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Économie - Monnaie

Relance de Sayrafa : la BDL s’apprête à vendre des dollars

La Banque du Liban ne précise pas d’où proviendront les billets verts qu’elle compte livrer aux banques.

Relance de Sayrafa : la BDL s’apprête à vendre des dollars

Sayrafa avait été initialement déployée en juin 2020 pour tenter de renforcer la transparence sur le marché des changes. Photo P.H.B.

Nouveau développement dans le feuilleton de la relance de la plate-forme Sayrafa initialement dédiée aux agents de change et que les banques ont été invitées à intégrer suite à une décision adoptée par les autorités en mars en plein contexte de crise.

Dans une brève annonce faite hier, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé a indiqué que la BDL « allait vendre des dollars aux banques inscrites sur la plate-forme (…) au taux de 12 000 livres pour un dollar » pour le compte de leurs clients, soit un niveau très proche de celui que suit le marché parallèle depuis plusieurs semaines (il était aux alentours de 12 800 livres hier en fin de journée).

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Le haut responsable a aussi expliqué que les clients intéressés pourront à partir d’aujourd’hui et jusqu’au 25 mai remettre à leurs banques, en espèces, les sommes qu’ils voudront convertir à l’occasion de cet exercice, un moyen pour la BDL de tenter de réduire la masse monétaire en circulation. Ces montants seront « exclusivement » transférés vers les banques correspondantes le 27 mai. La banque centrale ne dit pas en revanche si et comment les clients pourront vendre leurs dollars à travers cette plate-forme, et ne mentionne même pas les agents de change.

Nouvelles zones d’ombre

Sayrafa avait été initialement déployée en juin 2020 pour tenter de renforcer la transparence sur ce marché où le taux dollar/livre est influencé par des agents informels, qui échappent à tout contrôle et dont la nature des relations avec des acteurs exerçant dans la légalité est au centre d’une procédure judiciaire lancée en 2020. Uniquement réservée aux agents de change agréés qui étaient alors autorisés à appliquer un taux bien inférieur à celui du marché parallèle, le lancement de la plate-forme s’était soldé par un échec, notamment parce que seules certaines transactions étaient autorisées à travers elle.

La plate-forme revient sur la table en mars suite à une nouvelle période de forte volatilité de la livre, les autorités et la BDL décidant alors de demander aux banques de l’intégrer – sur la base du volontariat – pour réaliser elles aussi des opérations de change, avec l’espoir de limiter les opérations spéculatives contre la monnaie nationale. La mise en œuvre de cette initiative annoncée pour mars mettra finalement plusieurs semaines à se concrétiser et il faudra finalement attendre le début du mois de mai pour que les circulaires fixant les nouvelles règles de fonctionnement de la plate-forme soient publiées (circulaires n° 157, n° 582 et n° 583).

Mais si ces textes avaient déjà laissé apparaître de nombreuses zones d’ombre, cette nouvelle annonce soulève, elle, beaucoup plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Pour ne rien arranger, l’ensemble des acteurs bancaires que nous avons contactés affirment ne même pas avoir été notifiés par la BDL en amont de la publication de son communiqué, alors que le secteur est supposé commencer à en appliquer le contenu aujourd’hui, ce qui semblait encore incertain hier soir selon certains d’entre eux.

Tout d’abord, le communiqué de la Banque du Liban ne précise pas d’où proviendront les dollars qu’elle compte vendre aux banques, alors que ses réserves de devises ont dépassé depuis longtemps un seuil critique. En se basant sur ses propres sources, la LBCI semblait certaine que ces dollars proviendraient des réserves obligatoires des banques auprès de la banque centrale, à en croire un reportage diffusé au bulletin d’information du soir. Or ces réserves, que le gouverneur se refuse à ponctionner, constitueraient aujourd’hui la quasi-totalité des réserves de devises restantes.

La banque centrale n’indique pas non plus si le taux de 12 000 livres qu’elle a évoqué hier sera maintenu au-delà des dates fixées dans le communiqué ou s’il évoluera ensuite en fonction du jeu de l’offre et de la demande comme le prévoit la finalité de Sayrafa. Elle reste aussi silencieuse au sujet des plafonds qui pourraient être imposés par client ou par transaction. La circulaire n° 157, qui concentrait l’essentiel des modalités, n’avait pas non plus fixé de limite, laissant supposer qu’elle laissait cette prérogative à la discrétion des banques. De plus, l’annonce de la BDL n’identifie pas qui, entre la BDL et les banques commerciales, sera chargé d’approuver ou non les demandes et selon quels critères. Des points qui n’étaient pas non plus développés dans les circulaires déjà publiées.

Historique des transferts

Rien dans le communiqué n’indique en outre si tous les Libanais pourront être potentiellement éligibles pour acheter via leurs banques des dollars vendus par la BDL, tandis que plusieurs sources bancaires contactées par L’Orient-Le Jour estiment que cette faculté ne sera finalement réservée qu’aux importateurs et aux industriels. « Si c’est le cas, l’examen de l’historique des transferts effectués par le client va certainement être décisif pour autoriser les opérations et déterminer les montants qui pourront être échangés », suppose l’une des sources contactées.

Celles-ci s’interrogent également sur la portée de la dernière annonce de la BDL qui semble dire, d’après sa rédaction, que les dollars achetés à 12 000 livres ne pourront servir qu’à être transférés à l’étranger. Or la circulaire n° 157 énonçait clairement que les devises achetées via Sayrafa (aux banques comme aux agents de change) pourraient servir aussi bien à provisionner des transferts ou des comptes en devises et que les clients auraient « la liberté » d’utiliser les devises déposées sur leurs comptes frais pour « profiter de tous les services bancaires offerts par leurs banques comme les transferts à l’étranger, les retraits d’espèces et les services de cartes bancaires au Liban et à l’étranger ».

Une autre source bancaire pense au contraire que le contenu du communiqué de la BDL sur ce point précis est complètement en ligne avec la circulaire. « La BDL dit que les dollars achetés vont être transférés dans les comptes des banques libanaises auprès de leurs banques correspondantes et pourront alors servir à provisionner toutes les transactions que les clients – peu importe leur identité ou leur profession – voudront réaliser, qu’il s’agisse de retraits en espèces au Liban, de transferts, ou d’achats à l’étranger, après déduction des commissions prévues », explique la source. Le problème, c’est que les retraits de dollars au Liban ne peuvent se faire qu’à partir de compte de dollars « frais », par opposition aux comptes de « dollars libanais », ou « lollars », dont l’accès a été restreint par les banques depuis le début de la crise. Rien n’est en revanche mentionné concernant le cas des clients qui ne disposent pas de tels comptes.

La responsabilité de la BDL dans la crise actuelle, marquée par une forte dépréciation de la livre, a été soulevée par de nombreuses voix depuis le début de la contestation du 17 octobre 2019, tandis que le gouverneur est visé par plusieurs procédures judiciaires au Liban et à l’étranger.

Nouveau développement dans le feuilleton de la relance de la plate-forme Sayrafa initialement dédiée aux agents de change et que les banques ont été invitées à intégrer suite à une décision adoptée par les autorités en mars en plein contexte de crise.
Dans une brève annonce faite hier, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé a indiqué que la BDL « allait vendre des...

commentaires (1)

Et voila la BDL renforce la multiplicite des marches de change au Liban. La BDL et les crapules bancaires vont vendre leurs dollars au public a 12000 Livres. Par contre ils achetent les dollars des deposants a 3900 Livres.... La BDL confirme le vol par elle-meme et par les banques des depots en devises de leurs clients. Le tout a l'oppose de ce que demandent Cedre, la Banque mondiale et le FMI pour aider le pays. Le Liban est livre a des escrocs et des voleurs qui y font la loi....

Michel Trad

00 h 45, le 21 mai 2021

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Commentaires (1)

  • Et voila la BDL renforce la multiplicite des marches de change au Liban. La BDL et les crapules bancaires vont vendre leurs dollars au public a 12000 Livres. Par contre ils achetent les dollars des deposants a 3900 Livres.... La BDL confirme le vol par elle-meme et par les banques des depots en devises de leurs clients. Le tout a l'oppose de ce que demandent Cedre, la Banque mondiale et le FMI pour aider le pays. Le Liban est livre a des escrocs et des voleurs qui y font la loi....

    Michel Trad

    00 h 45, le 21 mai 2021

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