La décision de lever ou non l'immunité des députés et ex-ministres Nouhad Machnouk, Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter sera prise "d'ici 15 jours", a affirmé un porte-parole de Aïn el-Tiné à notre publication-soeur en anglais, L'Orient Today, alors que le bureau du Parlement et la commission de la Justice se sont réunis vendredi pour étudier cette question.
Le juge Tarek Bitar avait envoyé cette requête pour inculper ces trois députés et engager des poursuites contre eux pour "éventuelle intention d'homicide" mais aussi pour "négligence et manquements" dans le cadre de son enquête sur la double explosion au port de Beyrouth. En plus de ces députés et du général Ibrahim, le juge Bitar avait lancé des poursuites contre l'ex-commandant en chef de l'armée Jean Kahwagi, un ex-chef des renseignements de l'armée, Camille Daher, plusieurs officiers et le chef de la Sécurité de l’État Tony Saliba et réclamé la semaine dernière la levée de l'immunité de l'ex-ministre Youssef Fenianos pour les mettre en examen pour les mêmes chefs d'accusation.
Au cours des deux prochaines semaines, les députés du bureau du Parlement et de la commission de la Justice, à laquelle appartiennent Ghazi Zeaïter et Ali Hassan Khalil, devront poursuivre leur étude de la demande envoyée la semaine dernière par le juge Bitar.
"Le Parlement s'engage à poursuivre scrupuleusement l'étude de ce dossier, en vertu de la Constitution, jusqu'à ce que toute la vérité soit faite sur l'explosion", a déclaré le vice-président de la Chambre, Elie Ferzli, après la réunion. Il a indiqué que les députés avaient demandé à la justice un "résumé des preuves" et "tous les documents" nécessaires concernant l'implication des députés visés par la demande de levée de l'immunité. "Dès que ces informations auront été fournies, une autre réunion aura immédiatement lieu afin de poursuivre l'étude du dossier et préparer un rapport qui sera envoyé à l'Assemblée générale", a-t-il expliqué.
Sit-in à Aïn el-Tiné et Sanayeh
En marge de la réunion parlementaire à Aïn el-Tiné, des membres des familles de victimes de la double explosion au port de Beyrouth ont manifesté près de la résidence du président de la Chambre. Le sit-in s'est déroulé sous tension, sous haute surveillance des forces armées et de la police qui ont empêché les proches des victimes de s'approcher du lieu de la réunion. Les militaires et les agents des Forces de sécurité intérieure n'ont pas hésité à repousser violemment les manifestants en deuil et en colère, provoquant bousculades et échauffourées, d'après des images de la chaîne locale LBCI. "Nous sommes prêts à toutes les confrontations", a hurlé l'un des manifestants, au milieu d'un océan de portraits des victimes de la déflagration du 4 août. "Ils nous ont tués, ils ont tué nos enfants. Qu'attendez-vous ? Je ne comprends pas", a crié une autre femme. "J'en appelle à la communauté internationale. Cela fait trente ans que la société libanaise est soumise", a affirmé une troisième personne. Les familles ont réclamé la justice pour les victimes et appelé à ce que le dossier ne soit pas politisé.
Les protestataires se sont ensuite dirigés vers le siège du ministère de l'Intérieur, dans le quartier de Sanayeh, afin de protester contre la décision du ministre Mohammad Fahmi de refuser que le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, comparaisse devant la justice. "Nous sommes avec toi, Tarek Bitar, quoi qu'il arrive", ont-ils scandé, bloquant la route devant le ministère avec leurs véhicules.
"Complicité" des responsables
Dans ce contexte de tensions, M. Berry a dépêché son conseiller, Ali Hamdan, auprès des manifestants pour leur faire part de "son attachement à la loi" et de "son soutien au peuple".
Pour leur part, les familles des pompiers décédés dans l'explosion ont critiqué la décision de M. Fahmi et le fait que, selon certains, le Parlement refuserait de lever l'immunité des députés. "Tous ceux qui se cachent derrière leur immunité et refusent d'être entendus (par la justice) en manipulant la loi prouvent leur implication ou montrent qu'ils ont en leur possession des informations relatives à l'enquête", ont estimé ces familles. Elles ont appelé à faire le jour sur "l'étendue de la complicité (des responsables) avec des milices internes, des pays et des fonds étrangers". Les proches des pompiers décédés ont averti que, face à ces refus des dirigeants de coopérer avec la justice, ils étaient prêts à "entrer dans les maisons des responsables politiques sans aucune autorisation, afin de les soumettre à l'enquête". "Notre seul objectif est de demander des comptes à tous ceux qui ont participé à l'assassinat de nos frères et de nos fils", ont-ils écrit dans un communiqué.
commentaires (2)
Pourquoi 15 jours ? Berri va se gratter la tête pour chercher une échappatoire . Le guide suprême a rendu son verdict, ils vont tous l'applaudir.
Esber
17 h 01, le 09 juillet 2021