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Société - Droits de la femme

La libération pour « bonne conduite » du mari d’une victime de violence relance le débat juridique

Latifé Kassir a été tuée par son ex-conjoint en 2010. Ce dernier a été relaxé récemment, bénéficiant des dispositions de la loi sur la réduction de peine. La famille de la victime mène campagne pour l’amendement de ladite loi afin que cette décision judiciaire ne constitue pas un précédent.

La libération pour « bonne conduite » du mari d’une victime de violence relance le débat juridique

Latifé Kassir avec ses deux enfants. Photo DR

La relaxe récente pour « bonne conduite » d’Ibrahim Taleb, ex-mari de Latifé Kassir qu’il avait tuée en 2010, plonge la famille de la victime dans le désarroi. Elle n’arrive pas à accepter le fait que cet homme, qui avait malmené son épouse et ses deux enfants de longues années durant avant de la tuer de sang-froid, bénéficie d’une réduction de peine. Consciente du fait que le verdict judiciaire est irrévocable, elle veut saisir l’opinion publique de cette affaire pour « éviter que cette décision ne constitue un précédent » et que « d’autres tueurs de femmes ne soient remis en liberté ».

Le calvaire de Latifé Kassir a commencé en 2000, quelques mois après son mariage. Ibrahim Taleb n’avait de bonne conduite « ni sur le plan familial ni sur le plan social », se souvient le frère de la victime, Kassem Kassir. « Ma sœur a beaucoup souffert, mais elle patientait parce qu’elle avait deux enfants en bas âge. Nous avons essayé de l’aider autant que possible. Mais c’était un toxicomane. Nous avons même essayé de la faire divorcer, mais il avait refusé, s’engageant à abandonner la drogue », poursuit-il.

Pour mémoire

« Je vis dans la peur constante que mon mari me tue »

Une promesse qui a fait long feu. Entre-temps, Latifé a poursuivi ses études et décroché un diplôme en sociologie. « L’écart social se creusait encore plus au sein du couple, observe M. Kassir. Et au terme d’une longue souffrance, Latifé a pu divorcer par khol (compensation) fin 2009, moyennant une somme d’argent que nous avions versée à Ibrahim. Ce divorce est irrévocable. De plus, elle a gardé les enfants parce que ni sa famille ni lui n’en voulaient. Nous l’aidions, d’autant que ses responsabilités s’étaient accrues. »

Durant les quatre mois qui ont suivi le divorce, Ibrahim « a tenté à deux reprises de l’agresser ». Les deux fois, les voisins ont pu la sauver. En ce 13 avril 2010, Latifé n’a pas toutefois pu s’échapper. « En ce jour, il était venu tôt le matin sous prétexte de donner des croissants aux enfants avant qu’ils ne partent à l’école, raconte M. Kassir. Il a attendu le départ des enfants pour la violer avant de l’étrangler avec une serviette qu’il a ensuite mise dans le lave-linge. Ce sont les enfants qui ont retrouvé le corps de leur mère à leur retour de l’école. Quant à lui, il a essayé de se suicider. À sa sortie de l’hôpital, il a été arrêté par les Forces de sécurité intérieure, avant d’avouer son crime. »

Ibrahim Taleb a écopé de dix-huit ans de prison. « Ses avocats lui ont conseillé de dire que le couple avait conclu un mariage temporaire et que ce jour-là, il était venu voir les enfants, précise M. Kassir. Ce qui lui a évité la prison à perpétuité. »

Saisir l’opinion publique

Conformément au code pénal, l’année carcérale compte neuf mois au Liban. De plus, une fois les deux tiers de la durée de la sanction purgée, un prisonnier peut saisir le tribunal pour une réduction de sa peine. C’est ce qu’a fait Ibrahim Taleb. En juillet dernier, la cour d’appel statuant sur la réduction des peines a décidé de la réduire d’un sixième. En ce même mois, Ibrahim a pu recouvrer la liberté.

« Nous avons essayé d’entrer en contact avec la juge Amira Chahrour pour qu’elle revienne sur sa décision d’autant que les informations dont elle dispose ne sont pas vraies, explique Kassem Kassir. Il n’est pas vrai qu’il a une bonne conduite. C’est un criminel et un assassin. Il aurait commis un crime lorsqu’il était encore en Allemagne. De plus, nous n’avions pas réclamé le prix du sang, non pas pour dissimuler quelque chose que notre sœur aurait commis, mais parce que sa perte ne peut être compensée par l’argent. Sans oublier qu’Ibrahim est un homme violent qui maltraitait aussi ses enfants. Par ailleurs, il n’a pas de preuves que ma sœur et lui avaient conclu un mariage temporaire. Malheureusement, la juge Chahrour a refusé de revenir sur sa décision. »

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Depuis qu’il est sorti de prison, la famille craint que sous prétexte de revoir les enfants, aujourd’hui devenus adultes, Ibrahim n’essaie d’agresser les sœurs de Latifé et ses parents. « À ce jour, il n’est pas entré en contact avec nous, mais nous appréhendons ce moment », affirme M. Kassir. Il souligne en outre qu’une campagne médiatique a été menée par la famille contre la magistrate « parce qu’elle a autorisé la remise en liberté d’un criminel ». « Elle a porté plainte contre nous auprès du tribunal des crimes cybernétiques, ajoute-t-il. Nous avons retiré tout ce qui touche à sa personne, mais la campagne se poursuit. Nous nous sommes rendus auprès de plusieurs parlementaires et ONG pour demander un amendement de la loi sur la réduction des peines pour ce qui concerne les crimes, notamment ceux commis dans le cadre de la violence domestique. Notre objectif est de saisir l’opinion publique de cette affaire pour que cette loi soit amendée. »

Empathie envers le criminel

L’ONG Kafa, principal artisan de la campagne en faveur d’une loi pour la protection des femmes de la violence domestique adoptée en 2014, a également dénoncé cette décision judiciaire. « La bataille en faveur d’un renforcement des peines pour les crimes commis contre les femmes dure depuis des années, explique à L’Orient-Le Jour Leila Awada, avocate et cofondatrice de l’ONG Kafa. La violence contre la femme se poursuivra tant que les procédures judiciaires sont lentes et que les criminels bénéficient d’une réduction de peine et de circonstances atténuantes. En lisant le rapport de la commission juridico-sociale qui a été chargée d’étudier le dossier, nous constatons une empathie envers le tueur de Latifé Kassir, comme le fait qu’il voulait lui revenir, mais qu’elle avait refusé ou encore qu’il eût eu une relation avec elle après le divorce. »

Dans son rapport, la commission écrit que vu « le genre du crime et ses circonstances », elle conseille de dispenser Ibrahim de purger le reste de sa peine. « Mais de quelles circonstances on parle ? s’insurge Me Awada. Du fait qu’il espérait qu’elle allait lui revenir ? On sent la compassion envers l’auteur du crime. »

Pour Leila Awada, la décision prise par la juge Chahrour de réduire la peine d’Ibrahim Taleb est d’autant plus dangereuse que « tout criminel pourrait bénéficier d’une réduction de peine s’il fait preuve de bonne conduite à l’intérieur de la prison ». « La loi doit être amendée de manière à en exclure les auteurs des crimes commis dans le cadre de la violence domestique, insiste-t-elle. En attendant, nous avions appelé la magistrate à ne pas faire preuve d’indulgence sur les motifs dont le criminel peut bénéficier pour une réduction de peine, d’autant plus qu’on ne dispose pas de mécanisme d’application. »

De fait, le prisonnier à qui profite la réduction de peine doit être placé sous surveillance sociale, « c’est-à-dire qu’un délégué social doit le surveiller constamment et émettre des rapports périodiques sur son comportement ». « Or cela n’est pas assuré au Liban, précise Leila Awada. De ce fait, il est impossible qu’il puisse être détenu de nouveau au cas où il essaierait de réitérer son crime ou d’enfreindre la loi. Malheureusement, on s’attache aux lacunes de la loi pour pouvoir en bénéficier. » D’où, à son avis, l’importance de la campagne menée par la famille de Latifé Kassir pour aboutir à l’amendement de la loi et éviter que d’autres auteurs de crimes puissent en bénéficier.

La relaxe récente pour « bonne conduite » d’Ibrahim Taleb, ex-mari de Latifé Kassir qu’il avait tuée en 2010, plonge la famille de la victime dans le désarroi. Elle n’arrive pas à accepter le fait que cet homme, qui avait malmené son épouse et ses deux enfants de longues années durant avant de la tuer de sang-froid, bénéficie d’une réduction de peine....

commentaires (5)

Il a frappé sa femme, quel homme ! Il a tué celle-ci WOUAH quel courage ! Soyons sérieux, cet acte est l’exemplarité de la lâcheté de tout homme qui prouve son incapacité d’aimer ! la Femme, colonne vertébrale de la famille, elle est le lien qui unit tout le monde, elle est la modératrice qui calme les ardeurs et les sauts d’humeurs. Elle est l’Amour avec un grand A qui fait le bonheur du monde. Comment des êtres infâmes puissent se permettre de lever la main sur une femme, d’autant plus qu’elle soit l’épouse et la mère des enfants. Quand on est incapable d’aimer, pourquoi épouser une personne pour la malmener en lui faisant subir toutes les misères du monde. Cet assassin ne mérite aucune indulgence. Madame Latifé Kassir est morte sous les coups d’un lâche, incapable de se mesurer à un autre homme, pour se prouver sa virilité illusoire, dans un moment de doute sur sa propre personnalité. Latifé kassir a laissé ses enfants en gages à la société et à la justice pour qu’ils se rappellent d’elle et des souffrances qu’elle a subi par un homme qui se croit toujours au-dessus des lois, puisqu’il est aujourd’hui en liberté. Par ce fait, les Parents et les enfants privés de faire le deuil d’un être d’Amour, parce qu’une juge a décidée de libérer un être abjecte qui n’a eu aucune pitié de sa victime. Mes sincères condoléances à la famille et aux enfants de Latifé kassir, que Dieu L’accueil dans son paradis. Amen !

Le Point du Jour.

19 h 57, le 27 août 2021

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Commentaires (5)

  • Il a frappé sa femme, quel homme ! Il a tué celle-ci WOUAH quel courage ! Soyons sérieux, cet acte est l’exemplarité de la lâcheté de tout homme qui prouve son incapacité d’aimer ! la Femme, colonne vertébrale de la famille, elle est le lien qui unit tout le monde, elle est la modératrice qui calme les ardeurs et les sauts d’humeurs. Elle est l’Amour avec un grand A qui fait le bonheur du monde. Comment des êtres infâmes puissent se permettre de lever la main sur une femme, d’autant plus qu’elle soit l’épouse et la mère des enfants. Quand on est incapable d’aimer, pourquoi épouser une personne pour la malmener en lui faisant subir toutes les misères du monde. Cet assassin ne mérite aucune indulgence. Madame Latifé Kassir est morte sous les coups d’un lâche, incapable de se mesurer à un autre homme, pour se prouver sa virilité illusoire, dans un moment de doute sur sa propre personnalité. Latifé kassir a laissé ses enfants en gages à la société et à la justice pour qu’ils se rappellent d’elle et des souffrances qu’elle a subi par un homme qui se croit toujours au-dessus des lois, puisqu’il est aujourd’hui en liberté. Par ce fait, les Parents et les enfants privés de faire le deuil d’un être d’Amour, parce qu’une juge a décidée de libérer un être abjecte qui n’a eu aucune pitié de sa victime. Mes sincères condoléances à la famille et aux enfants de Latifé kassir, que Dieu L’accueil dans son paradis. Amen !

    Le Point du Jour.

    19 h 57, le 27 août 2021

  • La femme libanaise peut être couverte de marques de luxe, d’or et de diamants. Helas au final, au regard de la loi, elle vaut moins qu’un homme. Une presque sans-droits. Qu’elle ne l’oublie pas.

    JiJii

    19 h 42, le 27 août 2021

  • On devrait le castrer et en faire un exemple!

    Wow

    13 h 09, le 27 août 2021

  • La honte et l'in-justice de cette "justice" à la carte et à la corruption. Repose en paix et veille sur tes enfants Latifa.

    Christine KHALIL

    08 h 45, le 27 août 2021

  • Ya aayb el choum!! Quelle honte pour une justice qui se dit Juste!!! A quand notre siècle des lumières...???

    Wlek Sanferlou

    03 h 35, le 27 août 2021

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