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Idées - Appel

Les autorités doivent prendre leurs responsabilités et agir immédiatement pour éviter l’abîme !

Par Collectif


Les autorités doivent prendre leurs responsabilités et agir immédiatement pour éviter l’abîme !

Photo d’illustration Marc Fayad

Depuis plusieurs jours, nous assistons à une détérioration notable et dangereuse du taux de change de la monnaie nationale par rapport au dollar, sur fond d’une crise politique et sociale particulièrement inquiétante. Cette détérioration a coïncidé avec l’émission, par la Banque du Liban, de la circulaire de base n° 158 du 8 juin 2021, qui visait, selon ses motifs, à freiner la détérioration, soulager les déposants et restaurer la confiance dans le secteur bancaire – sans oublier le remboursement progressif des dépôts en devises étrangères dans les comptes ouverts avant le 31 octobre 2019. Or, comme de coutume après la publication de chaque circulaire importante et aux objectifs similaires (telle que les précédentes circulaires de base n° 150, 151 et 154), et comme le dit le proverbe arabe : « Les vents ne soufflent pas toujours dans le sens voulu par les navires. » En effet, depuis l’annonce de la circulaire n° 158, c’est-à-dire en quelques jours seulement, le taux de dépréciation de la livre s’est brutalement accéléré pour dépasser les 20 %.

Face à cette triste réalité, faisant suite à plus de dix-huit mois de stagnation et d’inaction résolue de la part des autorités, et en prévision de l’effondrement total et dramatique qui s’annonce à tous les niveaux, nous, experts de divers horizons, avons œuvré – à titre individuel ou collectif – depuis un certain temps déjà pour proposer des études qualitatives et des plans de sauvetage pouvant constituer une base solide pour des négociations sérieuses. Nous travaillons désormais à unifier nos vues et nos recommandations pour parvenir à des solutions concrètes et objectives pouvant permettre de stabiliser et de rééquilibrer les finances, de relancer l’économie et de restaurer la confiance, tout en assurant un filet de sécurité sociale à même de protéger la population contre les dommages collatéraux anticipés. Dans ce contexte, nous appelons l’ensemble des responsables politiques et des autorités monétaires à accomplir dès à présent, et sans perdre un jour de plus, leurs devoirs et responsabilités minimums en matière de garantie des intérêts des citoyens et du bon fonctionnement de chacun des services publics dont ils ont la charge.

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Par conséquent, nous demandons d’abord à l’exécutif de cesser de prendre prétexte de l’alinéa 2 de l’article 64 de la Constitution – qui dispose que « le gouvernement ne peut exercer ses prérogatives (…) après avoir été considéré comme démissionnaire, que dans le sens étroit de l’expédition des affaires courantes » – pour justifier son refus de tenir des séances du Conseil des ministres et de prendre les décisions nécessaires. Cela contrevient en effet à la coutume, à la jurisprudence et à la Constitution elle-même, lorsque les décisions qui doivent être prises s’inscrivent dans des circonstances exceptionnelles et cruciales – ce qui est le cas du désastre économique et social actuel –, et qu’elles relèvent par nature du principe de « continuité des services publics », dont le manquement est passible de sanctions multiples (pouvant aller jusqu’à la haute trahison).

Nous demandons ensuite à la Banque centrale de remplir ses devoirs sans négligence, ambiguïté, abus ou transgression de ses pouvoirs, en respectant à la lettre les dispositions des articles 70, 71 et 175 du code de la monnaie et du crédit en matière de préservation de la stabilité monétaire, de protection de la stabilité économique et de maintien de l’intégrité du système bancaire. Il lui incombe en effet d’appliquer les lois en vigueur en restructurant le secteur bancaire et en assurant la bonne relation des banques avec leurs clients et en déterminant les règles que les banques doivent respecter pour rétablir leur liquidité et leur solvabilité. Et ce, sans se soustraire à l’application de ces lois ni faire preuve d’indulgence à l’égard des personnes influentes. Sans non plus continuer à émettre, comme elle en a désormais pris l’habitude, des circulaires non coordonnées et dépourvues de tout lien entre elles ou avec une quelconque politique globale cohérente – ce type d’intervention conduisant nécessairement, comme le Fonds monétaire international l’a encore récemment souligné, à des résultats contre-productifs, à commencer par la détérioration du pouvoir d’achat résultant de la multiplicité des taux de change. En outre, la Banque centrale doit également assurer une base pour la croissance économique et le développement social, coopérer avec le gouvernement et lui fournir tous les conseils relatifs à la politique monétaire et économique afin d’assurer la meilleure harmonie entre sa mission et les objectifs financiers, économiques et sociaux du gouvernement.

Nous demandons également au pouvoir législatif d’assumer ses responsabilités et devoirs envers les citoyens ; d’accélérer la formation d’un gouvernement de sauvetage indépendant et incluant des spécialistes ; et de lui accorder la confiance et des pouvoirs étendus pour développer un programme de réforme intégré pouvant servir de base de négociations avec les bailleurs de fonds et le Fonds monétaire international. Il est temps de cesser de se contenter de propositions populistes injustes et de solutions fragmentaires et dépourvues de toute base scientifique qui exacerbent le problème au lieu de le résoudre.

Nous demandons enfin au pouvoir judiciaire de se libérer de ses contraintes comme de ses craintes et de restaurer son prestige, son impartialité et son indépendance en rétablissant la vérité et en agissant en toute équité sans équivoque, rétractation ni retard.

Le temps est venu de prendre des mesures significatives et d’exercer une pression sérieuse pour sortir de ce tunnel mortifère et demander des comptes aux responsables – quels qu’ils soient et quelles que soient leurs affiliations – pour leur ignorance, leur mauvaise gestion, leur incapacité à assumer leurs responsabilités, leur inaptitude à gérer les fonds publics et leur incapacité à développer une économie productive basée sur une redistribution plus juste de la richesse nationale. Le Liban a donc plus que jamais besoin d’une nouvelle autorité, capable et juste, qui établisse une vision économique productive et cohérente avec un plan de sauvetage économique et financier efficace qui comprenne un ensemble de politiques et de décisions visant un impact positif et rapide sur les conditions économiques et sociales du pays. Il est de même urgent que les principes de transparence, de responsabilité et d’intégrité, ainsi que les lois en vigueur, soient véritablement appliqués afin de permettre un rétablissement de la confiance dans les institutions.

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Nous appelons par conséquent tous ceux qui ont une opinion libre et un patriotisme sincère à faire preuve de solidarité, à soutenir et à contribuer, chacun dans la mesure de ses capacités et de ses compétences, et à faire pression sur les autorités. Nous les appelons aussi à recueillir les propositions de réforme existantes afin d’offrir une vision globale et de redessiner des politiques et des priorités économiques qui tiennent compte des intérêts du citoyen et qui soient conformes à un modèle économique moderne, responsable et efficace. En même temps, nous demandons aux différents responsables d’abandonner les solutions partielles, irréfléchies et irréalistes visant à gagner du temps et jeter de la poudre aux yeux, mais d’adopter, au contraire, une vision économique intégrée et bien définie qui vise à respecter les citoyens – dans les actes plutôt que les paroles – en prenant en compte leurs préoccupations et leurs besoins afin de conclure un nouveau contrat social au sein d’une patrie qui inclue tous ses fils.

À défaut, tout retard dans l’adoption de mesures urgentes pour faire face à l’effondrement conduira inévitablement à une inflation excessive, ce qui entraînera une incapacité totale à sortir de l’impasse sans subir d’énormes dommages et des pertes définitives irréparables à tous les niveaux, en particulier pour les droits des déposants et des citoyens.

Nous nous mettons au service de la société libanaise et appelons l’État, la Banque centrale et le secteur bancaire à organiser dans l’urgence des sessions de discussions ouvertes avec toutes les parties – en particulier celles disposant d’une expertise établie –, afin de déterminer la voie à suivre. Nous les appelons également à prendre des mesures rapides et décisives pour arrêter la détérioration du taux de change et éviter une inflation excessive, et pour développer en parallèle un plan de sauvetage monétaire, économique et financier qui distribue les pertes de manière équitable et objective et dans le respect des normes de bonne gouvernance.

Signataires:

Roy Badaro (économiste) ; Mansour Bteish (ancien ministre de l’Économie et du Commerce); Henri Chaoul (ancien membre de l’équipe représentant le Liban dans les négociations avec le FMI) ; Nicolas Chikhani (économiste); Karim Daher (avocat) ; Ziad Hayek (ex-secrétaire général du Haut Conseil pour la privatisation).

Depuis plusieurs jours, nous assistons à une détérioration notable et dangereuse du taux de change de la monnaie nationale par rapport au dollar, sur fond d’une crise politique et sociale particulièrement inquiétante. Cette détérioration a coïncidé avec l’émission, par la Banque du Liban, de la circulaire de base n° 158 du 8 juin 2021, qui visait, selon ses motifs, à freiner la...

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FAUTE TRES GRAVE DES LE DEPART : continuer a interpeller "les responsables " ? NON MAIS VS REVEZ OU QUOI ? LES RESPONSABLES ?

Gaby SIOUFI

11 h 15, le 19 juin 2021

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Commentaires (4)

  • FAUTE TRES GRAVE DES LE DEPART : continuer a interpeller "les responsables " ? NON MAIS VS REVEZ OU QUOI ? LES RESPONSABLES ?

    Gaby SIOUFI

    11 h 15, le 19 juin 2021

  • DES SOUHAITS ET DES GENERALITES. ET ENTRE CES PRETENDUS CONSEILLERS LE MONSIEUR QUI PROPOSAIT IL Y A TROIS JOURS ENCORE LE PONCTIONNEMENT DE 60PCT DES DEPOTS EN DOLLARS ET LE REMBOURSEMENT DU RESTE EN L.L. AU TAUX DE 1500.- LL LE DOLLAR EN ACTIONS DES BANQUES EN FAILLITE. DE TELS PRETENDUS TECHNOCRATES ERIGES EN CONSEILLERS ECONOMIQUES ET FINANCIERS SONT DES COMPLICES DES MAFIEUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 09, le 19 juin 2021

  • Was quelle belle plume a écrit cette lettre, je leur donne une note de 18,5 sur 20 pour leur rédaction. Cependant ils rêvent debout et pensent encore qu’ils ont en face d’eux des politiciens compétents et munis d’un minimum de bonne conscience. Ils ont tous oublié que ces politiciens sont tous des voleurs et des bandits formant des mafias de plus incompétents et en plus orgueilleux de façon démesurée . Comparés à eux, Al Capone et Escobar sont des enfants de cœur. Donc votre action devrait plutôt être concentrée à chasser toute cette clique du pouvoir pour mettre à leur place des personnes honnêtes et compétentes.

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 23, le 19 juin 2021

  • Vous avez oublié de demander à l'armée de s'associer aux réformes, en assurant la sécurité, contre toute turbulence étudiée.

    Esber

    06 h 29, le 19 juin 2021

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