Le patriarche maronite Béchara Raï a plaidé dimanche pour la nomination rapide d'un nouveau Premier ministre désigné "capable de faire face aux défis" du Liban en pleine crise, s'interrogeant sur la façon dont peut "fonctionner un État sans pouvoir exécutif", alors que le pays attend depuis plus de onze mois un nouveau cabinet.
Les nouvelles exhortations de Mgr Raï, accompagnées de sévères critiques à l'égard de la classe politique qu'il a qualifiée d'"incapable", ont été lancées alors que jeudi, Saad Hariri s'est récusé de sa mission de formation du futur cabinet, après des mois de bras de fer politique personnel l'opposant au chef de l'État Michel Aoun et à son camp. Cette récusation enfonce encore un peu plus le Liban dans une crise politique sévère, qui vient aggraver l'effondrement socio-économique et financier du pays, marqué par une dépréciation rapide de la monnaie nationale et des pénuries.
"Au nom du peuple appauvri, humilié et affamé (...) et de notre nation qui s'effondre, nous appelons toutes les forces politiques à joindre leurs efforts et se concerter pour nommer, lors des prochaines consultations parlementaires contraignantes, une personnalité sunnite" en tant que Premier ministre désigné, a lancé le patriarche lors d'une messe à Dimane, au Liban-Nord. Cette personne devra pouvoir faire face aux "défis actuels" et former rapidement le nouveau cabinet, a-t-il ajouté. "Le temps est venu d'assumer les responsabilités et ne pas de se replier", a-t-il souligné, estimant que le Liban ne connaît pas actuellement une "crise gouvernementale ordinaire, mais une crise nationale totale qui nécessite d'unifier les efforts de tous afin de lutter contre un coup d'État contre le régime, la Constitution et les institutions". Il a exprimé l'espoir qu'à terme, "une nouvelle situation politique rétablissant les équilibres et répondant aux attentes des pays-amis" puisse être créée. "Au nom de la responsabilité nationale, il faut passer outre les intérêts égoïstes et les calculs électoraux étroits qui dominent au sein de la majorité des forces politiques, et faire primer l'intérêt national suprême", a-t-il plaidé.
La levée nécessaire des immunités
"Comment un État peut-il fonctionner sans pouvoir exécutif", s'est encore indigné le dignitaire maronite. C'est de ce pouvoir que dépendent "les réformes nécessaires pour construire les différents secteurs, et qui sont la condition de toute aide financière internationale et le contrôle des ministères et administrations permettant de mettre fin à la corruption financière", a-t-il rappelé. Il a indiqué qu'un nouveau gouvernement permettrait également de soutenir le travail du juge d'instruction près la cour de justice, Tarek Bitar, dans son enquête sur la double explosion au port de Beyrouth, et de résoudre la question de la levée des immunités. "Face au nombre des victimes et des blessés, à la tristesse et au sang versé, les immunités devraient s'évaporer", a-t-il déclaré.
"Qui d'autre que le gouvernement peut effectuer le suivi de l'audit juricomptable de la Banque du Liban et de tous les ministères, fonds et conseils ? Qui d'autre que le gouvernement peut mettre un terme à la contrebande, au gaspillage et au vol des fonds publics ?", s'est-il interrogé. Le patriarche a par ailleurs estimé que la "perte de temps" dans les développements politiques "renforce l'idée de l'organisation d'une conférence internationale" pour faire sortir le Liban de la crise. "Les responsables politiques prouvent chaque jour qu'ils sont incapables de respecter leurs plus petites obligations vis-à-vis du peuple et de la nation, a-t-il poursuivi. Ces politiciens sont incapables de régler les problèmes quotidiens les plus élémentaires, comme la gestion des déchets, l'approvisionnement en électricité, en vivre, en médicaments et en carburants. Ils sont incapables de lutter contre la corruption".
Ce pays s’en tirerait mieux sans pouvoir exécutif et surtout sans président vu les preuves d’incompétence et de trahison.
13 h 22, le 19 juillet 2021