaire", ont dénoncé les parents des victimes, selon des propos rapportés par la chaîne locale MTV. "La Haute Cour chargée de juger les ministres et le président de la République est un grand mensonge. Ce qui s'est passé le 4 août est un crime flagrant et non un problème de négligence professionnelle", ont-ils insisté, alors que les dirigeants souhaitent que l'affaire soit portée devant cette cour, qui n'a jamais jugé aucun responsable depuis sa création. "Treize mois après l'explosion, certains se cachent toujours de manière éhontée derrière les immunités politiques et communautaires, sans prendre en considération les sentiments des familles des victimes", ont-ils également déploré.
Mobilisations surprises
Les parents des victimes ont appelé les personnes impliquées dans le drame à comparaître devant le juge Bitar, mettant en garde contre une nouvelle escalade de leur mobilisation. "Nous avons décidé d'exécuter des mobilisations surprises et douloureuses pour les responsables, que vous verrez au moment voulu afin que personne ne songe à faire dévier notre cause", ont-ils affirmé. Leur porte-parole, Ibrahim Hoteit, a enfin mis en garde contre une "politisation de leur cause".
Le juge Bitar, rappelle-t-on, a été confronté à une levée des boucliers de la part de la classe politique, après avoir demandé la levée de l'immunité parlementaire de plusieurs responsables "en vue de les inculper et d'engager des poursuites pour éventuelle intention d'homicide", mais aussi pour "négligence et manquements". En plus du général Abbas Ibrahim, directeur de la Sûreté générale, des poursuites ont été lancées à l'encontre des députés Ghazi Zeaïter, Ali el-Khalil et Nouhad Machnouk, l'ancien ministre Youssef Fenianos, l'ex-commandant en chef de l'armée Jean Kahwagi, un ex-chef des renseignements de l'armée, Camille Daher, plusieurs officiers et le chef de la Sécurité de l’État Tony Saliba.
Le juge Bitar avait émis en août un mandat d'amener à l'encontre du Premier ministre sortant Hassane Diab, poursuivi pour négligence dans ce drame. Celui-ci a aussitôt refusé de comparaître devant le magistrat. Le juge a fixé au 20 septembre la date d'une nouvelle audience et chargé les forces de sécurité de l'interpeller. Sa décision qui a suscité un tollé sur la scène politique. Le juge avait également lancé à la fin du mois dernier un mandat d'arrêt contre Hani Hajj Chéhadé, membre du Conseil supérieur des douanes après avoir interrogé le prévenu pendant six heures consécutives.
La classe dirigeante, qui a catégoriquement rejeté une enquête internationale, est accusée de tout faire pour torpiller l'enquête et éviter certaines inculpations. Plus d'un an après la double-explosion de plusieurs centaines de tonnes de nitrate d'ammonium qui a fait 214 morts et plus de 6.500 blessés, dévastant des quartiers entiers de la capitale, l'enquête locale n'a toujours pas donné de résultats.
commentaires (7)
J'avais écrit plusieurs fois à des journalistes pour les faire enlever de leurs plumes ce mot "négligence" car inapproprié pour ceux qui savaient car ce n'est pas par fénéantise qu'ils ont rien faite pour éliminer le matériel explosif (non-utilisable dans l'agriculture). Les parents des victimes ont parfaitement raison.
Shou fi
20 h 01, le 05 septembre 2021