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Lifestyle - Un peu plus

Testée positive

Testée positive

Photo Bigstock

Au début, on connaissait peu de gens qui « l »’avaient attrapé. On n’en parlait pas d’ailleurs. Aayb. Un peu comme avec le VIH. Parce que celui qui avait chopé le Covid-19 avait forcément déconné. Il y avait peu de cas au Liban en mars dernier, mais la peur était là. Le premier confinement a été respecté et on pensait que ça irait vite. Qu’on se débarrasserait rapidement du virus. Sauf que. Sauf que la situation a dégénéré. Les mesures de sécurité (port du masque, distanciation, lavage de mains…) n’ont quasiment plus été respectées. Et le Liban a commencé sa descente aux enfers, les fêtes de fin d’année n’ayant pas aidé, si on peut dire ça comme ça. Et de « on ne connaissait personne », nous sommes passés à « tout le monde l’a ». Et la série de mauvaises nouvelles a commencé à pleuvoir. Contagions, hospitalisations, décès, crise de l’oxygène, manque de médicaments, rupture de stock de Panadol et surtout le débordement des hôpitaux… 2021 a démarré sous les pires auspices.

J’ai été testée positive à Dubaï où je suis venue passer quelques jours. Au même moment, mon père était hospitalisé, mon frère l’attrapait, mon homme ainsi que sa famille étaient testés positifs, mes ami(e)s à Beyrouth, leurs familles et tous les autres. J’ai eu la chance d’avoir une atteinte modérée. Une immense fatigue, un rhume, des maux de tête, la perte du goût et de l’odorat, la déprime, l’insomnie, la peur et la tristesse. La peur de tarder à retrouver le goût, de ne pas me remettre sur pied rapidement, de connaître les effets secondaires sur le long terme. Mais la peur, surtout pour mes proches. Pour mon père, hospitalisé pendant trois semaines, pour ma mère, à haut risque, pour mon frère, mon entourage. Puis la tristesse s’est installée. Des amis s’en sont allés, mes proches ont perdu un des leurs. Un père, une grand-mère, une tante. J’ai vu mes amis souffrir à cause du départ de leurs parents. Je les ai vus ne pas pouvoir leur dire un dernier au revoir, les enterrer en silence sans personne autour pour les soutenir. Et j’ai touché de près la gravité de cette pandémie que d’aucuns ont prise au départ pour une simple grippe. J’ai compris qu’on ne jouait plus. Que le danger était partout et bien évidemment que certaines personnes, et en particulier les Libanais, étaient irresponsables, mais qu’ils avaient eux aussi peur. Ceux-là, on ne peut pas leur en vouloir. Ils préfèrent mourir du Covid que de crever de faim. Ils ont besoin de travailler, de rapporter un peu d’argent à la maison pour tenir le coup… L’État ne leur apportant non seulement aucune aide, mais empêchant les ONG de distribuer nourriture et médicaments durant ce nouveau lockdown. Quant aux autres, nul besoin de les mentionner à nouveau. Ils ont été le maillon faible et ils continuent encore à l’être, à coups de soirées clandestines et de regroupements ridicules.

Les Libanais vivent le plus affreux moment de l’histoire de leur pays. Ils agonisent dans un génocide mal dissimulé. Ils attendent leur salut à travers l’arrivée du vaccin. Vaccin qui sera une nouvelle monnaie d’échange pour la classe politique, plus adepte au clientélisme qu’au sauvetage de leur peuple. Ils attendent la solution, le miracle pour que les choses changent. Et tant leur apathie que leur désespoir ne sont plus objets de reproches. Comment peut-on encore demander à un peuple qu’il se soulève quand il est écrasé sous la botte de ses dirigeants plongés dans l’essence même de l’amoralité? Comment peut-on lui demander de se débattre quand il a les poings et les pieds liés ? Le peuple libanais est pris en otage aux yeux et au sus du monde entier. Ce peuple admiré pour sa résilience, on ne le regarde plus. On a posé ses yeux sur lui lors de la tragédie du 4 août, puis ce qui était une des plus grandes catastrophes humaines est devenu un ancien fait divers de l’année dernière. Et désormais, les Libanais se débattent seuls. Ils sont testés positifs en masse. Parce que pour un cas recensé, il y en a trois ou quatre autres en face. Parce que le PCR est cher et que peu de gens ont les moyens de se le payer. Les Libanais meurent dans les parkings d’hôpitaux. Ils se voient refuser l’entrée des urgences faute de place. Ils étouffent faute d’oxygène. Ils sont emprisonnés chez eux, tandis que le virus continue sa flambée macabre. Les Libanais attendent ce foutu vaccin. Mais qui en profitera? Qui pourra se l’offrir ? Tant de questions sans réponses… une fois de plus.

J’ai enfin été testée négative à nouveau, mais j’ai encore et toujours peur.

Au début, on connaissait peu de gens qui « l »’avaient attrapé. On n’en parlait pas d’ailleurs. Aayb. Un peu comme avec le VIH. Parce que celui qui avait chopé le Covid-19 avait forcément déconné. Il y avait peu de cas au Liban en mars dernier, mais la peur était là. Le premier confinement a été respecté et on pensait que ça irait vite. Qu’on se débarrasserait...

commentaires (1)

C,EST DE LA PROVIDENCE. D,AUTRES DIRAIENT DE LA ROULETTE RUSSE MAIS CHARGEE DE CINQ BALLES ET UNE SEULE CHAMBRE VIDE.

LA LIBRE EXPRESSION

10 h 25, le 29 janvier 2021

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Commentaires (1)

  • C,EST DE LA PROVIDENCE. D,AUTRES DIRAIENT DE LA ROULETTE RUSSE MAIS CHARGEE DE CINQ BALLES ET UNE SEULE CHAMBRE VIDE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 25, le 29 janvier 2021

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