L’exception culturelle libanaise ratisse large désormais. On connaissait déjà le trafic primitif de cigarettes, puis la contrebande un brin évoluée de hasch, sans oublier la circulation sous le manteau de cassettes vidéo et DVD cochons à destination des frustrés du désert. Depuis, le savoir-faire patrimonial s’est étendu pour englober l’entrée de serpentins de camions chargés de missiles par la frontière syrienne et de pièces d’artillerie avec accessoires et périphériques par l’aéroport de Beyrouth.
Mais les temps sont durs et faut bien chauffer la marmite. Dotés d’une créativité sans limite, les trafiquants locaux ont ainsi inventé une recette à l’export appétissante qui fait à la fois triper et planer: les grenades farcies aux amphétamines. Tant et si bien, que les Saoudiens en ont fait une indigestion et usé de leur finesse légendaire en sanctionnant d’un trait de sabre tout ce que le pays compte comme cultivateurs. Tant pis ! Ils n’auront plus leurs cinq fruits et légumes par jour…
Face à l’escadrille de tuiles économiques qui s’annoncent, le dernier pince-fesse de Baabda avait de quoi donner la chair de poule et défriser le poil intime: jérémiades larmoyantes à l’adresse du roitelet wahhabite et de son fils héritier, prince sans rire ; promesse d’enquête « sous 5 jours » selon la formule consacrée, juste pour coffrer trois ou quatre traîne-lattes des douanes et de la police ; parades devant les caméras pour muscler les effets d’annonce.
Et quoi ensuite pour dissuader les patrons fabricants de came ? Tremblez minables, car voici les pandores de la Brigade Dondaine. F, S et I, trois lettres synonymes de plantons devant les villas de politiciens, sandwiches en bandoulière, barrages pour taxe mécanique et coups de crosse assenés aux manifestants. Circulez, y a rien à voir ! Une présence tellement bidon que ça en devient bidonnant.
Au milieu de tout ça trône heureusement le Basileus, qui tient crachoir toutes les semaines et nous permet de savourer sa prose. Lui veut donner des leçons à la planète entière, mais entre aussitôt en transe dès la vue du Château, rien que pour repérer s’il n’y a pas moyen de moyenner pour la présidentielle de 2022. Il nous en aura fait avaler des boas celui-là, depuis qu’il s’ébroue auprès de beau-papa…
Maintenant que l’on commence à ressembler aux Afghans, aux Rwandais et aux Coréens du Nord, faut seulement songer à rafraîchir l’expérience politique. Dans ce climat devenu monotone, il suffira chaque quelque temps de rallumer Mongénéral et le Mollasson désigné: convaincre le premier que le patron de la Futuroscopie veut racheter le palais de Baabda pour le vendre aux enchères, et persuader le second que l’Amer Michel fait espionner l’interphone de son bureau et la cocotte-minute de sa cuisine.
Là, il y aura à nouveau de l’ambiance… Et c’est reparti pour un tour !
gabynasr@lorientlejour.com
commentaires (4)
"Il nous en aura fait avaler des boas celui-là, depuis qu’il s’ébroue auprès de beau-papa…" Et comment!
Georges MELKI
11 h 36, le 10 mai 2021